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Notation de crédit: le Burkina face à des risques importants

• Selon la note CCC+ de S&P

• Avec des perspectives stables

• La structure de la dette publique reste un atout pour le crédit

Le coup d’Etat d’Ibrahim Traoré n’a pas dégradé la notation du Burkina Faso auprès des investisseurs. Le 11 novembre 2022, l’agence de notation S&P Global Ratings a confirmé les notes de crédit souverain à long terme ‘CCC+’ et à court terme ‘C’ du Burkina Faso. Des notes qui avaient été attribuées au pays en juin dernier, après avoir placé le pays au bord du « défaut de paiement ».

Ainsi, pour l’agence de notation, le pays reste toujours confronté à des risques importants. La notation de crédit étant une évaluation du risque de crédit du pays prédisant sa capacité à rembourser la dette. La notation du Burkina contient une perspective stable. Celle-ci met en balance « les vents contraires politiques, économiques et budgétaires découlant du récent coup d’État et de la détérioration de la situation sécuritaire dans la région du Sahel, avec l’appartenance du Burkina Faso à l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA) », selon S&P.

Pour le scénario négatif, l’agence prévient : « Nous pourrions abaisser les notes si l’instabilité institutionnelle entraîne une détérioration de la croissance économique et des paramètres budgétaires, ou si les sanctions financières et la détérioration économique entraînent une augmentation des risques de refinancement de la dette commerciale du Burkina Faso, au cours des 12 prochains mois ».

La dernière information sur cette notation est qu’elle contient un « scénario haussier ». Se basant sur des aspects tels que la stabilité politique qui s’améliore, S&P pourrait relever les notes du pays. « Cela pourrait se produire si la sécurité et la situation humanitaire s’améliorent sensiblement au cours des deux prochaines années », déclare la note.

Des contraintes qui entrainent des risques importants

Dans sa note, S&P est revenu sur le faible revenu du pays, qui est une contrainte clé.

« Alors que davantage de ressources seront consacrées à la crise sécuritaire, le nouveau plan d’action de transition du gouvernement militaire prévoit des investissements considérables dans les infrastructures énergétiques et de transport. Cela pourrait se traduire par une amélioration de la productivité et du potentiel de croissance à moyen terme. Néanmoins, nous prévoyons que la situation sécuritaire et humanitaire continuera de peser sur les performances économiques du Burkina Faso dans les années à venir, principalement, en raison de son impact sur l’agriculture et les mines », peut-on lire.

Autre risque important que l’agence a noté est le fait que la hausse des dépenses militaires, ainsi que les augmentations liées à l’inflation des transferts aux ménages et aux entreprises publiques entraîneront des dérapages budgétaires importants en 2022-2025, et une accumulation de la dette plus rapide que prévu.

Compte tenu de la disponibilité limitée de prêts externes concessionnels, la plupart des besoins d’emprunt supplémentaires seront probablement satisfaits par l’émission d’obligations sur le marché régional, qui sont plus coûteuses que les financements externes concessionnels et ont des échéances plus courtes, en moyenne. Cela érodera les avantages que le Burkina Faso tire encore de la structure actuelle de sa dette, et augmentera la proportion du budget consacrée au paiement des intérêts.o

NK

 

Encadré

L’appartenance à l’UEMOA : un atout

« Selon nous, l’appartenance du Burkina Faso à l’UEMOA reste un atout important en matière de crédit. Bien que les règles budgétaires de l’Union monétaire soient actuellement suspendues, en raison de la pandémie, elles devraient constituer un point d’ancrage politique utile une fois rétablies. Plus important encore, la mise en commun des réserves de change au niveau de l’Union réduit les risques extérieurs propres à chaque pays, tandis que l’arrimage du franc CFA ouest-africain (XOF) à l’euro devrait contribuer à atténuer la flambée actuelle des prix à la consommation. En outre, l’adhésion à l’UEMOA permet au Burkina Faso d’accéder au marché des obligations souveraines de la région », déclare l’agence de notation S&P dans sa notation pays du 11 novembre 2022.

 

Légende

Point sur l’économie du pays

Les comptes nationaux trimestriels indiquent un fort ralentissement économique en 2022, la production réelle n’ayant augmenté que de 1,8 % au premier semestre.

Les activités de plusieurs mines d’or ont été entravées par des attaques terroristes, au point que trois sont actuellement inactives. En avril, la société russe Nordgold a invoqué la force majeure et annoncé qu’elle cessait d’exploiter sa mine de Taparko, dans la région du Centre-Nord. Les nouveaux projets, qui devaient être mis en service cette année, ont été retardés.

Inflation très élevée

Parallèlement, le Burkina Faso est aux prises avec une inflation très élevée cette année, l’indice harmonisé des prix à la consommation ayant augmenté de 16,5 % en glissement annuel, en septembre. La guerre en Ukraine a directement alimenté cette tendance par le canal des importations. Les facteurs intérieurs jouent également un rôle important, en particulier, la mauvaise récolte de céréales de 2021, qui restreint l’approvisionnement en denrées alimentaires. L’érosion conséquente du revenu réel des ménages freinera la croissance du secteur des services.

La capacité à assurer le service de la dette n’est pas remise en question

La structure de la dette publique du Burkina Faso reste un atout pour le crédit. À la fin de mars 2022, 47 % de la dette brute des administrations publiques était externe et largement due à des créanciers multilatéraux officiels. À la fin de l’année 2021, la dette extérieure commerciale du pays n’était que d’environ 100 millions de dollars, soit moins de 1 % de l’encours total de la dette. Cette structure explique pourquoi le coût de financement du Burkina Faso reste faible par rapport à ses pairs subsahariens. « Nous prévoyons que le gouvernement burkinabè consacrera environ 11 % de ses recettes au paiement des intérêts en 2022, alors que la part correspondante pour le Nigeria et le Ghana voisin devrait atteindre 24 % et 45 % respectivement », précise S&P.

L’évolution de la structure de la dette du Burkina Faso va mécaniquement augmenter la charge du service de la dette du pays. Le gouvernement prévoit de rembourser 720 milliards de francs CFA (1,1 milliard de dollars, 5,5 % du PIB de 2023) d’obligations domestiques arrivant à échéance en 2023. Jusqu’à présent, la volonté et la capacité du gouvernement à assurer le service de la dette n’ont pas été remises en question. Les deux coups d’État n’ont pas augmenté de façon notable la rotation du personnel au niveau administratif.

L’accès du Burkina Faso à la liquidité et les coûts de financement sur le marché obligataire régional sont également restés remarquablement stables en 2022, malgré les bouleversements institutionnels. Le Trésor burkinabè a lancé deux émissions d’obligataires in fine (cinq ans et sept ans) pour un total de 60 milliards de francs CFA, le 14 septembre, et prévoit de revenir sur le marché fin novembre.

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