L’Economiste du Faso : Rsf vient de publier son classement annuel et le classement du Burkina s’améliore, cela vous inspire quel commentaire ?
Boureima Ouédraogo, président de la société des éditeurs de la presse : Je dirais que le Burkina est revenu à son classement habituel depuis l’insurrection populaire et l’adoption des nouvelles lois sur la presse sous la Transition. L’année dernière, le classement du Burkina a sans doute été influencé par la relecture du Code pénal qui a intégré des dispositions restrictives des libertés de la presse, notamment, en matière de couverture des évènements liés au terrorisme.
L’on peut dire aussi que ce classement du Burkina résulte du fait qu’il n’y a pas beaucoup de pays qui ont fait de grands bonds en avant en 2020 ; parce que sur le terrain, excepté les efforts des médias et des professionnels du secteur d’assumer et porter haut la liberté de la presse, il n’y a pas vraiment des hauts faits au plan institutionnel ou politiques qui justifierait une avancée.
On a l’impression que tout va bien, mais les journalistes au quotidien se plaignent des conditions de travail dans les entreprises, n’est-ce pas un obstacle à la liberté d’expression ?
Vous avez raison. Le classement du Burkina est loin d’être le reflet de la situation socioéconomique dans les médias. Car, bien des entreprises de presse végètent dans la précarité et leurs travailleurs évoluent dans des conditions de vie et de travail pas toujours reluisantes. Je crois que plus que la situation économique des entreprises et des professionnels des médias, ce sont les conditions institutionnelles et légales d’exercice de la liberté de la presse ainsi que l’existence ou non d’atteintes à ces libertés qui sont mises en avant.
Le dossier Norbert Zongo a mobilisé la presse et la société civile pendant des années, pensez-vous que le dossier est en train de vivre ses derniers jours avec l’extradition possible de François Compaoré ?
Le dossier Norbert Zongo évolue assez bien, si l’on s’en tient aux informations fournies par les Avocats de la famille. Il faut dire qu’il a fallu l’insurrection populaire pour voir la réouverture du dossier qui était classé sans suite sous le régime de Blaise Compaoré. Depuis, le juge d’instruction semble avancer significativement et des personnes ont été inculpées et placées sous mandat de dépôt. François Compaoré fait partie des mis en cause et un mandat d’arrêt international a été lancé contre lui. Là encore, on peut se réjouir de l’évolution de la procédure d’extradition. Normalement, plus rien ne s’oppose juridiquement à cette extradition. On ne comprend d’ailleurs pas pourquoi ce n’est pas encore fait, puisqu’avec la décision du Conseil d’Etat en décembre dernier, les choses devraient s’accélérer. Mais en tous les cas, si l’on a pu attendre 22 longues années, ce ne sont pas encore quelques mois d’attente qui poseront problème. Nous espérons que tôt ou tard François Compaoré viendra répondre de ce qui lui est reproché dans ce dossier et surtout se défendre.o
Propos recueillis par AT