En 2016, l’économie subsaharienne a connu un net ralentissement, avec une croissance de l’ordre de 1,4%, qui n’avait pas été aussi faible depuis près de deux décennies (Ndlr 1994). L’analyse est du Fonds monétaire international (FMI) dans son dernier numéro de «Perspectives économiques régionales en Afrique subsaharienne».
Mame Astou Diouf Sow, la nouvelle représentante résidente du FMI, à cet effet, a convié le 6 janvier dernier des acteurs du monde économique et universitaire à un séminaire organisé dans le bureau de l’institution à Ouagadougou. Des explications fournies par Mme Diouf Sow, il ressort que ce ralentissement est plus aigu que celle de la croissance mondiale.
La principale raison à ce ralentissement est la baisse des prix du pétrole et de certaines matières premières: «Les pays exportateurs de pétrole ont subi de grands chocs avec des variations fortes, et les autres pays riches en ressources naturelles ont connu une détérioration de leur croissance, mais de moindre ampleur que les autres pays parce que le plus gros choc a été ressenti sur le pétrole», a déclaré la représentante résidente du FMI.
Selon les explications de Mme Diouf Sow, ce sont les pays exportateurs de pétrole qui tirent la croissance vers le bas. «Le ralentissement est principalement tiré vers le bas par les pays exportateurs de produits pétroliers qui, eux, voient une croissance négative. Alors qu’à l’autre extrême, les pays pauvres en ressources naturelles voient une croissance plus faible, mais toujours appréciable et proche de celle enregistrée entre 2010 et 2014», affirme-t-elle. Entre les deux, il y a les pays riches en ressources naturelles autres que le pétrole, pays dont le Burkina Faso fait partie. Eux connaissent aussi un large ralentissement de plus de 2 points de pourcentage, mais une croissance toujours positive.
Une autre raison explique le ralentissement de la croissance. Il s’agit du durcissement des conditions de financement. En effet, sur les marchés internationaux, les taux pour les financements étaient supérieurs à 7% pour beaucoup de pays de la région. Par conséquent, plusieurs pays y ont eu moins recours.
Certains pays ont préféré les émissions d’obligations sur le marché régional, par exemple.
Le rapport du FMI a invoqué une autre raison du ralentissement de la croissance, il s’agit de la riposte retardée au niveau de la politique macro-économique.
Le FMI a constaté que dans les pays d’Afrique subsaharienne, le solde budgétaire s’est détérioré, l’inflation s’est nettement accélérée et l’ajustement budgétaire a été limité.
Toutes ces raisons ont aussi eu comme conséquence la chute des réserves internationales, notamment au niveau de la CEMAC, avec un ratio de réserves avoisinant désormais les 3 mois d’exportations, et un bilan bancaire détérioré.
Une lueur d’espoir
Malgré tout, le continent s’est montré très résilient durant la dernière décennie. La croissance en moyenne s’établit à 5,3% et c’est un signe de robustesse. Ce qui fait dire au Fonds monétaire international que la croissance régionale va remonter. En 2016, «plusieurs pays ont réussi à atteindre un taux de croissance assez décent, dont le Burkina, avec une médiane régionale à 3,8%, et les sources de demandes sont robustes», a déclaré Mme Diouf Sow.
Cependant, les marges de manœuvre ont été érodées, le solde extérieur détérioré commence à s’améliorer, notamment grâce à la baisse des importations de pétrole dans certains pays, sans pour autant revenir à son point initial. Ce qui fait qu’il y a toujours un besoin de contenir les dépenses publiques pour consolider le solde budgétaire, afin de maitriser l’accumulation de la dette.
«Le ralentissement va être temporaire si les investissements sont protégés et certains acquis conservés. Mais le risque de ralentissement de la croissance existe toujours.
Entre autres, il faut s’assurer de maintenir la viabilité de la dette, sinon cela pourrait envoyer un signal négatif aux investisseurs, ce qui pourrait réduire la disponibilité des financements et détériorer leurs conditions, diminuant ainsi l’investissement, réduisant la capacité des pays à maintenir la croissance, d’où un cercle sans fin».
Pour revenir à la croissance, il faut donc s’assurer de conserver la marge de manœuvre.
En d’autres termes, le FMI recommande aux pays la maîtrise de l’accumulation de la dette-pays et la réduction des déficits, tout en mobilisant les recettes.
En attendant, l’institution financière internationale table sur le rebond de la croissance pour 2017.
NK
Catastrophes naturelles: risque pour la relance
L’Afrique subsaharienne a subi 1.603 catastrophes déclarées, soit environ 18% du total mondial, dominées par les épidémies (39%), les inondations (37%) et les sécheresses (8%).
Plusieurs caractéristiques structurelles exacerbent les vulnérabilités face aux catastrophes naturelles. Il s’agit entre autres de la faible capacité d’adaptation, de l’importance de la part de l’agriculture dans le PIB, ainsi que sa dépendance à la pluie, du niveau élevé de la pauvreté absolue et du développement limité des secteurs financiers.
Pour ce faire, le Fonds monétaire international met à la disposition des pays des mesures à prendre pour faire face aux catastrophes naturelles et changements climatiques.
Dans un premier temps, il faut réduire les risques en renforçant la résilience de l’agriculture, encourager la diversification économique, renforcer les infrastructures financières.
Ensuite il faut transférer les risques. Il s’agit ici d’élargir l’accès des ménages et des entreprises aux moyens de financement et aux assurances, fournir des assurances ayant un bon rapport coût-efficacité. La gestion des risques restants, par la mise en place de filets sociaux, et la riposte aux catastrophes constituent les dernières mesures à prendre au niveau des pays.
Quant au FMI, son rôle pour améliorer la résilience se fera grâce aux conseils prodigués, à sa Facilité de crédit rapide (FCR) et son Instrument de financement rapide (IFR), pour ne citer que ceux-ci.