La morosité économique nationale touche aussi l’Eglise catholique du Burkina. Dans toutes les paroisses et diocèses, les charges demeurent constantes, voire grandissantes, pendant que l’aide étrangère quant à elle se tarit de plus en plus. Comment faire donc pour subvenir à ses besoins? La bonne santé du prêtre et de la religieuse conditionne son épanouissement de pasteur dans l’exercice de son ministère.
Face à un tel enjeu, les diocèses du Burkina Faso doivent s’organiser pour leur autofinancement. Des réflexions sont donc en cours en vue de trouver des voies et moyens pour une stratégie convaincante et fructueuse, pour ne plus se contenter des collectes pour exécuter leur mission.
Ainsi, de Ouagadougou à Bobo-Dioulasso, en passant par Koudougou, les différentes paroisses appliquent leur trouvaille: «Dresser des boutiques modernes et autres immeubles à louer en bordures de leurs murs». Ces réalisations sont d’ailleurs prisées par les commerçants qui y trouvent leur bonheur, surtout qu’il est souvent difficile de trouver de la place en bordures de voie pour proposer ses marchandises.
Cette décision d’allier l’économie de collecte qui est pratiquée dans les diocèses à l’économie de marché, à travers de petites activités génératrices de revenus est bien accueillie au sein des fidèles qui connaissent la réalité de leurs paroisses.
Et comme l’explique ce prêtre, il faut diversifier les sources de revenus: «Nous ne pouvons plus nous contenter de la simple collecte des fonds comme les deniers du culte, quêtes diverses, casuels des sacrements, honoraires de messes et dons divers. Nos besoins nous imposent une économie de la prospection dénommée économie de marché. C’est pour nous le moyen le plus indiqué de transformer nos économies diocésaines basées sur des subventions et aides extérieures en une économie tendant à l’autosuffisance, pour soutenir les besoins de la mission».
Dans la même lancée, le successeur de Saint Pierre, le regretté Pape Jean Paul II, disait: «Il est urgent que les Eglises particulières d’Afrique se fixent pour objectif d’arriver au plus tôt à subvenir elles-mêmes à leurs besoins et assurer leur autosuffisance. Par conséquent, j’invite instamment les conférences épiscopales, les diocèses et toutes les communautés chrétiennes des Eglises du continent, chacun en ce qui le concerne, à faire diligence pour que cette autosuffisance devienne de plus en plus effective».
Les Eglises du Burkina, tout comme celles d’Afrique, ne peuvent plus continuer à compter sur la générosité des Eglises-sœurs d’Europe, des Etats-Unis d’Amérique, du Canada…, elles doivent se prendre en charge. Cette nouvelle trouvaille renforcera la fraternité entre les diocèses et permettra de bannir certaines frustrations, parfois relevées, entre prêtres de ville et prêtres de campagne. Et pourquoi ne pas se servir de l’exemple de l’Eglise catholique d’Italie qui possède une centrale nationale, avec des relais diocésains, pour le traitement équitable des prêtres d’après des analyses scientifiques et objectives ?
Le rôle des laïcs
Ce défi de l’autofinancement doit rappeler aux laïcs leur devoir de soutenir l’Eglise par des moyens adéquats, appropriés et suffisants. C’est pourquoi les premiers responsables de l’Eglise ne cessent de rappeler aux fidèles qu’ils doivent aussi briller par le témoignage de leur vie. Comme l’expliquait un évêque de Tanzanie: «Peu de choses ont été faites concernant une planification systématique en termes de renforcement de sa soutenabilité économique et financière.
Par conséquent, un grand nombre de programmes pastoraux de l’Eglise africaine dépend encore beaucoup des donateurs. La continuité de cette tendance perpétue les risques de sacrifier l’autonomie et la propriété dans les programmes, les projets et les structures, au détriment de l’Eglise et de ses bénéficiaires». Et cet évêque d’ajouter: «Afin de revendiquer pleinement son rôle prophétique, le paiement d’un salaire juste pour les travailleurs doit être vu comme un synonyme de justice et de rectitude. C’est pour cette raison que je demande à l’Eglise en Afrique de prendre au sérieux l’aspect de la viabilité financière».
Alexandre Le Grand ROUAMBA
Trois points essentiels
Pour l’autosuffisance de l’Eglise, il y a 3 points à satisfaire. Le premier concerne l’engagement des laïcs dans la planification, l’amélioration et la distribution des produits qui dérivent des entreprises économiques soutenables. Le deuxième point est un appel à la vigilance: la soutenabilité économique doit rester un moyen pour une fin, un instrument au service de l’évangélisation. Il faut abandonner la mentalité qui vise à rendre populaire cette pauvreté abjecte qui pourrait être une entrave à la vie éternelle.
Troisième point: une soutenabilité véritable des entreprises économiques des églises dépendra enfin de l’efficacité et de la bonne gouvernance selon la modalité du bon administrateur.
Le secret du succès réside dans le fait de mettre l’accent et de cultiver une spiritualité solide ainsi que d’authentiques valeurs humaines.