La Société de transformation des fruits et légumes (Stlf) finira-t-elle par être une arlésienne? A ce stade, cette éventualité n’est pas encore une fatalité. L’espoir de voir la société se mettre en marche existe encore.
Toutefois, les difficultés qui s’opposent à la bonne marche du projet restent nombreuses. Le volontarisme affiché par les autorités de la Transition, qui, à leur arrivée, ont pris des mesures pour faire démarrer cette usine, sise à Loumbila, n’a pas encore permis de venir à bout de ses différentes adversités.
En début juin dernier, les employés de la société (56 au total), excédés par leur «situation inconfortable», ont fini par exhiber leur malaise dans les médias. Ils réclament des impayés de salaires qui durent depuis 5 mois (depuis janvier 2015). Cette revendication du personnel s’ajoute à la léthargie dans laquelle se trouve le projet en ce moment.
Faute de moyens, financiers notamment, les activités de construction de l’usine sont à l’arrêt depuis juin 2013. C’est dans la perspective de la reprise qu’un audit industriel du chantier vient d’être bouclé par la partie indienne (le partenaire technique de l’Etat burkinabè sur le projet). Mais désormais, c’est le «nerf de la guerre» qui manque pour aller plus loin. A ce jour, la Sftl est une société malade. Il lui manque même les ressources élémentaires comme le carburant et autres consommables pour assurer les activités d’existence de son administration.
Pour finaliser les travaux de construction de l’usine et mettre en marche l’entreprise, un nouveau Dg, l’économiste Baya Toé, a été nommé le 14 janvier 2015. De nouvelles nominations sont aussi intervenues au sein de l’équipe du Conseil d’administration (CA). Mais au-delà des ressources humaines et du management, la Stfl fait face à des problèmes très profonds de trésorerie. Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’il y a eu mauvaise gestion des finances qui ont été allouées à la mise en œuvre du projet. Afin de déterminer l’ampleur des dégâts et situer les responsabilités, les limiers de l’Autorité supérieure de contrôle de l’Etat (Asce) sont sur place depuis près de trois semaines. Leur rapport est attendu pour connaître véritablement les actes qui ont compromis jusque-là la naissance effective de la Stfl et qui en sont les auteurs.
De l’avis de ceux qui connaissent bien le dossier, et contrairement aux apparences, ce n’est pas seulement dans les dernières gestions qu’il faut rechercher les fautes et les coupables. Le problème de la Stfl remonterait à son origine. «Le projet a été conçu avec des tares et des imperfections. Et ceux qui ont été chargés dès les premiers moments de le mettre en œuvre ont commencé à modifier son schéma sans avoir les moyens de la nouvelle dimension qu’on lui donnait. Par ailleurs, ils n’ont pas tenu l’Etat régulièrement informé de la situation réelle», confie une source suffisamment imprégnée du dossier.
«Les ressources financières débloquées par l’Etat au nom de la contrepartie nationale dans le projet ont été destinées à d’autres activités que les motifs réels pour lesquels elles étaient dégagées. C’est ainsi que les missions et voyages des responsables, le recrutement continu de personnel depuis 2009 jusqu’en 2014, l’entretien de ce personnel et d’autres activités non planifiées dans l’architecture initiale ont englouti les fonds destinés à la mise en œuvre du projet.
Pour une société qui ne produisait pas et qui ne vendait pas, certaines attitudes de la Direction générale étaient suicidaires», ajoute-t-il. S’il faut aujourd’hui reprocher à la gérance son imprévoyance dans la conduite du projet et éventuellement des détournements des moyens financiers, le blâme pourrait également s’étendre à l’équipe de Conseil d’administration.
De l’avis de ceux qui commentent la situation actuelle de la Stfl, les impairs de la Direction générale n’auraient pas été commis si le CA avait régulièrement cherché à connaître le travail physique qui se déroulait sur le chantier.
Apparemment la situation réelle de l’usine échappait aux membres du Conseil d’administration. Aujourd’hui, l’Etat se retrouve dans un embarras qu’il n’a pas vu venir ni prévu. D’où la difficulté.
Karim GADIAGA
Quelle alternative?
Comment sauver la Stfl de ses difficultés actuelles? On sait tout simplement qu’il lui faut de l’argent. Mais la question est de savoir d’où viendra cet argent. Nous n’avons pas obtenu le montant de ce besoin, mais il ne s’agit pas d’une petite somme. Ce qui fait qu’il va être très difficile pour l’Etat de le couvrir au nom de sa contrepartie financière.
Lorsque les premiers blocages avaient été constatés, l’idée de la privatisation complète de la société avait été évoquée sous l’ancien régime. Mais certaines voix avaient déconseillé cette «solution», tant que la construction de l’usine n’est pas achevée.
En rappel, la Stfl est une société d’économie mixte à participation majoritaire de l’Etat. Le décret de création de la Stfl fixe le montant et la répartition du capital de la société à 800 millions de F CFA (avec des actions à valeur nominale de dix mille francs), répartis à 62,5 % pour l’Etat burkinabè représenté par le Fonds burkinabè de développement économique et social (Fbdes) et à 37,5% pour Crystal Trend Limited, une société privée de droit burkinabè.
Parmi les pistes à explorer, on évoque la possibilité de voir si le partenaire indien, qui participe à la construction de l’usine, pourrait aider à résoudre les difficultés financières.
Télécoms : Les acteurs s’arment contre le by-pass
Contre le phénomène international de la fraude sur les appels téléphoniques, appelé by-pass, les acteurs locaux des télécommunications essaient de mettre leurs armes au point. A l’initiative de l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (Arcep), un séminaire sur la lutte contre le phénomène a été organisé à Ouagadougou du 15 au 18 juin 2015. Il a réuni une trentaine de participants venus de l’Arcep et des trois opérateurs locaux de téléphonie : Telecel, Onatel et Airtel.
Le by-pass est un procédé frauduleux qui consiste à dérouter les appels internationaux de leur circuit normal. Il occasionne ainsi des pertes financières énormes sur le chiffre d’affaires des opérateurs et donc la baisse des autres recettes découlant de l’activité normale du secteur de la téléphonie. C’est en effet des appels, qui auraient dû être facturés par les opérateurs, qui sont mis au bénéfice de pirates se servant d’internet pour leurs activités. Le phénomène est mondial et constitue un concurrent illégal à l’activité des télécoms. «Le by-pass fait peser sur notre économie de lourdes menaces et est à l’origine de pertes de revenus très concrètes pour nos opérateurs», a indiqué Nébila Yaro, le ministre en charge de l’Economie numérique, lors de l’ouverture du séminaire. Les individus qui s’adonnent à cette pratique sont de plus en plus nombreux. Récemment, des individus qui pirataient des appels téléphoniques sur le sol burkinabè ont été arrêtés par la gendarmerie. Preuve que la pratique est installée dans le pays.
Plus de 200 types de fraudes ont été récencés sous le vocable by-pass. Dans chaque pays, on tente de combattre cette activité de piratage.
Le séminaire de la semaine dernière marque le début de l’engagement des autorités chargées de la régulation du secteur des télécoms à faire barrage au phénomène. Les 4 jours de travaux ont permis aux acteurs de mettre à jour leurs connaissances sur le phénomène, connaître l’univers des pirates, les types de fraudes et les modes opératoires. Pour cela, ils ont bénéficié de l’expertise du marocain Mehdi Belakoul.
Selon le ministre Yaro, les solutions contre le by-pass existent, techniquement. «Il reste à les mettre en œuvre, à créer les conditions juridiques et financières pour venir à bout de ce phénomène», ajoute-t-il. o
KG