La situation de la grippe aviaire inquiète sérieusement les autorités. Le 14 avril dernier, le Gouvernement, avec à sa tête le ministère en charge des Ressources animales, a tenu une rencontre avec les Partenaires techniques et financiers (Ptf). L’objectif de cette rencontre était de mobiliser des fonds nécessaires pour la lutte contre la maladie. «Le Gouvernement fait appel à la communauté internationale et à l’ensemble de ses partenaires, pour combler le besoin de financement de plus de 2 milliards pour une lutte efficace contre la grippe aviaire», c’est en substance le message lancé par le ministre des Ressources animales, Jean-Paul Rouamba.
Le virus H5N1 de l’influenza aviaire hautement pathogène (Iahp) a été déclaré au Burkina depuis le 1er avril dernier par les autorités. Il est apparu dans 5 foyers au départ. A la date du 13 avril dernier, 19 foyers sur l’ensemble du territoire ont été identifiés. Pour lutter efficacement contre la maladie, indemniser les éleveurs et mener des actions de riposte, de communication et de sensibilisation, le Gouvernement a besoin de plus de 3 milliards (3.253.714.743 FCFA). Il a déjà mobilisé 390 millions et il lui reste un gap de financement de plus de 2 milliards (2.863.214.743 FCFA).
La Grippe aviaire se propage rapidement, d’où la crainte de certains partenaires comme l’Organisation mondiale de la santé (Oms) qui redoute une contamination de l’animal à l’homme. Déjà, plusieurs pays de la sous-région sont touchés par la maladie. Ce sont le Niger et le Nigeria. En ce qui concerne le Burkina Faso, plus de 200.000 volailles ont été décimées. L’effectif des volailles exposées dans les provinces à foyers Iahp est de l’ordre de 11,4 millions selon la direction des services vétérinaires.
60 millions de F CFA de perte
La situation est d’autant plus critique qu’elle a un fort impact sur l’économie du pays. Les pertes directes liées à la mortalité des 200.000 volailles sont estimées à 830 millions de F CFA. L’exportation étant suspendue, 30.000 volailles ont été refoulées aux frontières ivoiriennes, occasionnant du coup une perte de 60 millions. Quant aux pertes indirectes liées à la consommation des œufs, elles sont estimées à plus de 2,1 milliards. C’est donc au total plus de 3 milliards 50 millions de perte pour l’économie du pays, en seulement 2 semaines. Les populations craignent des risques de hausse des prix, mais aussi de pénurie. Il est de plus en plus difficile d’avoir de la volaille.
Les commerçants ont déjà la peur au ventre quant au bon fonctionnement de leurs activités. «Depuis la confirmation de la grippe aviaire, nous avons de plus en plus de mal à avoir des poulets. La consommation n’a pas baissé, car les consommateurs sont informés qu’il n’y a pas de risque à consommer de la volaille. Mais le hic, c’est que de nombreux foyers d’élevage ont été atteints et des milliers de têtes sont mortes. Il y a donc un manque sur le marché, ce qui contribue à la hausse des prix et au ralentissement de notre activité», déclare Alassane Ouédraogo, vendeur de volailles.
On estime aujourd’hui à 35 mille volailles, la consommation journalière à Ouagadougou selon les services vétérinaires. L’effectif de volailles est quant à lui de plus de 42 millions, tous types confondus. Malgré l’essor de l’aviculture moderne, cet effectif est composé entre 90 et 95% de volailles traditionnelles. L’élevage aviaire sert d’épargne en milieu rural et un gagne-pain pour plusieurs acteurs tels que les commerçants, les rabatteurs, les grilleurs et bien d’autres. La vente de la volaille et ses produits dérivés occupent donc une place majeure dans l’économie du pays. C’est pourquoi le Gouvernement et les Ptf tiennent à circonscrire et à éradiquer le virus.
Le problème qui va se poser cependant est le montant des indemnisations. Selon certains éleveurs, le Gouvernement souhaitait les indemniser sur la base de la grille indemnitaire de 2006, ce qu’ils auraient réfuté. Pour l’instant, une grille n’a pas encore été déterminée. Ce qui risquerait de compliquer la situation, comme le confirme Marcel Kafando, un éleveur: «Actuellement, nous ne savons pas à quelle hauteur nous serons indemnisés. Ce qui va compliquer la tâche car beaucoup risquent de ne pas déclarer la maladie dans leur ferme et tenteront de vendre les volailles d’une manière ou d’une autre».
Germaine BIRBA