
Kéré Emmanuel n’est plus à présenter dans la région du Nakambé (ex- Centre-Est). Il est le fondateur du Lycée privé Saint-Emmanuel de Cella, une Commune située dans la région du Nakambé dont le chef-lieu est Tenkodogo.
Résidant depuis 1993 au Gabon, il apporte beaucoup à l’économie de la région. Dans cette interview accordée à L’Economiste du Faso, il aborde ses débuts au Gabon, ses investissements au Burkina, ainsi que ses projets.
L’Economiste du Faso : Vous êtes un Burkinabè résidant au Gabon, comment vous est venue l’idée de vous installer dans ce pays ?
En 1992-1993, j’ai eu envie d’aller à l’aventure, afin de chercher de quoi me réaliser et soutenir ma famille. C’est ce qui m’a poussé à aller au Gabon. Pour y arriver, je suis passé par le Nigeria et le Cameroun. La traversée a été difficile mais Dieu merci, j’ai réussi à rentrer au Gabon. Aujourd’hui, je n’encourage pas mes frères et sœurs de tenter l’aventure de cette façon. Il faut suivre la voie normale.
Comment s’est passée votre intégration au Gabon ?
Le début a été difficile et c’est normal. Par la suite, j’ai pu m’intégrer progressivement. Je peux dire que tout va bien aujourd’hui pour moi là-bas. Si tu n’as pas de problème avec la population ou les autorités, tu respectes les lois et que tu arrives à mener tes activités, je crois que je peux dire que ça va bien pour moi.
Comment sont organisés les Burkinabè au Gabon ?
Il existe des organisations des ressortissants burkinabè au Gabon et le Consulat du Burkina Faso à Libreville. Dans le cadre de ces activités, nous faisons face aux difficultés que rencontrent les Burkinabè qui vivent dans ce pays.
Quelles sont les activités que vous menez au Gabon ?
Je suis dans l’entrepreneuriat et les affaires. Je vends les matériaux de construction. Je fais également de la location d’engins lourds et le transport des agrégats.
Le Gabon a changé de président avec l’arrivée du Général Brice Oligui Nguema au pouvoir, comment est actuellement le climat des affaires au Gabon, notamment, pour les étrangers?
Avant de répondre à votre question, je voudrais relever que le Président Brice Oligui Nguema est un président bâtisseur. Depuis son élection, le pays est en chantier. Si vous arrivez au Gabon aujourd’hui, vous verrez que les routes sont en construction. Grâce au Président Nguema, on a eu des routes en béton. Au regard de ce qui se fait, je peux dire que tout se passe très bien avec le nouveau régime. C’est aussi le cas pour les étrangers qui sont au Gabon. Ils n’ont pas de problème majeur. Ils arrivent toujours à mener leurs activités sans difficultés, pourvu qu’ils respectent les lois en vigueur au Gabon.
Au Burkina Faso, on a adopté, depuis 2022, la Révolution populaire progressiste (RPP) comme mode de gouvernance, comment appréciez-vous ce qui se fait actuellement dans la lutte contre le terrorisme et pour le développement du Burkina Faso ?
Avec l’arrivée au pouvoir du Capitaine Ibrahim Traoré, sauf pour celui qui refuse de l’admettre, on sait tous que beaucoup de choses sont faites. Et c’est visible. Malgré le contexte sécuritaire difficile, marqué notamment, par le terrorisme, le pays est en construction. Des initiatives comme Faso Mebo, l’offensive agricole, l’intensification de la guerre sont actuellement en cours et ont l’adhésion de la population burkinabè. Je pense qu’il faut saluer, encourager et soutenir ces initiatives.
Vous avez tantôt parlé du projet Faso Mebo, qui a aussi été lancé le lundi 21 juillet 2025, comment appréciez-vous ce projet ?
L’initiative est très louable. On a bien dit Faso Mebo, ceux qui comprennent savent qu’il s’agit de la patrie. J’étais très content et fier de prendre part à la cérémonie. Normalement, chacun doit pouvoir apporter sa contribution pour la réussite de ce projet. Pour ma part, j’ai pu modestement offrir 20 tonnes de ciment à Faso Mebo, lors du lancement du projet, à Tenkodogo. Je profite lancer un appel à tous ceux qui le peuvent de penser à Faso Mebo et de contribuer, que ce soit en nature ou en espèces, pour la construction du pays.
Vous avez aussi investi au Burkina Faso, pouvez-vous nous en parler ?
Je ne parlerai pas d’investissement mais d’une contribution pour accompagner le développement scolaire au Burkina Faso. En effet, j’ai construit le Lycée privé Saint Emmanuel de Cella, afin d’offrir la possibilité aux enfants d’avoir accès à l’éducation, à une éducation de qualité. Personnellement, je ne suis pas allé loin à l’école, parce qu’il n’y avait pas assez d’écoles à notre temps. Et je veux contribuer à lutter contre cela au Burkina Faso et dans la région du Nakambé.
Vous êtes le promoteur du Lycée privé Saint Emmanuel de Cella à Tenkodogo, présentez-nous cet établissement…
L’initiative du lycée Saint Emmanuel est née d’une volonté de remédier aux difficultés d’accès à l’éducation dans la région du Nakambé, précisément dans le village de Cella.
L’établissement est reconnu par le ministère de l’Education nationale du
Burkina Faso. Il figure dans la liste officielle des établissements post-primaires et secondaires privés reconnus dans la région du Nakambé. Le Lycée privé Saint Emmanuel de Cella a ouvert ses portes au cours de l’année scolaire 2013-2014. En 2014, l’établissement comptait déjà 453 élèves, mais avec la crise sécuritaire, il compte de nos jours 396 élèves.
En termes de résultats scolaires, qu’est-ce qu’on peut retenir pour l’année 2024-2025 qui vient de s’achever ?
Pour l’année scolaire 2024-2025, l’établissement a réalisé des résultats satisfaisants. Au BEPC, nous avons eu 54 admis sur 70 candidats, soit un taux de succès de 77,14℅. Pour le BAC A, le lycée a enregistré un taux de succès de 100℅, avec 8 admis sur 8 candidats présentés. Au BAC D, nous avons eu 29 admis sur 36 candidats, soit un taux de 80,55℅.
Ces résultats sont très satisfaisants. Et en tant que promoteur, je suis fier du travail des enseignants et des encadreurs. Il faut noter qu’en 2022, Kéré Relwendé Romaric a obtenu la meilleure moyenne, 17,52/20, au Baccalauréat série A4. Ce sont des résultats qui honorent l’établissement et nous encouragent dans ce que nous faisons.
Quelles sont les difficultés auxquelles vous êtes actuellement confronté dans l’exécution de vos activités ?
Comme toute initiative, nous rencontrons aussi des difficultés. Au Lycée, nous avons principalement besoin d’électricité. Il y a le système internat et des élèves dorment dans l’établissement. Jusqu’à présent, le Lycée est alimenté par un groupe électrogène et des plaques solaires dont l’installation nous a coûté environ 40 millions FCFA. Le gasoil pour le groupe électrogène nous revient également très cher, mais nous sommes obligés de le faire pour le bien des enfants. En plus de cela, je paie aussi des frais de scolarité de certains enfants démunis. Ils sont très souvent brillants en classe mais leurs parents manquent de moyens financiers pour payer leur scolarité. Je le fais également parce que je suis convaincu que le Burkina a besoin de l’intelligence de ces enfants pour poursuivre son œuvre de développement. Ce sont là les principales difficultés auxquelles nous sommes confrontés.
Avez-vous d’autres investissements en vue au Burkina Faso ?
Les projets ne manquent pas. J’ai déjà fini la construction d’une station d’essence à Tenkodogo et j’attends les essais de pompage et la mise en service. J’ai également en projet de créer une société de transport qui va faire Ouagadougou-Lomé-Cotonou. Pour cela, j’ai fait 4 bus pour le début et la société va bientôt démarrer ses activités. J’envisage aussi, les démarches sont déjà en cours, d’ouvrir une Radio des écoles à Tenkodogo. La radio sera un outil pédagogique pour les enseignants et les élèves de la localité. On va y dispenser des cours, organiser des émissions interactives sur certains cours et enseigner également le retour aux sources comme le préconisent les autorités actuellement. Ce sont des modestes contributions pour lutter contre le chômage et participer à la création de richesses pour le pays.
Je voudrais remercier et encourager les autorités qui abattent un travail formidable au profit des Burkinabè. Je vous remercie aussi, L’Economiste du Faso, qui s’est intéressé à nous et à nos activités.o
Propos recueillis par Issa Sawadogo (Collaborateur)