• Elle propose gîte et couvert avant même d’être sollicitée
• Le contenu de son frigo sert de diner à ses hôtes
• Sa nuit se passe au milieu des casseroles pour offrir le petit déjeuner
Si la Côte d’Ivoire est un « pays de l’hospitalité », Nahoua Koné en est l’incarnation parfaite. Cette assistante comptable de la Fonction publique de Bouaké s’est pliée à quatre pour recevoir des hôtes qui pourtant, ne lui étaient pas destinés. « J’aime étranger oh ! Dès que j’ai vu les gens, j’étais contente », se justifie-t-elle. Cette joie de l’étranger a même amené cette dame de 44 ans à sortir le grand jeu . Et pour cause !
Un convoi de cars pleins de Burkinabè a quitté Ouagadougou le dimanche 14 janvier 2024, pour suivre le match Burkina Faso-Mauritanie, prévu 48h plus tard en terre ivoirienne. La destination finale de ce convoi était le collège privé Tussuany, dans le quartier municipal de Bouaké. Ce collège est à un jet de pierre de la cour où vivent Nahoua, ses deux cousines et ses trois nièces. Sa maisonnée, comme tout le voisinage, est sorti observer près de mille (1.000) personnes descendant de la dizaine de cars qui constituait la délégation du convoi, en début de soirée du lundi 15 janvier. La première sollicitation est vite venue : une bouilloire pleine d’eau, les toilettes et un tapis pour la prière. Très rapidement, elle met en branle ses règles de l’hospitalité. Quatre jeunes filles sont les premières et heureuses bénéficiaires. Pendant que le gros de la délégation cherchait encore un coin pour dormir, elles, profitaient d’un bain chaud et de la bonne nourriture auprès de Nahoua. Des hommes s’invitent aussi dans la cour. Le contenu du frigo est vidé. Mais le problème n’est pas résolu. La bonne dame se déleste alors du haricot qui devait lui servir de diner pour satisfaire ses visiteurs imprévus. Et elle ne s’arrête pas là.
« Quand j’ai vu que les gens cherchaient à manger la nuit, je me suis dit que le lendemain matin, le besoin sera plus grand. Avec le peu d’argent que j’avais, je suis allé chercher un sac de riz à la boutique. J’ai réveillé une dame à 22h pour prendre du poisson, mais comme elle n’en avait plus beaucoup, j’ai donc pris trois plaquettes d’œufs ajouter. J’ai utilisé les condiments de ma maison et toute la nuit, je l’ai passé dans la cuisine. A 7h, le repas était prêt et les gens ont pu manger avant de partir au stade». C’est ainsi qu’elle a veillé pour résoudre une équation : trouver à manger pour ces Burkinabè venus supporter leur équipe nationale. Le plat est servi à 500 FCFA mais en réalité, cette somme est juste une contribution pour remplacer la somme investie. « Quand quelqu’un vient, je le sers, et s’il n’est pas rassasié, je le sers encore sans prendre de l’argent », affirme-t-elle. Plus de 150 plats ont été servis. La quantité et la qualité du repas séduisent les bénéficiaires. Face à ce met, le ¼ de pain + un thé à 1.000 FCFA dans le kiosque d’à côté ne font pas le match. Ceux qui gagnent se frottent les mains et ceux qui sont venus en retard essuient leurs larmes.
Durant la journée du mardi 16 janvier, la cour de Mahoua ne désemplit pas. Les toilettes sont constamment utilisées. Les prises électriques sont sollicitées pour recharger les portables. Ceux qui ont prévu de repartir après le match font des commandes de bananes plantain, d’atiéké…. Dans la soirée, la file reste longue pour la douche. Certains, venus traduire leurs reconnaissances à leur bienfaitrice, ont voulu se rassurer de sa disponibilité pour la suite du séjour. Mais celle-ci est catégorique : « C’est bon oh ! Comme les autres sont au courant de vous, ils vont vous mettre dans leur programme maintenant. Moi, je vais au travail ».Tiendra-t-elle le coup? Pas si sûr. Du moins, c’est la foi de ceux qui ont bénéficié de ses largesses. Après tout, ne sont-ils pas sur la <<terre de l’espérance>>?o
Moumouni SIMPORÉ à Bouaké