• Inflation, manque d’eau, maladies animales
• Les principaux chocs enregistrés
• Aide financière ou alimentaire, principal besoin
L’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), en collaboration avec le ministère burkinabè chargé de l’agriculture, a mené entre le 17 août et le 26 septembre 2022, une enquête auprès des ménages d’agropasteurs et de pasteurs. L’objectif étant de surveiller l’évolution des moyens d’existence agricoles et la sécurité alimentaire au Burkina Faso. Les données ont été collectées dans 26 provinces des sept régions suivantes : Boucle du Mouhoun, Cascades, Centre-Est, Centre-Nord, Est, Nord et Sahel. Dans chaque province, entre 180 et 200 ménages ont été échantillonnés, pour un total de 5.196 ménages interrogés. Les résultats et recommandations ont ensuite été compilés et publiés le 29 novembre 2022. L’Economiste du Faso vous propose les principaux chocs auxquels sont confrontés ces ménages, ainsi que les recommandations de ce bulletin.
Hausse des prix des aliments
Principal choc au cours des trois mois précédant l’enquête (pourcentage de ménages interrogés)
Parmi les ménages interrogés, 70% ont subi au moins un choc au cours des trois mois précédant l’enquête. Le choc le plus fréquemment cité est la maladie ou la mort de membres du ménage (46%), suivi de la hausse des prix des aliments (31%), et des carburants (14 %). La violence, l’insécurité et les conflits ont concerné 10% des ménages ; ce taux atteint 48% dans la province du Sahel.
Peu d’accès aux engrais et manque d’eau d’irrigation
Difficultés dans la production de cultures (pourcentage de cultivateurs interrogés)
Au cours des mois de juillet et août 2022, le pays a enregistré un taux d’inflation de 18 pour cent, les prix des céréales augmentant de 68 pour cent par rapport à l’année précédente et de 81 pour cent par rapport à la moyenne quinquennale. Les attaques récurrentes des groupes armés dans le Sahel et le Centre-Nord, régions où l’on enregistre le taux le plus élevé d’insécurité alimentaire, entraînent des déplacements massifs de populations.
Parmi les ménages interrogés, 93 pour cent sont impliqués dans la production végétale. Ils sont 72% à avoir rapporté des difficultés de production, notamment, l’accès à l’engrais (59%), suivi par le manque d’eau (39%). Les autres difficultés signalées concernent les maladies des plantes (21%) – en particulier, dans l’Est (37%), les Cascades et le Sahel (27%) –, l’accès aux insecticides (20 %), les dommages aux cultures pendant la période de croissance (19%) – surtout dans le Sahel (53%) – et l’accès à des semences de qualité (16%) (Figure 4).
22% des producteurs de cultures ont enregistré des difficultés de commercialisation au cours des trois mois précédant l’enquête, notamment, en raison de la diminution des achats de la part des commerçants habituels ou des clients locaux (60%), de la baisse des prix de vente (53%), des difficultés d’accès aux marchés (28%), ainsi que de la hausse des coûts de transport (20%). L’insécurité a poussé les ménages à vendre leur production à des prix inférieurs, contribuant à réduire le pouvoir d’achat, en particulier, dans les régions à fort défi sécuritaire (Sahel, Centre-Nord, Est, Nord), et entraînant ainsi une baisse de la demande. Par ailleurs, l’importation de produits céréaliers de pays voisins a aussi eu pour conséquence une baisse des prix de vente.
63% des éleveurs font face aux maladies animales
80% des ménages interrogés pratiquent l’élevage. Parmi eux, 70% ont rencontré des difficultés dans leur activité au cours des trois mois précédant l’enquête, notamment, la maladie ou la mort d’animaux (63%) – en particulier, dans le Centre-Est (73%), la Boucle du Mouhoun (73%), le Nord (72%) et les Cascades (68%) –, l’accès aux aliments pour bétail (44 %), aux pâturages (34 %), ainsi qu’aux intrants et aux services vétérinaires (respectivement 27 et 26 %) (Figure 5).
Les vols d’animaux atteignent 36 % dans le Sahel et 21 % dans le Nord, alors qu’ils sont globalement rapportés par 10 % de la totalité des ménages interrogés.
L’insécurité a entraîné une réduction de l’espace pastoral, également concerné par la reconversion des terres.
Les éleveurs sont 35 % à rapporter des difficultés de commercialisation, en raison notamment, de la baisse de la demande des commerçants habituels ou des clients locaux (50 %), de la baisse des prix de vente (48 %), ainsi que des difficultés d’accès aux marchés (32 %). Ces dernières sont, notamment, liées à l’insécurité qui a limité les déplacements et donc la vente et l’achat de bétail. En outre, les ménages bradent souvent les animaux, en raison des difficultés rencontrées pour les nourrir et par crainte des vols.
Insécurité alimentaire modérée et sévère récente des ménages
D’après l’échelle d’expérience de l’insécurité alimentaire (échelle FIES), 38 % des ménages ont connu une insécurité alimentaire récente modérée ou grave, l’insécurité grave concernant 9 % d’entre eux.
Les régions du Sahel et de l’Est présentent les niveaux les plus élevés d’insécurité alimentaire récente, avec respectivement 69 et 64 % des ménages interrogés en situation d’insécurité alimentaire modérée ou grave (Figure 6).
L’analyse de l’échelle de la faim dans les ménages établit que 78 % des ménages ont expérimenté peu ou pas de faim, 20 % une faim modérée et 2 % une faim sévère dans la semaine précédant l’enquête. D’après le score de diversité alimentaire des ménages, 23 % des ménages interrogés présentaient une diversité élevée, 40 pour cent une diversité moyenne et 37 % une diversité alimentaire faible.
Les stratégies d’adaptation ont principalement été orientées vers des stratégies de crise (35 %), suivies de stratégies d’urgence (26 %) et de stress (16 %). La mauvaise précédente campagne agricole, associée à l’insécurité et à l’augmentation des prix des denrées alimentaires, explique ces chiffres.
Aide financière ou alimentaire, principal besoin
Un besoin d’aide à la production agropastorale au cours des six mois suivant l’entretien a été rapporté par 96 % des répondants. La plupart des ménages (61 %) ont déclaré avoir besoin d’une assistance en espèces ou en nourriture, suivie des différents intrants nécessaires à la production végétale et d’un soutien à la pratique de l’élevage (Figure 7).o
Synthèse de NK
Encadré
Trois recommandations
Cultures
Renforcer la résilience des ménages aux invasions de ravageurs, notamment, la chenille légionnaire d’automne, à travers la promotion et la distribution de biopesticides homologués. Soutenir la production et l’utilisation d’engrais organiques. Renforcer les capacités de la Centrale d’approvisionnement en intrants et matériels agricoles (CAIMA), afin d’améliorer la disponibilité d’intrants agricoles de qualité, en particulier, les engrais, et d’en favoriser l’accès. Soutenir la production maraîchère, notamment, en développant l’irrigation à petite échelle et en réhabilitant les retenues d’eau existantes et les sites maraîchers dans les zones à fort potentiel (disponibilité d’eau et de terres, capacités productives, sécurité).
Élevage
Dans les régions où la situation sécuritaire le permet, réhabiliter et mettre en valeur les zones de pâturage (plantation d’espèces fourragères, création de points d’eau). Renforcer les capacités de production à grande échelle et de conservation de fourrage des ménages, afin de limiter la transhumance de masse. Soutenir les ménages vulnérables dans la reconstruction de leur cheptel. Développer l’offre de services vétérinaires et en faciliter l’accès. Développer l’élevage à cycle court (volailles, lapins, etc.) au profit des ménages vulnérables dans les sept régions ciblées par l’enquête. Dans les zones présentant un risque élevé de décapitalisation des ménages pastoraux et agropastoraux (Sahel, Est, Centre-Nord, Nord et Boucle du Mouhoun), promouvoir le déstockage stratégique d’une partie du cheptel, afin également d’augmenter l’offre de viande (protéines animales) sur les marchés.
Sécurité alimentaire
Augmenter les transferts monétaires inconditionnels et les distributions de denrées alimentaires, en priorité dans les zones dont l’accès est difficile, en raison de l’insécurité et au profit des ménages les plus vulnérables ayant perdu leurs moyens de production.o