• Confrontée à la cherté de l’électricité
• Et la chute du tourisme au Burkina
• La qualification des acteurs reste problématique
De nos jours, les entreprises de pressing sont présentes dans tous les quartiers de la ville de Ouagadougou. Jadis localisés dans le centre-ville et dans les quartiers résidentiels, le boom du secteur fait qu’on assiste à une multiplication soudaine des pressings. Ce secteur d’économie semble dynamique et prometteur, au regard des opportunités (rentabilité financière, absorption du taux du chômage et recettes fiscales pour l’Etat) qu’il présente.
Son rôle n’est donc pas négligeable, tant sa portée sociale et économique est énorme. Les services des pressings sont sollicités quotidiennement. Pourtant, cette activité économique, de même que les professionnels, sont négligés et parfois mal vus. Pour découvrir la réalité économique, L’Economiste du Faso a fait un zoom sur ce secteur d’activité.
Il est 16h, ce 28 septembre 2022 et nous sommes devant « Alim’s pressing Yilmdé ». Gérée par Congo Alima, cette boutique située dans le quartier Wentenga, propose plusieurs services de nettoyage, de détachage, de blanchisserie, de repassage, d’amidonnage et d’entretien des habits.
Pour la patronne des lieux, l’activité est rentable. La preuve, elle emploie 4 personnes. Il faut avoir l’amour du métier et surtout aimer la propreté, confie-t-elle à notre micro.
Rentable, Adolph Kaboré le confirme. Ce prestataire de service de pressing s’occupe, lui aussi,d’un pressing. Même s’il faut relativiser. Le plus gros des salaires et avantages revient aux patrons. Et ce n’est pas tout, il y a aussi les périodes mortes où les clients ne se bousculent pas.
« Le pressing marche bien pendant la chaleur, car les gens changent régulièrement les vêtements », précise, pour sa part, Ismaël Sawadogo, un professionnel du domaine depuis 2005, patron de IS pressing situé à Wayalghin.
En plus de la période de canicule, la meilleure saison pour faire du chiffre est celle qui précède les fêtes de fin d’année. « Le mois de décembre est la période durant laquelle la moisson est bonne du fait que les gens envoient leurs rideaux, leurs tapis et bien d’autres pièces pour que tout paraisse beau à l’occasion des fêtes », soutient, pour sa part, M Kaboré.
Une moyenne de 800.000 FCFA/mois
Le patron de IS Pressing a accepté de nous révéler son chiffre d’affaires. Lui, qui est propriétaire de plusieurs maisons de pressing dans la ville de Ouagadougou, affirme faire autour de 800.000 FCFA par mois. « Cela dépend des périodes », relativise-t-il. Et d’ajouter que certains de ses confrères du domaine font des chiffres bien plus reluisants que le sien.
Les prix des prestations varient en fonction des pressings. Par exemple, le nettoyage de la veste est compris entre 500 FCFA et plus de 5.000 FCFA, l’entretien de la robe de marié coûte 25.000F à Alim’s Presssing yilmdé. Les niveaux des salaires ne sont pas très élevés, à IS services, l’employé à 40.000 FCFA, pour commencer sans la ration quotidienne qui est de 500 FCFA.
Les chiffres d’affaires de ces entreprises ne sont pas toujours connus du fait de la faiblesse structurelle et organisationnelle de cette activité économique. Mais, à regarder les prix des prestations, le nombre de pressings et la clientèle abondante, l’on peut dire que le secteur génère des ressources économiques insoupçonnées. S’il est admis par les acteurs que le secteur est économiquement porteur et a de beaux jours devant lui, il demeure que quelques difficultés affectent son épanouissement.
Electricité : 150.000 FCFA à payer par mois
Chaque activité est confrontée à certains défis qui se posent en difficultés plus ou moins surmontables. Pour M. Sawadogo, le coût de l’électricité est insupportable et il ambitionne de basculer vers le solaire. Les machines à laver, les machines à sécher et les fers électriques consomment trop d’énergie, et vu que le kWh est cher, on paie beaucoup, a-t-il renchéri. La facture d’électricité de « Larpanace pressing » situé sur l’avenue Houari Boumediene s’élève à plus de 150.000 FCFA par mois. En période chaude, les multiples coupures de l’électricité affectent le travail, jouent sur les prévisions et bouleversent les relations avec les clients, soutient monsieur Kaboré Adolph, prestataire des services de pressing.
Le tenancier de « Larpanace pressing » qui est professionnel du pressing depuis maintenant trente ans, estime que les impôts sont souvent insupportables. « Lorsque les gens des impôts viennent et constatent que la maison est remplie d’habits, automatiquement pour eux, tu as l’argent. Pour cela, ils envoient des factures alléchantes. Pourtant, certains habits sont là depuis des années », déclare ce dernier.
Autre défi relevé par ses professionnels du métier, la qualification des acteurs. Pour le patron de IS Pressing, le secteur n’étant pas encore développé, il n’y a pas de fiches et de métier du Pressing. De plus, pour l’utilisation de certaines machines de pointe, les patrons de pressing envoient leurs employés en Côte d’Ivoire, au Sénégal et même en France pour se faire former.
En plus de la formation, il y a le prix élevé des matériels utilisés. Selon M. Sawadogo, la table de repassage simple coûte 300.000 FCFA, la table de repassage des vestes à 600.000 FCFA, la machine de nettoyage à sec entre 3 à 20 millions, le fer à repasser entre 75.000 et plus de 150.000 FCFA et les produits de lessiviels qui coûtent aussi. D’autres matériels entrent dans le cadre du travail de pressing. Un investissement qui n’est pas accessible à tout le monde. Sans oublier les prix des loyers qui grimpent. Occasion pour IS Pressing d’appeler l’Etat à règlementer les prix des baux.
Le terrorisme a aussi affecté ce secteur, à en croire M. Sawadogo. Avant l’avènement du terrorisme, nombre de personnes visitaient le Burkina Faso, les hôtels nous offraient beaucoup de marché. Aujourd’hui, ce n’est plus le cas, a déclaré ce monsieur.
Les entreprises de pressing ne vivent pas la situation d’une même manière. Certaines résistent mais d’autres disparaissent. Elles sont pourvoyeuses d’emplois et de recettes pour l’État. Confrontées à plusieurs difficultés, l’État doit voler à leur secours pour la préservation des emplois.
La règlementation du prix des baux professionnels et l’allègement fiscal seraient de solutions durables pour la survie de ces entreprises. Ce secteur d’activité a de beaux jours devant lui, en ce sens que la demande ne fait que croître. Cette demande est liée au niveau de vie des citoyens qui s’améliore au fil des années.1
TA
Encadré
Un frein à l’entrepreneuriat
La cherté et les coupures d’électricité portent un coup dur à l’exploitation des pressings, notamment, sur les plus petits. Cette situation alliée à la cherté des matériels de pressing ne favorise pas l’entrepreneuriat des jeunes dans le secteur, car l’investissement nécessite beaucoup d’argent pour créer et pour pouvoir faire face au début difficile. Un appui de l’Etat à l’endroit des jeunes est nécessaire pour la création d’emploi.