Améliorer les recettes des Impôts, à travers la gestion du foncier. C’est l’objectif qui a sous-tendu à la création d’un cadastre fiscal, logé au sein de la Direction générale des Impôts (DGI). Selon les premiers responsables des Impôts, ce cadastre va mettre fin à la multiplicité des acteurs institutionnels intervenant dans le foncier, et à la faiblesse des textes règlementaires. Mieux, il va parer aux tensions liées au fait que les outils modernes de gestion foncière (cadastre et Système information du foncier (SIF) prévus par la loi, qui devraient faciliter la dématérialisation des procédures de gestion domaniale, foncière et cadastrale, sont peu ou pas fonctionnels. Une situation qui est à l’origine du traitement des dossiers fonciers manuellement.
C’est dans cette perspective que le département du ministère de l’Economie s’est doté d’une administration du foncier moderne à la hauteur des ambitions de la politique domaniale du Faso. Ceci, pour relever le niveau du recouvrement des recettes liées au foncier qui reste en deçà des attentes par rapport au potentiel existant. Mais aussi, sécuriser les titres d’occupation des terres et des autres actes fonciers, à travers la numérisation des processus fonciers.
Des défis et pas des moindres freinent ces grands objectifs. La plus cruciale est la question des ressources humaines.
Selon le Directeur du cadastre, Noufou Ouédraogo, le cadastre, eu égard à son importance, n’a pas assez de ressources humaines pour atteindre effectivement ses objectifs fixés.
« Actuellement, à la Direction, nous sommes 17 agents. Mais dans l’ensemble du pays, il n’y a pas plus de 60 personnes qui gèrent le cadastre. Ce problème empêche la bonne exécution du travail. Normalement, nous devrions être représentés partout sur tout le territoire », déclarait-il, lors d’un entretien qu’il a accordé à L’Economiste du Faso, le 20 juillet dernier. Et comme si cela ne suffisait pas, sur ces 60 agents, le profil type d’inspecteur du cadastre n’est pas le plus représentatif. « Seulement 5 d’entre nous ont une formation d’inspecteur du cadastre ».
Alors, pourquoi ne pas recruter ?
Selon le Directeur du cadastre, la raison est simple. Le métier du cadastre n’est pas inscrit sur les répertoires des interministériels des métiers de l’Etat (RIME). Concrètement, cela signifie qu’à moins d’inclure ce métier au niveau du RIME, il n’y a aucune possibilité pour l’Etat de lancer le recrutement en concours directs ou professionnels d’inspecteurs du cadastre.
Noufou Ouédraogo est, malgré tout, confiant. D’une part, un plaidoyer a été entamé et « on nous a assuré que lors de la relecture prochaine des RIME, le métier du cadastre y sera inscrit ». En témoigne la Charte de la Transition où la gestion foncière pour élargir l’assiette fiscale est mentionnée. De plus, en attendant que l’Etat s’y lance, l’Ecole nationale des régies financières a décidé, depuis l’année passée, d’ouvrir une filière cadastre. Pour la première promotion en cours, près de 100 personnes du privé s’y sont inscrites.
« C’était vraiment un de nos vœux, afin qu’au Burkina, on prenne en compte la question cadastrale pour avoir des ressources humaines. Notre plaidoyer continue, même si actuellement, c’est l’ENAREF qui a réussi à ouvrir cette filière. Et ce sont des privés qui s’y intéressent, on se dit que l’Etat va répondre à l’appel. En tout cas, cette filière est la bienvenue, elle vient combler un vide qui est l’inexistence des cadres spécifiquement cadastres », affirme Noufou Ouédraogo.
En attendant donc la relecture des RIME, le Directeur du cadastre espère des agents prêts à l’emploi dans 2 ou 3 ans. En attendant, il insiste sur l’importance de ce métier d’avenir. « Vu le boom du foncier, je peux dire que c’est un métier d’avenir et qui marche bien, tout le monde s’y intéresse, la demande est forte », conclut-il.o
NK
Encadré
Le cadastre expliqué par son premier responsable
Le cadastre c’est l’inventaire donné de toutes les parcelles existantes, c’est l’ensemble de la propriété foncière d’une Commune, qu’elle soit lotie normalement, non lotie et non la propriété coutumière. Il recense chaque parcelle, il identifie le propriétaire de la parcelle et il évalue la valeur de la parcelle. C’est la raison pour laquelle le cadastre est aux Impôts. Nous collons un propriétaire à une parcelle et ainsi qu’une valeur, ce qui permet au fisc d’avoir une base de données et connaitre ses contribuables, puisqu’il y a des impôts directement liés à cela et il y a aussi des recoupements fiscaux liés aux parcelles. Par exemple, pour connaitre le patrimoine financier, s’il est bien évalué, nous aussi aux Impôts, on peut mieux contrôler les taxes à attribuer.
L’agent du cadastre a 5 missions : une mission technique pour faire le plan cadastral, une mission foncière qui lui permet d’identifier les parcelles foncières et d’aider à la gestion des titres fonciers, une mission fiscale, qui lui permet d’évaluer et de prendre l’impôt, une mission juridique qui lui permet de faire les bornages et les contenances des terres et une mission documentaire qui lui permet de donner des documents aux citoyens qui en ont besoin, comme un extrait cadastral.
De ce fait, le cadastre est un outil très important, tant pour la fiscalité que pour la sécurité. Avoir une cartographie du cadastre d’une zone réduit les problèmes des conflits fonciers et cela fait une fiscalité transparente que l’on peut projeter.
« Je crois qu’avec la communication, tous nos acteurs vont comprendre que nos Etats ont besoin de ces outils. Le fait d’avoir un cadastre de toute la propriété foncière évite que certaines personnes gardent par-devers elles des parcelles, en attendant que les prix grimpent, afin de revendre et spéculer sur cela », a déclaré Noufou Ouédraogo.