L’incertitude liée au conflit en Ukraine fait exploser les cours de céréales. Selon les informations fournies par Boursorama, le 9 mars 2022, plusieurs facteurs soutiennent des prix à des niveaux records. Il s’agit, selon la Bourse, de l’incertitude quant à la capacité de l’Ukraine à mener les travaux des champs, la flambée du cours des engrais, dont l’Europe importe 30% de ses besoins de Russie et le coût des carburants.
L’Ukraine pourra-t-elle semer puis exporter ? Quel impact auront les sanctions, quotas ou embargos envisagés côté occidental ou russe ? Les marchés des matières premières agricoles cherchent une boussole quinze jours après le début de la guerre, qui a propulsé huiles, blé et maïs à des niveaux inédits.
Montés très haut ces derniers jours, les cours mondiaux des céréales, notamment, du blé, semblaient se stabiliser, voire amorcer un repli. A-t-on atteint un plafond? Possible, pour Jack Scoville, vice-président du courtier Price Futures Group, mais « personne ne peut répondre à cette question avec certitude, car personne ne sait ce qui va se passer ».
Une volatilité miroir de la peur
Après un nouveau record le 9 mars à la Bourse des matières premières agricoles de Chicago, le cours du blé a terminé en repli, avant la publication dans la soirée du rapport mensuel du ministère américain de l’Agriculture (USDA), très attendu, car il établit les prévisions d’exportation et de stocks mondiaux.
« Nous avions déjà observé une volatilité forte en 2008 puis en 2010, mais celle-ci est typique d’un contexte de guerre et reflète la peur », souligne Edward de Saint-Denis, courtier à Plantureux et associés.
«On n’a pas d’élément fondamentalement nouveau sur les marchés des grains. Joe Biden a décrété un embargo sur les importations américaines de pétrole et de gaz russes, ce qui explique que le complexe oléoprotéagineux (soja, colza, tournesol) soit chaud bouillant, avec un colza à 882,75 euros la tonne en clôture mardi», a relevé Edward de Saint-Denis.
Mais ces envolées pourraient être tempérées par la réticence de l’Europe, dépendante à 40% des importations d’hydrocarbures russes, à s’engager sur la même voie. Autre inconnue, la riposte russe: Moscou a annoncé son intention de bloquer les exportations de certaines matières premières, sans préciser lesquelles.
L’Ukraine pourra-t-elle semer?
« Aucun navire ne sort d’Ukraine, en revanche, la Russie charge sur la Mer noire: on voit du mouvement vers la Turquie, le Soudan et l’Egypte », note Damien Vercambre, courtier à Inter-Courtage.
Sur la scène internationale, les prix élevés ont freiné de nombreux acheteurs : la Corée du Sud et la Tunisie ont pour le moment renoncé à un blé trop cher, tandis que l’Algérie a encore repoussé son appel d’offres. Sur le terrain, la grande question est la capacité de l’Ukraine à semer. Dans les zones où les troupes russes progressent, dans le nord, le sud et l’est de l’Ukraine, il n’y aura sans doute pas ou peu de semis. En revanche, «dans l’ouest et plus au centre de l’Ukraine, le travail bat son plein» pour les semis de printemps (orge, blé), rapporte Inter-Courtage. L’enjeu majeur sera pour les semis de maïs et de tournesol – dont l’Ukraine est un très gros exportateur – qui doivent débuter d’ici trois semaines. Les stocks d’engrais seraient suffisants, mais il pourrait manquer du carburant, indique Edward de Saint-Denis.
Kiev, qui a interdit l’exportation de seigle, d’orge, de sarrasin, de sucre et de viandes, tente par ailleurs d’organiser la sortie par le rail de quelques milliers de tonnes de blé et maïs vers la Pologne, la Roumanie et la Slovaquie. «Très loin des volumes habituels», souligne M. Vercambre.o
Source : https://www.boursorama.com/bourse/actualites/ble-mais-colza-l-incertitude-liee-au-conflit-en-ukraine-fait-exploser-les-cours-des-cereales-4656888850864e09911b23c71624390c
Encadré
«Pas de plan B pour le maïs »
«Le maïs est le gros enjeu » pour Gautier Le Molgat, analyste à Agritel, car s’il y aura à terme des substituts au tournesol ukrainien, « pour le maïs, il n’y a pas de plan B ».
« On ne peut pas remplacer 12 à 14 tonnes de maïs qui restaient à exporter d’Ukraine », renchérit Damien Vercambre, qui précise que « l’UE envisage d’importer du maïs américain ».
Sur Euronext, 9 mars, le blé tendre se vendait à 383,75 euros la tonne pour livraison en mai, et le maïs à 346,25 euros la tonne pour juin. Le colza était à 888 euros la tonne sur l’échéance de mai. A la Bourse de Chicago, peu avant l’ouverture, le prix du blé de variété SRW atteignait 12,49 dollars le boisseau (-2,89%) et le maïs 7,47 dollars (-0,73%), pour des livraisons en mai. Le soja atteignait 16,98 dollars (+0,51%).o
Le Kiosque
L’inquiétude des pays d’Afrique du Nord face à l’envolée des prix du blé
Les livraisons de blé en direction d’un certain nombre de pays importateurs sont bloquées dans les ports de la Mer noire, en raison de la guerre en Ukraine. Kiev a d’ailleurs suspendu ses exportations. Par conséquent, les cours du blé, déjà haut en raison de la crise de Covid-19, s’envolent. La situation pourrait avoir des répercussions dangereuses dans certains pays d’Afrique du Nord, à l’image de l’Égypte dont 80 % des importations de blé dépendent de l’Ukraine et la Russie.
La BCE prise entre le marteau de l’inflation et l’enclume du soutien à l’activité économique
La Banque centrale européenne réunit ce 10 mars 2022 son Conseil des gouverneurs pour statuer sur la politique monétaire de la zone euro. Si en février, un resserrement monétaire était envisagé, sans précision de calendrier, l’invasion de l’Ukraine par l’armée russe rebat les cartes. Explications.
La réunion du Conseil des gouverneurs de la Banque centrale européenne (BCE) va devoir intégrer une nouvelle inconnue – l’invasion surprise de l’Ukraine par l’armée russe – à une équation déjà devenue complexe entre choc d’inflation et ralentissement de l’activité. Comment ajuster la politique monétaire de la zone euro avec un taux d’inflation qui s’est affiché à 5,8% en février sur un an, après 5,1% en janvier. o