« (….). On a lancé des dynamites sur des gens qui étaient dans des puits de mines. On a mis le feu à des camions de livraison dans lesquels des gens dormaient, attendant la fin du couvre-feu. C’est une situation inimaginable et il faudra y mettre fin le plus tôt possible », extrait de l’interview de l’Emir du Liptako (région du Sahel), Ousmane Amirou Dicko, accordée à nos confrères de Lefaso.net sur l’attaque de Solhan le 8 juin 2021. Une situation qui vient décrire comment les 132 victimes de la barbarie de ces tueurs sans foi ni loi ont été massacrées. Enfants, femmes et hommes sont passés sous les canons de ces « buveurs de sang humain ». Dès l’annonce de cette hécatombe, une première dans l’histoire politique du Burkina Faso (132 morts), c’est l’indignation la plus totale. De l’enseignant de Falagountou à l’infirmier de Kankalaba, du cultivateur de Niangoloko à la ménagère de Sanaba, tous sont restés sans voix devant ce massacre d’un autre genre. Car, s’en prendre à des victimes innocentes sans défense (ils ont été attaqués dans leur sommeil sur un site d’orpaillage) est tout simplement lâche et inhumain.
Le président du Faso, Roch Marc Christian Kaboré, qui a été meurtri par les tueries, a annulé une visite officielle à Lomé au Togo, où il devait assister, le dimanche 6 juin 2021, à l’inauguration de la Plateforme industrielle d’Adétikopé. Dans la foulée, il a décrété un deuil national de 72 heures. Mieux, le locataire de Kosyam a dépêché son Premier ministre, accompagné d’une forte délégation ministérielle, le lundi 7 juin 2021 à Solhan pour réconforter les blessés et rassurer la population. Jamais dans le parcours politique du Burkina Faso, on n’avait assisté à un tel émoi des Burkinabè de tout bord politique, de toute classe sociale et religieuse. Les condamnations ont fusé de toutes parts.
Que faire ?
Maintenant que l’indignation est retombée, la grande question qui doit impérativement trouver réponse est : que faire ? Effectivement, après cette colère légitime, il s’en est suivi des coupables tout trouvés. Pour une certaine catégorie de Burkinabè, c’est « le ministre de la Défense », pour d’autres, c’est « l’inertie de la haute hiérarchie militaire », pour d’autres encore, c’est la gouvernance mode « diesel » du chef de l’Etat. Certains sont allés jusqu’à demander la tête de certains responsables dans l’Exécutif et l’armée. En attendant que des responsabilités soient situées, il urge que dans un sursaut patriotique, le peuple burkinabè puisse se souder pour qu’un tel drame ne survienne plus.
Comment ?
Il nous parait primordial, d’une part, que les politiciens rengainent à jamais leurs petites querelles et leurs rancœurs qui datent de Mathusalem pour faire la paix des braves. La réconciliation entre ses amis d’hier est impérative pour ramener la quiétude dans le pays. Sinon, ne soyons pas étonnés que l’ennemi en profite pour semer mort et désolation. La réconciliation telle que voulue par le président du Faso est un impératif, mais là encore, le processus est en train de se miner de calculs politiciens. On la voulait rapide, on veut en faire un processus politique. Ensuite, le président du Faso, en bénéficiant d’un second mandat, devait revoir sa copie en matière de gestion des ressources humaines. Les ministres ont bien reçu leur lettre de mission assortie de résultats à atteindre. Évaluons-les !
Les dernières révélations de notre confrère le journal d’investigation « L’Evénement » sur les problèmes de communication au ministère de la Défense ne sont pas rassurantes S’ils sont avérés, le président, chef suprême des armées, devrait en tirer toutes les conséquences.
Plus jamais Solhan !
Entre 2015 et 2019, le budget du ministère de la Défense nationale et des Anciens combattants a augmenté, soit +140% (Source rapport PNDES 2021). L’Etat burkinabè doit continuer dans ce sens en dotant l’armée de puissance de feu moderne et adéquate pour faire face aux assauts répétés de ces mécréants. A côté, songer au moral de la troupe sur le terrain, à travers la prise en charge conséquente des primes et pension alimentaire. Enfin, pour vaincre la menace terroriste, il faut actionner plusieurs leviers sur le terrain.
Scier la branche sur laquelle ces extrémistes violents «piochent» leurs combattants : la misère et la pauvreté. Donnons de l’espoir à travers un développement équilibré du pays.
Cela passe par rendre les zones fortement impactées (Sahel, Nord, Centre-Nord, Boucle du Mouhoun, l’Est, Centre-Est) en des zones économiquement viables et créer des créneaux porteurs d’emplois pour les jeunes, principales cibles de recrutement des terroristes. D’où le renforcement et l’amplification de l’impact des différents projets et programmes de développement tels que le Programme d’urgence pour le Sahel au Burkina Faso (PUS-BF) et le Programme d’appui au développement des économies locales (PADEL). !o
Rachel DABIRE