Comme à l’accoutumée, les femmes du Burkina Faso vont, à l’instar de leurs sœurs du monde entier, célébrer la Journée internationale du 8-Mars. Celle-ci a été initiée en hommage aux femmes qui ont défilé dans la ville de New York en 1908 pour réclamer des heures de travail plus courtes, de meilleurs salaires et le droit de vote. Au pays du cinéma africain, la spécificité de cette journée est le port du pagne 8-Mars. A cette occasion, chaque femme veut posséder son pagne.
Cette façon de faire est décriée par certaines femmes comme étant folklorique et souhaitent que l’accent soit plutôt mis sur la réflexion à travers des thématiques précises sur l’épanouissement de la femme. En attendant que ces dames trouvent la bonne formule, interrogeons-nous sur la pertinence du pagne imprimé importé pour magnifier la femme. Certes, le pagne imprimé importé est associé au pagne tissé, mais n’y a-t-il pas lieu de faire un choix définitif pour prendre en compte l’aspect économique. Selon un communiqué signé de la ministre de la Femme, de la Solidarité nationale, de la Famille et de l’Action humanitaire, depuis 2020, c’est la société Savatex, après appel à candidatures, qui a été retenue pour la confection, la fabrication, l’importation et la vente du pagne au Burkina Faso. Ce communiqué en date du 25 novembre 2019 est toujours sur la page Facebook du ministère. Loin de nous l’idée de freiner l’élan patriotique de ces entrepreneurs, à l’instar de Savatex, principal fournisseur du pagne 8-Mars. Mais ici, il s’agit plutôt de voir l’intérêt général du pays, celui de la rentabilité économique pour le pays, les femmes, les jeunes en termes d’emplois et de richesse nationale.
Faso Danfani et Koko Donda, plus que jamais à la mode !
A la faveur de l’insurrection populaire de 2014, le pagne Faso Danfani a été remis au goût du jour par les premières autorités. Cette tendance du président de la Transition et son gouvernement s’est poursuivie avec l’arrivée au pouvoir du président du Faso, Roch Marc Christian Kaboré, en 2015. Grand défenseur du pagne Faso Danfani qu’il arbore à toutes ses sorties présidentielles. Voyant les retombées économiques, le ministère en charge du commerce, avec à sa tête Harouna Kaboré, fait de la promotion du Faso Danfani son dada.
C’est ainsi que ce secteur qui était en train de mourir de sa belle mort renaît de ses cendres. Sur initiative du ministère, il y a eu le renforcement des capacités des tisseuses avec 5 000 métiers à tisser au profit de 202 associations de tisseuses et 140 artisans individuels sur toute l’étendue du territoire national. En estimant à 6 emplois par métier à tisser à raison d’une utilisation rotative journalière, c’est environ 12 720 emplois directs qui ont été créés et/ou consolidés. Ces données du ministère de l’Industrie, du Commerce et de l’Artisanat ne sont pas négligeables pour un pays où la question de l’employabilité se pose avec acuité. Mieux, il y a eu un regain de la transformation du coton avec ces constructions d’usines dans le domaine. Pour sauvegarder le patrimoine Faso Danfani comme levier de croissance, le gouvernement a labellisé le pagne.
Un autre pagne tout aussi prisé des consommateurs burkinabè est le pagne Koko donda. Une spécificité de la région des Hauts-Bassins, autrefois considérée pour les pauvres, est aujourd’hui portée avec fierté par toutes les couches sociales. Le regain vers le pagne koko donda a généré d’énormes profits d’argent pour les femmes. Jugé économiquement rentable, le gouvernement pense à sa labellisation. Ces deux facteurs cités plus haut sont sources de création d’emplois, de valeur ajoutée et de création de la richesse nationale. Au regard de ces nombreux avantages, le choix n’est-il pas vite fait ? Du reste, selon une source interne du ministère en charge de la femme, le choix du pagne local était une option de la ministre Laurence Ilboudo/Marchal à son arrivée. Mais toujours selon la même source, des lobbys des importateurs de pagne auraient combattu cette idée de consommer locale. o
Rachel Dabiré
Encadré
Pagne tissé/pagne imprimé
Burkina24, qui a recueilli l’avis de la Directrice générale de la femme et du genre, Edwige Ninon Yaméogo, le 21 janvier 2021, souligne que la balle de pagnes coûte 500 000 FCFA au prix en gros, soit 5 000 FCFA le lot de trois pagnes. Le pagne tissé en Faso Danfani, lui, se négocie à partir de 5.500 F en montant pour un pagne + un morceau.o