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Panneaux publicitaires: la ville met les illégaux au pas

Edouard Bouda, Directeur général de l’Agence pour le développement économique urbain (ADEU).

Depuis quelques semaines, la ville de Ouagadougou est en campagne de salubrité publique dans le secteur des panneaux publicitaires et de l’affichage. C’est ainsi que plusieurs régies publicitaires ont vu leur autorisation annulée, les autres sont invitées à se mettre en règles conformément à la règlementation. Pendant longtemps, les propriétaires des panneaux  ont profité de l’anarchie dans le secteur, toute chose qui constitue un manque à gagner pour les caisses de la Commune de Ouagadougou. Une révolution est en cours. Les détails dans cet entretien que nous a accordé Edouard Bouda, directeur de l’Agence de développement  économique urbain (ADEU)

On constate depuis un certain temps, des  panneaux publicitaires avec la mention «  Annulé », de quoi retourne cette opération ?

Merci de votre intérêt pour le sujet. Cette opération fait suite à un échange de lettres entre la Commune de Ouagadougou et une régie publicitaire de la place suite à des impayés qui se sont accumulés sur une longue période. C’est ainsi que l’autorité a décidé de procéder à l’annulation de l’autorisation d’exploitation de cette régie afin de céder le domaine public à d’autres exploitants. Malheureusement, malgré l’annulation, cette régie a continué d’exploiter son parc, malgré un rappel en septembre 2019. Pendant presqu’un an, cette régie a refusé d’obtempérer. Et c’est ainsi que l’autorité a demandé que cela cesse et que la règlementation soit appliquée. Cette régie avait un grand parc  dans la ville, c’est pour cela que vous verrez plus souvent les coups de peinture sur ses panneaux.

Elle n’est pas la seule dans ce cas, vu le nombre de panneaux concernés…

Effectivement, il y a d’autres panneaux qui ont reçu des coups de peinture pour n’avoir pas respecté la procédure en la matière. A la Mairie, nous considérons qu’ils sont dans l’illégalité et qu’il faut les exclure du domaine public.

L’exclusion du domaine  consiste-t-elle juste à mettre « annulé » sur le panneau ?

La marque « annulé » vise à attirer l’attention qu’on ne doit plus y procéder à des affichages de publicité. La procédure voudrait qu’après ce marquage,  on procède à la dépose du panneau. C’est-à-dire, à l’enlèvement du panneau et cela, à la charge de l’exploitant lui-même.

Combien de panneaux sont-ils implantés dans la ville ?

Notre étude a montré qu’il y a plus  de 3000 panneaux à Ouagadougou  et sur ce nombre, il n’y a que 421 qui sont  clairement identifiables.  C’est-à-dire, qui ont un propriétaire connu. Le reste,  ce sont des panneaux pirates ou délaissés. Lorsque nous avons affiné l’étude, on a découvert que plus de 1000 panneaux publicitaires étaient la propriété de régies. Cela veut dire que même sans les identités sur les panneaux, nos investigations et les renseignements ont permis de savoir à qui appartenaient ces 1000 panneaux. Mais,  même sur ces panneaux dont on a identifié les propriétaires, moins de 500 ont une autorisation claire. Les résultats de la  première étude ont été confirmés.

La mairie a décidé.d’organiser la gestion du secteur (DR)

On a l’impression que c’était l’anarchie en termes d’installation de panneaux, que dit précisément la loi ?

La règlementation est claire. Si vous avez besoin d’implanter un panneau, la première exigence, il faut être une régie publicitaire. C’est une exigence de la nouvelle loi qui date de 2015. La deuxième exigence, c’est d’avoir une autorisation du Maire de la Commune, pas d’Arrondissement. La plupart des régies n’ont pas introduit cette demande d’autorisation. Il y a deux cas de figures : primo, des acteurs illégaux qui implantent des panneaux et des régies qui le font sans autorisation préalable.

Tout cela fait un manque à gagner pour la Mairie…

Tout à fait. C’est un potentiel énorme pour la ville  C’est pour cela que la gestion de ces espaces  a été  confiée à l’Agence de développement économique urbain (ADEU)  pour  développer les outils nécessaires afin de gérer ce milieu. Dans un premier temps, il s’agit d’assainir le secteur  en  déposant tous les panneaux illégalement implantés et d’identifier clairement ceux qui sont en règles et permettre ainsi aux entreprises de ce secteur qui vivent de ce métier de pouvoir le faire dans un environnement favorable. Dans un second temps, il nous revient de trouver les outils nécessaires pour renforcer la collecte des taxes de ce secteur au profit de la Commune. Et là, ce ne sont pas que les régies qui sont concernées, il y a beaucoup d’autres acteurs comme les entreprises qui ont des totems, des enseignes lumineuses ou bien la publicité mobile. La règlementation s’est alignée sur la loi qui dit que :  « Constitue une opération de publicité :- toute inscription, forme, image ou son destinés à informer le public ou à attirer son attention sur une marque, un produit ou un service ; tout dispositif dont le principal objet est de recevoir lesdites inscriptions, formes, images ou son ;- toute exposition publique à but publicitaire ».

Vous voyez le branding sur les façades ou les châteaux d’eau, pour ne citer que ces exemples, ils sont concernés par la règlementation, parce que c’est de la publicité.

Et sur les échangeurs ?

Là, ce sont des zones oranges, les conditions sont plus drastiques pour ceux qui postulent

Comment  installe-t-on un panneau, la régie trouve son emplacement  et fait ensuite la demande ?

Merci pour cette question. La règlementation dit que c’est à l’autorité publique de faire la publicité sur les espaces disponibles. Mais dans la pratique, ce n’est pas le cas. Cela fait un an que nous gérons le dossier. Les régies demandaient et c’était systématiquement attribué. Nous sommes dans une nouvelle dynamique d’informatiser le territoire communal et de mettre sur une plateforme  Internet les espaces disponibles et les panneaux et les régies disponibles afin qu’un annonceur puisse y accéder et  faire son choix.  Cela va permettre plus de transparence dans le secteur.

Je précise que la Mairie n’a pas vocation à installer des panneaux. Mais, l’idée  dans le cadre de l’embellissement de la ville, c’est de sélectionner des régies  pour installer des totems avec des signalétiques dans la ville. Cela va nous éviter d’avoir des sorties et des carrefours truffés de panneaux de toutes sortes. C’est un travail qui est commencé, nous sommes dans l’attente de la publication de l’appel d’offres.

Le coût des  taxes appliquées n’a-t-il pas un lien avec la clandestinité des propriétaires ?

Sur les coûts, on peut toujours tergiverser. Mais nous pensons que c’est à la portée des publicitaires. Nous avons considéré que sur un panneau de 12 m² deux faces, ce serait, par exemple, 35 mille francs par m² par an. Il faut regarder derrière, à combien une régie loue une face à un annonceur. Il est vrai que l’investissement de départ est supporté par la régie, mais cela est valable pour toutes les activités commerciales. C’est sur la durée que l’on amortit les investissements. Cela dit, pour répondre à votre question, le montant ne peut pas excuser le nombre de panneaux non déclarés. Pendant longtemps, la Commune n’avait pas les moyens de détecter qui sont les propriétaires des panneaux. Aujourd’hui, ce n’est plus le cas. Car, l’opération en cours nous a permis de faire le point et de découvrir celles qui existaient depuis longtemps dans l’illégalité, d’autres sont venues se déclarer volontairement.

Il  existe une faîtière, «  les publicitaires associés »,  a-t-elle été impliquée dans cette opération ?

Oui, cette faîtière a été associée à la  fin de l’étude, nous  lui avons présenté les résultats de l’étude ainsi qu’à d’autres acteurs du secteur.

Et quand nous avons voulu réviser la règlementation, nous les avons également associés. Pour l’essentiel, nous sommes tous d’accord qu’il faut assainir le secteur.

Ce qu’il faut noter c’est qu’on a révisé les textes sur la publicité du fait que nos textes étaient antérieurs à la loi adoptée en 2015. D’où la révision des arrêtés portant règlementation de la publicité, le cahier des charges et la délibération sur la tarification.

Le Conseil municipal a délibéré sur ces arrêtés le 10 septembre, nous attendons le Ok de la tutelle  administrative et financière avant de passer à la phase communication et l’application des textes. o

Entretien réalisé par FW

 

Encadré

Quelques résultats du rapport

En 2019, la Mairie de Ouagadougou a commandité une étude  dans le cadre de la gestion et de l’exploitation de l’espace publicitaire sur le territoire communal. L’étude devait faire une analyse diagnostic du secteur, proposé une refonte des textes et faires des propositions de textes.

L’analyse de l’existant a montré la présence sur le territoire de la commune  de 5.475 supports publicitaires. Ce chiffre se décompose en 3.055 pré-enseignes, 2.213 panneaux et autres dispositifs publicitaires. L’étude a fait ressortir que seulement 421 sur le total de 5.475 supports publicitaires « sont clairement identifiés comme appartenant à des régies publicitaires »

L’étude a par ailleurs conclu  entre autres à l’existence d’une multiplicité de formats sur le terrain, une prolifération anarchique des pré-enseignes et signalétiques, un encombrement des voies et le non-respect de l’obligation de signature et d’entretien des panneaux.

Parmi les recommandations de l’étude conduite par le cabinet Cross road figurent la mise en place d’une nomenclature des types de supports afin d’uniformiser les formats, la mise en place d’un schéma de positionnement des supports par type de zone, ainsi que la mise en place d’un système d’information et de gestion de l’espace publicitaire communal.o

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