Le secteur des mines est gangrené pas l’évasion fiscale. Sous le prétexte d’attirer les investisseurs, les pays accordent des exonérations ou des incitations fiscales aux entreprises. Ces incitations fiscales souvent présentées comme des dépenses fiscales, c’est-à-dire, des avantages fiscaux accordés à des sociétés afin d’encourager un secteur économique.
Les incitations fiscales relatives au secteur minier sont passées de 23,24 milliards F CFA en 2015 à 41,81 milliards de francs CFA en 2017. Sur la période 2015-2017, elles sont évaluées à 95,09 milliards F CFA, selon les données du ministère de l’Economie, des Finances et du Développement (MINEFID).
En 2018, le Code minier a accordé 24 incitations fiscales. Au regard de la clause de stabilité figurant dans les conventions minières signées sur la base du Code de 2003, des entreprises minières continuent de bénéficier des avantages fiscaux et douaniers prévus par ledit Code. C’est le cas de l’impôt sur les sociétés qui est passé de 17,5% à 27,5% entre le Code minier de 2003 et 2015. Les conventions minières signées avant 2015 ne sont pas concernées par cette augmentation.
Ces incitations fiscales occasionnent l’érosion de la base d’imposition, le transfert des profits. Par ces subterfuges, les entreprises augmentent les charges et minimisent le bénéfice imposable par l’impôt.
L’érosion de la base imposable est préoccupante pour des pays comme le Burkina Faso. Un pays qui manque de ressources internes pour financer son développement. Il est aussi un pays qui manque de Ressources humaines, matérielles et financières pour lutter efficacement comme ce fléau. Il est enfin un pays où la volonté politique de lutter contre le problème n’est pas affirmée. Plusieurs manifestations concourent à l’érosion de la base imposable, dont la manipulation des prix des transferts, la déduction excessive d’intérêts, la majoration des coûts d’investissement, l’abus des conventions minières par une mauvaise interprétation de la clause de stabilisation fiscale, la concurrence entre les Etats pour accorder des facilités afin d’attirer les investisseurs miniers, etc. Elles sont toutes sources de pertes de recettes pour l’Etat et les collectivités.
Une des solutions à ce problème est non seulement le renforcement des capacités des agents publics chargés de suivre et contrôler le secteur minier, mais aussi l’amélioration des capacités des administrations fiscales et minières et le renforcement de la collaboration entre ces administrations. Malheureusement, cette collaboration n’est pas efficace et des mesures de renforcement de capacités des agents sont inexistantes. Les quelques rares renforcements de capacités proviennent d’initiatives extérieures. C’est le cas de l’OCDE qui a initié des formations au profit des agents de l’administration fiscale sur l’évasion fiscale. C’est aussi le cas du Forum intergouvernemental sur l’exploitation minière, les minéraux, les métaux et le développement durable (IGF) qui sensibilise les acteurs du domaine minier sur les fuites fiscales, leur impact sur les politiques économiques du pays et la modélisation des incitations fiscales. Malheureusement, la mobilité des agents dans l’Administration ne permet pas la spécialisation. Un agent formé au cours d’une année peut, dès l’année suivante, être affecté dans un service dont les missions n’ont rien à voir avec l’évasion fiscale. Le gouvernement se retrouve dans un éternel recommencement dans cette lutte.
Elie KABORE