Au Burkina Faso, les médicaments contre la malaria (paludisme) sont les plus touchés par les cas de contrefaçon. Ces contrefaçons ont un impact «critique» sur la sécurité des patients. Selon la société Novartis qui a réalisé cette étude sur «le rôle du secteur privé dans la lutte contre le commerce illicite», ces médicaments contrefaits ne contiennent aucun ingrédient actif, et dans le cas où ils en contiennent, il s’agit de mauvais ingrédients actifs ; enfin, le mauvais dosage de ces actifs engendre la résistance de la malaria aux traitements.
Cette étude a été présentée le 4 février dernier, lors du Forum sur le commerce illicite organisé par la Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement (CNUCED) à Genève.
Ces pratiques illicites, selon Novartis, s’adaptent et évoluent en fonction de l’environnement. 5 types de contrefaçons sont connus. Il s’agit, en premier lieu, du mixte entre authentique et contrefaçon. Il s’agit du médicament dont l’emballage primaire est authentique alors que le composé réel est contrefait. Ou encore l’emballage primaire est falsifié alors que le composé réel est authentique (c’est-à-dire, généralement périmé ou volé).
Le second type de contrefaçon est celui du vol du secteur public (et / ou non destruction). Exemple: des médias à grande échelle ont exposé des cas de 2018 en Italie et en Grèce qui montrent que des médicaments anticancéreux ont été volés par des gangs criminels dans des hôpitaux publics (par ex. Egypte) et les a introduits clandestinement dans l’UE pour les revendre à des prix très élevés
Il y a aussi la technique dite du «Plein sel, demi sel, craie-mitty». Avec les options, les fabricants de contrefaçons prennent l’option d’inclure le «bon» dosage d’ingrédients actifs, une partie ou aucune selon le modèle économique et les pays de destination visés.
Cette criminalité pharmaceutique a des conséquences néfastes. En premier, on peut noter l’impact sur les objectifs de développement durable des Nations unies. Ce commerce illicite entrave l’accès aux médicaments abordables et de qualité, ce qui impacte sur le pronostic vital des malades. Pour Novartis, la majorité des médicaments falsifiés saisis et testés se sont avérés ne pas contenir de produits actifs.
Autre conséquence de la contrefaçon est l’impact sur les recettes publiques. L’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) estime que la contrefaçon coûte chaque année, 10,2 milliards d’euros, 90.000 emplois et 1,7 milliard de revenus aux sociétés pharmaceutiques.
La contrefaçon sape aussi les investissements en de nouveaux médicaments et a un effet négatif sur l’innovation et l’accès aux médicaments abordables.
Selon l’OCDE, la contrefaçon réduit l’incitation à investir et innover et réduit le financement.
pour la recherche et le développement. De manière disproportionnée, elle impacte l’innovation dans le développement du pays. Pour PwC, la proportion de faux produits pharmaceutiques dans certains pays en développement des régions comme en Afrique peuvent atteindre 70%. L’OMS, pour sa part, a constaté que les faux médicaments contre la malaria entraînaient 38,5 millions de dollars de perte par an pour la région de l’Afrique subsaharienne. En plus du Burkina Faso, le Nigeria, le Bénin, le Niger, l’Angola, le Gabon, la Côte d’Ivoire, la RDC, le Ghana et le Mali sont aussi concernés par ces faux médicaments contre le paludisme.
Notons que l’objectif de cette session, réservée au rôle du secteur privé dans la lutte contre le commerce illicite, est de préserver les ODD des effets négatifs du commerce illicite. Pour le CNUCCED, il incombe aux gouvernements de règlementer ces pratiques commerciales sans scrupules et de sanctionner les activités illégales associées. Dans le même temps, le secteur privé a un intérêt vital à garantir que le commerce illicite ne compromette pas l’intégrité des marchés légitimes ou ne mette pas en danger le bien-être de ses consommateurs.
Cette session a exploré l’engagement du secteur privé à atteindre les ODD. Il a présenté des exemples des efforts des entreprises pour dissuader le commerce illégal dans les secteurs industriels, s’attaquer aux vulnérabilités de la chaîne d’approvisionnement, signaler les activités criminelles, promouvoir la gestion durable des ressources et protéger contre le travail forcé et d’autres violations des droits de l’Homme. A cette occasion, la société de médicaments Novartis a exposé sur les cas de contrefaçon dans le monde. D’autres sessions ont eu lieu lors du forum. Ils ont porté sur les impacts du commerce illicite sur la réalisation des ODD. Cette session a exposé les principales raisons pour lesquelles les gouvernements devraient donner la priorité aux actions de lutte contre le commerce illicite et a souligné l’importance du leadership intergouvernemental pour coordonner les ressources, partager l’expertise, établir des directives et promouvoir la coopération internationale en matière d’application des lois entre les États membres de l’ONU.
«Comprendre la taille et la forme du commerce illicite». C’est la 2e session qui a ponctué les travaux du forum. De par sa nature même, le commerce illicite est difficile à identifier et à quantifier. Il s’est agi d’examiner les différentes manières pour mesurer le commerce illicite et partagées par différents pays et parties prenantes. En particulier, la discussion a porté sur les points communs en termes de méthodologies et de défis.
«Commerce illicite et flux financiers illicites». Ce panel a présenté le cadre général utilisé par la CNUCED et l’UNODC pour définir et classer les flux financiers illicites, y compris le commerce illégal. Il a présenté les derniers développements concernant l’indicateur ODD et les différentes méthodologies disponibles pour mesurer et suivre les flux financiers illicites et leur impact économique et institutionnel.
Le forum a accueilli également une présentation de l’Institut international de Syracuse pour la justice pénale et les droits de l’Homme, sur les résultats de leur dernier travail, le mécanisme de lutte contre le commerce illicite. Ce projet vise à aider à définir des références internationales et à suivre l›action mondiale dans la lutte contre le commerce illicite.
NK
Le Forum sur le commerce illicite en bref
La rencontre s’est tenue le 4 février 2020 à Genève en Suisse. Une rencontre qui vise à contrer la croissance du commerce illicite. Selon diverses estimations des conseils commerciaux, des associations professionnelles et des groupes de réflexion, le commerce illicite mondial engendre des pertes estimées entre 650 milliards de dollars et près de 3 billions de dollars par an. C’est compte tenu de ce phénomène que la CNUCED a organisé, en collaboration avec l’Alliance transnationale de lutte contre le commerce illicite (TRACIT), un forum pour discuter du rôle du commerce illicite dans la réalisation des objectifs de développement durable. L’évènement a aussi vu le lancement du nouveau rapport de TRACIT, une cartographie de l’impact du commerce illicite sur les objectifs de développement durable des Nations unies, qui étudie le commerce illicite dans 12 secteurs clés qui participent de manière significative au commerce international et les compare aux 17 ODD des Nations unies. Ces secteurs comprennent l’agroalimentaire, l’alcool, la pêche, la foresterie, le pétrole, les produits pharmaceutiques, les métaux précieux et les pierres précieuses, les pesticides, le tabac et la faune sauvage, ainsi que la traite des personnes et la contrefaçon et le piratage.