Le secteur économique et singulièrement celui d’entrepreneuriat est de nos jours, dynamique, compétitif et surtout concurrentiel. Pour faire face à ce défi, il urge pour ceux qui ne veulent pas disparaître d’anticiper sur les besoins des clients, d’observer le marché économique, de chercher à connaître les concurrents, savoir ce qu’ils ont de plus. En d’autres termes, il s’agit d’intégrer la notion d’intelligence économique qui se définit comme l’ensemble des informations utiles à une entité économique pour faire prospérer ses activités. Cette notion d’intelligence économique très capitale pour les entreprises n’est malheureusement pas assez promue par les Burkinabè.
France, Maroc et Togo partagent leurs expériences
C’est justement pour inverser cette donne que la Chambre de commerce et d’industrie du Burkina Faso (CCI-BF) a initié la Semaine burkinabè de l’intelligence économique (SBIE). Cette Semaine, première du genre, a eu lieu du 7 au 14 octobre 2019 à Ouagadougou. Des pays comme la France, le Maroc et le Togo qui sont en avance en matière d’intelligence économique ont partagé leurs expériences avec le Burkina Faso autour de la thématique : « Intelligence économique : état des lieux, défis et enjeux pour les entreprises ». Dans le sous-thème « Définition de l’IE, état des lieux dans les grandes puissances économiques, en Afrique, au Burkina Faso, les enjeux pour les entreprises burkinabè et géostratégique », Benoit Maillé, spécialiste de l’IE à la Chambre de commerce de Paris, a interpellé les chefs d’entreprises burkinabè à intégrer désormais la surveillance et l’analyse des faits et gestes de leurs concurrents pour pouvoir prendre une décision importante. « Savoir, comprendre et agir », telle devrait être leur devise selon lui. Il a rappelé que l’IE était apparue dans les années 1960 aux Etats-Unis. Aujourd’hui, dit-il, l’IE sert d’aide à la décision des entreprises face à la concurrence exacerbée pour en tirer le meilleur avantage sur les concurrents. Zilé Ssoilihi, venu de la Chambre de commerce de Marseille, exhorte les Etats africains, à l’image de la France, de créer les conditions d’une émergence de l’intelligence économique. « L’Etat français s’est doté d’une stratégie sur recommandation de l’Union européenne. Cette stratégie doit être coordonnée depuis les instances régionales, le pays, la région.
De cette façon, dit-il, les gouvernants peuvent aider leurs entrepreneurs à contrer la pénétration d’autres produits, à protéger le marché local. Ce docteur en mathématique a salué la création de l’Agence de promotion d’investissement par l’Etat burkinabè. Pour lui, c’est une belle vitrine de promotion du marché burkinabè. Selon cet expert, l’IE n’est pas qu’externe, elle est aussi interne.
Le Burkina Faso doit se doter d’une IE endogène
Sur le panel 2, « Intelligence économique au service de l’innovation et de la compétitivité dans l’entreprise », l’expert marocain, Mounir Rochdi, docteur en veille stratégique et IE, note que la concurrence constitue une véritable menace pour les entreprises. Pour déjouer cette menace, il a recommandé aux unités industrielles d’être au diapason des TIC et de proposer constamment des produits innovants à la clientèle afin, dit-il, de ne pas se faire distancer par un concurrent. Le consultant burkinabè en stratégie et innovation, également gérant de BeogLab, Mahamadi Roumba, souligne qu’une entreprise qui veut avancer doit se doter de personnalités, de connaissances et d’un réseau étouffé. Il ajoute que trois missions essentielles sont dévolues à une entreprise : pénétrer sur le marché; s’y maintenir et étendre son champ d’influence. L’Institut international d’ingénierie d’eau et de l’environnement, 2IE, a mis en place un incubateur pour accompagner les jeunes promoteurs de projets innovants. Selon son responsable, Abdoul Wahab Annou, sur 13 promoteurs soutenus, 2IE enregistre un taux de succès de 40%. «IE : Stratégie offensive et défensive et stratégie d’influence/lobbying dans l’entreprise».
De l’avis de l’officier burkinabè, Alain Sara, qui a écrit un ouvrage sur l’intelligence économique portant sur l’influence des entreprises, note qu’elle peut être positive comme négative.
Il a exhorté l’Etat burkinabè à se choisir lui-même son propre modèle d’intelligence économique qui sera bâti sur les réalités endogènes. Pour lui, il est temps de s’interroger si la France est un modèle en matière d’intelligence économique pour le pays des Hommes intègres. Sur cette thématique, Zilé Ssoilihi prévient les entreprises sur les potentiels dangers qui les guettent, les attaques des virus, les fausses informations distillées par les concurrents et des clients mécontents.
Ambèternifa Crépin SOMDA
Tous les conférenciers ont insisté sur le fait qu’il ne faut pas confondre intelligence économique et espionnage industriel, le premier est légal et le deuxième tombe dans l’illégalité. Il y a aussi le fait que les entreprises, en plus de surveiller les concurrents, doivent surtout se protéger. L’IE doit pouvoir apporter une valeur ajoutée au secteur d’activité. L’IE doit être accompagnée d’une veille stratégique. Au Burkina Faso, il n’y a pas encore une définition de l’IE. Sur l’IE, le gouvernement burkinabè doit faire preuve de volonté politique forte et se doter d’une stratégie prospective au profit de ses entrepreneurs. A la CCI-BF, on note qu’une stratégie nationale est en cours d’élaboration.