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Journalisme d’investigation : Collaborer au lieu de se faire la concurrence

ça y est. Les portes de la 11e Conférence mondiale sur le journalisme d’investigation (GIJC) se sont refermées. Pendant 4 jours, 1.700 journalistes de 130 pays étaient réunis à Hambourg, en Allemagne, avec pour objectif de partager les expériences, apprendre des conférenciers et experts et nouer des contacts, trouver de nouveaux partenaires pour les prochaines enquêtes.
Depuis 2001, les GIJC constituent le rassemblement international de journalistes d’investigation le plus diversifié et le plus important jamais organisé. Le but ultime de cette Conférence mondiale, amener les journalistes, les Rédactions, les lanceurs d’alertes à travailler ensemble, à collaborer au lieu de se faire la concurrence.
Le patron de cette grande messe, David Kaplan, l’a encore rappelé lors de la soirée d’ouverture des travaux, «il n’a jamais été aussi important pour les Rédactions de travailler ensemble qu›à une époque où la corruption transcende les frontières, où l’argent illicite circule librement par les canaux offshore et où les campagnes de désinformation sont reproduites et adaptées dans tous les pays». La conférencière invitée d’honneur, Maria Ressa, dans son discours, a mis le doigt sur le problème en exhortant la foule des journalistes d’investigation du GIJC19 à «collaborer, collaborer et collaborer».
Retour sur les points saillants de cette conférence.

Les femmes en force
Journaliste d’investigation ne rime simplement pas avec le sexe masculin. La donne a changé et ça a été le cas lors de cette GIJC19 qui ne manquait pas de femmes courageuses. Selon les statistiques que nous avons obtenues du staff d’organisation, 48 % des orateurs et 50 % des participants étaient des femmes. 13 séances de réseautage thématiques autour des femmes ont été organisées, allant de l’environnement aux femmes, en passant par la désinformation et les médias en exil. Sans oublier le panel entièrement féminin composé de Martha Mendoza, Patricia Evangelista, Minna Knus-Galan, Marcela Turati, Miranda Patrucic, Juliane Löffler, Shiori Ito, Oriana Zill, Asha Mwilu, Alejandra Xanic VB et Sheila Coronel. Elles ont, au cours de cette séance d’échange, encouragé d›autres femmes journalistes par le partage de leurs histoires personnelles et de stratégies de survie.

Des sujets difficiles mais nécessaires
GIJC19 a réuni non seulement des journalistes d’investigation qui travaillent dans les environnements les plus restrictifs, mais aussi des journalistes originaires de pays où la presse est relativement libre pour partager leurs obstacles en matière de reportage, leurs expériences douloureuses et des conseils sur les soins personnels. De l’enquête sur le meurtre d’un collègue à la découverte de massacres de masse, les sujets abordés étaient difficiles, mais nécessaires.

OSINT
Combien sont-ils nos journalistes d’investigation à connaitre Osint? Avec autant de données accessibles au public sur le Web, les techniques avancées de recherche en ligne deviennent un outil essentiel dans la boîte à outils d’un journaliste d’investigation. Paul Myers et Henk van Ess, détectives experts en ligne, ont enseigné aux participants de GIJC19, des astuces pour trouver des informations sur les médias sociaux à des fins d’enquête.

Creuser dans les données
Les journalistes présents à la conférence étaient avides d’en savoir plus sur tout ce qui touche aux données, qu’il s’agisse de gratter et de créer des bases de données ou de produire des visualisations de données. Plus de 60 des plus de 250 panels, ateliers, rencontres et évènements spéciaux ont porté sur divers aspects du journalisme de données.

Enquête sur la désinformation
Comment les journalistes peuvent-ils traiter ou couvrir les campagnes de désinformation en ligne qui affectent la démocratie et les élections dans leur pays? Ce thème a été évoqué lors de la conférence et beaucoup de journalistes africains y ont pris part. Il s’agit, sans nul doute, d’un sujet de préoccupation en vue des élections qui s’annoncent en 2020 dans la plupart des pays africains. Des outils ont été donnés afin d’aider les journalistes d’investigation à identifier la désinformation et ses sources, et comment recueillir et analyser les données pour en rendre compte.

NK


La personnalité de l’année

Maria Ressa, 55 ans, a été désignée «personnalité de l’année» 2018 par le magazine Time pour avoir «pris de grands risques dans la recherche de la vérité». (DR)

Avant même que Maria Ressa, personnalité de l’année 2018, ait commencé son discours d’ouverture, une longue ovation debout par une salle comble de journalistes d’investigation l’a mise en larmes. Elle s’est adressée à ses collègues en disant: «Le pouvoir – et les brutes – ne s’arrêteront jamais si vous leur cédez. Nous devons sérieusement nous unir parce qu’une attaque contre l’un d’eux est une attaque contre tous». La journaliste qui a la double nationalité philippine et américaine fait l’objet de représailles, notamment sur ses publications sur les actions du gouvernement de Rodrigo Duterte sur son site Internet Rappler. A 55 ans, elle a été désignée «personnalité de l’année» 2018 par le magazine Time pour avoir «pris de grands risques dans la recherche de la vérité». Ses articles sont axés sur la guerre antidrogue meurtrière menée par le Président Duterte, dans laquelle des milliers de personnes ont été tuées. Depuis 2016, la police dit avoir tué 5281 trafiquants ou toxicomanes présumés. Les défenseurs des droits de l’Homme estiment qu’en réalité, ce bilan est trois fois supérieur, et que la campagne pourrait relever d’un crime contre l’humanité.

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