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BUMIGEB: diversifier la production minière du Faso

1.312 milliards FCFA. C’est le chiffre d’affaires du Bureau des mines et de la géologie du Burkina (BUMIGEB) en 2018, à l’issue de l’AG des sociétés d’Etat.
Un résultat bénéficiaire qui a permis de dégager des dividendes de plus de 138 millions de francs CFA pour l’Etat et des réserves spéciales de 79 millions de francs CFA. Aujourd’hui, l’institution dirigée par Aristide Aimé Zongo se porte bien et s’ouvre des perspectives. Parmi elles, celle de mettre en œuvre des projets de recherches pour révéler le potentiel en métaux de base dans le but de parvenir à une plus grande diversification de la production minière du Burkina Faso.
M. Zongo, patron du BUMIGEB, en parle dans cette interview réalisée par L’Economiste du Faso.

L’Economiste du Faso : Des anciens géologues affirment que le BUMIGEB a joué un rôle important dans la mise en exergue du potentiel minier national. Comment cela s’est passé ?
Aristide Aimé Zongo, DG BUMIGEB : Il faut dire que le BUMIGEB a connu de nombreuses mutations tout au long de son histoire mais qu’à chaque fois, il a su démontrer une capacité forte d’adaptation institutionnelle. Le contexte qui prévalait au moment de la création du BUMIGEB était caractérisé, d’une part, par l’absence de mine en exploitation dans le pays, à l’exception des calcaires dolomitiques de Tiara qui étaient extraits par la société COVEMI, et d’autre part, par des programmes de recherche géologique et minière qui ne semblaient pas avoir pour objectif majeur la production.
L’impatience du gouvernement et de l’opinion nationale par rapport à des recherches tardant à déboucher sur une exploitation minière concrète conduira les responsables de l’époque à reconsidérer les principales actions du BUMIGEB. Un accent plus particulier sera mis, entre autres, en multipliant le nombre de bourses de 3e cycle sur des sujets de cartographie géologique et/ou de recherche minière au Burkina, accordées à des étudiants en collaboration avec leurs universités, en associant systématiquempent la prospection géochimique avec la cartographie géologique, en réalisant un inventaire minéral lors de l’établissement des cartes géologiques détaillées autour des indices miniers connus.
Plus encore en développant de grands travaux d’études d’indices et de gites minéraux dont les plus importants ont été l’or de Guiro Baildiaga, Essakane, Taparko, Bouroum, Kwademen, les phosphates de Kodjari et d’Aloub Djouana, le zinc de Perkoa, l’antimoine de Manfoulou, le plomb de Gan, le diamant de Barsalogho / Dablo, le cuivre de Diénémera Bousséra Gongondi, le nickel de Bonga, etc. Aujourd’hui, tous les acteurs de l’époque peuvent être fiers des actions qui ont été entreprises depuis lors, car les mines en exploitation industrielle actuelles sont localisées pour la plupart, soit sur des sites sur lesquels les premiers travaux de reconnaissance ont été effectués par le BUMIGEB, soit sur des sites où les travaux de géochimie et/ou géophysique du BUMIGEB avaient révélé des indices sérieux, soit enfin, sur des zones où le BUMIGEB, en collaboration avec ses partenaires techniques, en avait conduit les recherches initiales.

A ce jour, quels sont les grandes activités du BUMIGEB ?
Le portefeuille actuel des activités du BUMIGEB couvre deux volets, les missions de service public et les prestations commerciales de services techniques. Concernant les missions de services publics, le rôle du BUMIGEB en tant que service géologique national est d’être l’opérateur de l’Etat pour le développement de l’infrastructure géologique de base.
Dans ce sens, il est chargé de la production, la gestion et la diffusion de l’information géologique et minière de base, la mise en œuvre du programme national en matière de cartographies géologiques et d’inventaire minéral sur le territoire national, la publication et la diffusion des données géologiques et minières. Il assure parallèlement divers contrôles miniers. Avec la nouvelle vision de la politique minière du pays orientée vers la nécessité d’une diversification de la production minière jusque-là quasi monominérale, basée principalement sur l’or, le BUMIGEB a engagé de vastes projets et programmes.
Parmi ces programmes, on peut retenir l’inventaire minéral et la cartographie géologique du territoire à des échelles plus grandes, mieux adaptées aux besoins des investisseurs miniers et qui répondent aux standards internationaux, la prospection minière régionale à travers des travaux de levées géophysiques aéroportées haute résolution, des levées géochimiques en sédiment de ruisseaux et des prospections ciblées sur des substances minérales à forte valeur ajoutée.
Pour ce qui est des prestations de services pour tiers assurées par le BUMIGEB, la gamme est variée mais je peux citer, entre autres, les principaux qui sont, des travaux de cartographie géologique, géochimique, géophysique et hydrogéologique, des travaux de prospection minière, des analyses chimiques d’échantillons de roches, sols et eaux, des travaux de sondages miniers, de jaugeage de cuves, de contrôle de qualité de métaux précieux et des produits pétroliers, d’épreuve de récipients de gaz et autres appareils à pression, etc.

Comment le BUMIGEB se finance-t-il ?
Le BUMIGEB est financé actuellement par deux principales sources, à savoir des subventions sur la base de contrats plans quinquennaux avec l’Etat et ses fonds propres issus des prestations commerciales. Je dois signaler qu’une 3e source de financement est en cours de mise en œuvre. Il s’agit du fonds de financement de la recherche géologique et minière et de soutien à la formation sur les sciences de la terre qui a été institué par le Code minier de 2015.
Il est alimenté par 15% des redevances proportionnelles, des taxes superficiaires, des droits fixes et des frais de demande d’agrément d’achat et de vente d’or collectés au Burkina Faso. Il est important aussi de noter que le BUMIGEB a déjà bénéficié, avec l’accompagnement de l’Etat, de l’appui financier de partenaires bilatéraux et multilatéraux pour la mise en œuvre de certains projets.
Il s’agit, entre autres, de la Banque mondiale, de l’Union européenne, du PNUD, de la BAD et de certains pays comme la France, l’Allemagne, la Hollande, la Belgique, etc. Ces modes de financement ont été imaginés pour permettre au BUMIGEB de pouvoir travailler à inscrire l’exploitation minière dans la durabilité, en répondant au mieux aux aspirations et attentes du monde minier qui est perpétuellement en mutation.
Le BUMIGEB a présenté ses bilans financiers à la dernière Assemblée générale des sociétés d’Etat. Quels sont les principaux résultats ? (Chiffres d’affaires, emplois, etc).
Je dois d’abord dire que le bilan financier du BUMIGEB s’analyse en fait sous deux angles. Celui exclusif des prestations commerciales donnant le chiffre d’affaires de la société et celui des produits totaux prenant en compte la subvention d’exploitation. Cette subvention est la contrepartie payée par l’État au terme des contrats-plans quinquennaux passés avec lui pour prendre en charge l’exécution de missions de service public, notamment la recherche géologique et minière et des activités de contrôle de qualité, de sûreté des installations industrielles et de produits miniers et d’hydrocarbures.
Maintenant et pour répondre à votre question relative au chiffre d’affaires, il faut noter que l’Assemblée générale des sociétés d’État, lors de sa 25e session tenue en juin 2017, avait formulé, après examen des états financiers de la société, une recommandation relative à l’amélioration du chiffre d’affaires dans le but de garantir la pérennité économique et financière de la société.
Pour ce faire, nous avons fait des efforts, en opérant des réformes dans le sens d’un renforcement de la structure financière de la société et une gestion rationnelle des effectifs. Cela a abouti à un accroissement du chiffre d’affaires d’environ 83% entre 2016 et 2018. Le chiffre d’affaires est passé de 717 millions FCFA en 2016 à 1. 063 milliards FCFA en 2017 puis à 1.312 milliards FCFA en 2018.

La société est-elle rentable et quelles sont les retombées en termes de recettes pour le budget national ?
Avant de répondre à votre question, je me dois de faire un commentaire, pour rappeler que la principale mission que l’Etat a assignée au BUMIGEB, c’est le renforcement de l’infrastructure géologique et minière de base. Ce qui présuppose de vastes programmes de cartographie et d’exploration minière sur toute l’étendue du territoire burkinabè.
A presque 40 années d’existence, on peut affirmer sans risque de se tromper que sur ce plan, le BUMIGEB a largement accompli sa mission, au vu des résultats obtenus. La carte minière du Burkina Faso permet de constater que notre sous-sol regorge d’importantes matières premières. Ce qu’il faut donc retenir, c’est que sans qu’il soit possible de le quantifier, l’apport du BUMIGEB à la croissance économique de notre pays est incontestable, car, si la filière aurifère occupe aujourd’hui une position de leader au titre des produits d’exportation et une position très favorable dans l’industrie minière mondiale, c’est parce que le BUMIGEB a joué et continue de jouer un rôle majeur.
Ceci étant et pour répondre précisément à votre question, le résultat bénéficiaire de l’année 2018 a permis de dégager des dividendes de plus de cent dix-huit millions de francs CFA pour l’Etat et des réserves spéciales de soixante-dix-neuf millions de francs CFA.

Quelles sont les perspectives de la société ?
En guise de dernier mot, j’évoquerais les perspectives de la société. Elles sont nombreuses mais je m’en tiendrais aux principales. Premièrement, tenant compte du fait que les différents travaux de cartographie géologique et de recherche minière ont mis en évidence plusieurs indices de métaux de base (Cu, Zn, Mg, Pb…), il devient nécessaire d’entreprendre des travaux plus poussés pour en élever le niveau de connaissance.
Nous envisageons donc de mettre en œuvre des projets de recherches pour révéler le potentiel en métaux de base dans le but de parvenir à une plus grande diversification de la production minière de notre pays. D’autre part, et pour une meilleure visibilité des résultats de nos travaux, nous envisageons un renforcement de notre système d’informations géologiques et minières déjà en ligne, en vue de nous ouvrir davantage au monde.
Cette visibilité est nécessaire, car elle permet d’améliorer l’attractivité géologique du pays auprès de la profession minière et d’attirer davantage d’investisseurs. Enfin, relativement au dernier ajustement opéré avec l’adoption de textes instituant le principe d’un fonds de financement de la recherche géologique et minière et de soutien à la formation, ainsi que du principe de l’octroi annuel au BUMIGEB de 10 % des travaux de sondages miniers et d’analyses géochimiques par les compagnies minières, nous nous activons pour leur mise en pratique effective afin que les montants attendus de ces activités puissent rehausser le niveau du chiffre d’affaires de la société et, toute chose étant égale par ailleurs, nous permettre de mener plus convenablement nos missions avec beaucoup plus de résultats.

La Rédaction


Qui est Aristide Aimé Zongo, DG BUMIGEB ?

Je m’appelle Aristide Aimé Zongo, j’ai 54 ans, je suis marié et père de trois enfants. J’ai été nommé depuis mai 2016 à la tête du Bureau des mines et de la géologie du Burkina (BUMIGEB). J’y ai été engagé en janvier 1992 à la suite d’un recrutement sur concours en qualité de minérallurgiste à la Direction de la Recherche géologique et minière et affecté au laboratoire. Six ans plus tard, en 1998, j’ai été nommé chef de service puis en 2008, directeur des laboratoires, poste que j’ai occupé jusqu’à ma nomination comme Directeur général. Relativement à mon cursus universitaire, je suis titulaire d’un diplômé en chimie industrielle option valorisation des ressources minérales de l’Institut des mines de Marrakech acquis en 1991, d’un diplôme d’expert en exploration et valorisation des ressources minérales de l’Institut national polytechnique de Nancy acquis en 2001, et enfin, je suis détenteur d’un Master en management qualité environnement de l’Institut du génie de l’environnement de l’Université de Ouagadougou acquis en 2007.


Historique du BUMIGEB

L’actuel Bureau des mines et de la géologie du Burkina (BUMIGEB) a été créé sous forme d’établissement public à caractère industriel et commercial en mai 1978, avec pour dénomination Bureau voltaïque de la géologie et des mines (BUVOGMI). En 1988, la création d’un Secrétariat d’Etat aux Mines et puis d’un ministère chargé des mines en 1994 a modifié le dispositif organisationnel du secteur minier et partant, les attributions initiales du BUMIGEB. Entre-temps, en janvier 1990, un décret relatif aux missions du BUMIGEB avait d’ailleurs consacré cette tendance en confirmant son rôle d’organe d’exécution de la puissance publique en matière de cartographie et de recherche géologique et minière. Le BUMIGEB a été élevé au rang de société à caractère stratégique en 1993 et transformé en Société d’Etat en août 1997. En 2001, l’Etat a engagé le BUMIGEB dans un processus de restructuration qui a abouti à sa privatisation partielle en décembre 2010, avec le maintien de son statut juridique de société d’Etat.

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