Entre 2015 et 2018, les industries minières au Burkina Faso ont engrangé en moyenne plus de 1.000 milliards FCFA de recettes. Et dans cette même période, le budget de l’Etat n’a bénéficié que moins de 20% de ces recettes minières.
Ces données officielles collectées auprès du ministère des Mines sont tirées de l’étude provisoire sur « les politiques fiscales et les prix de transfert dans le domaine minier au Burkina Faso », menée en mai 2019 par le fiscaliste et spécialiste de la fiscalité minière, Ousséni Kagambèga. A partir de ces statistiques, le consultant tire la conclusion que l’or ne profite pas aux recettes de l’Etat, encore moins aux populations. Selon lui, cette situation s’explique par l’opacité dans la gestion des taxes versées par les entreprises minières et le non-respect des clauses des cahiers de charges par celles-ci en ce qui concerne la construction des infrastructures socioéconomiques. Mais pire, par de nombreux avantages fiscaux accordés par le gouvernement à ces sociétés pour les attirer. Il note que le Burkina Faso est dans le sillage des pays convaincus que le régime fiscal est un déterminant essentiel de la décision d’investir, les gouvernants africains ont entrepris, ces dernières années, des réformes fiscales qui offrent des dérogations temporaires au régime de droit commun applicable aux contribuables. Au Burkina Faso, la fiscalité minière vise essentiellement à accroître les recettes budgétaires tirées du développement du potentiel minier, tout en proposant un ensemble de mécanismes incitatifs susceptibles de favoriser l’investissement minier sur le territoire national et cela, au regard des meilleures pratiques internationales. C’est ainsi, que ce soit le Code minier de 2003 ou celui de 2015 révisé par le Conseil national de la Transition, des facilités fiscales sont accordées aux sociétés minières. De ces avantages fiscaux, on retient que pendant la phase de recherche, les sociétés minières sont exonérées d’impôts, soit sur la réduction du taux d’imposition, elles bénéficient aussi du régime d’admission temporaire. Pendant la phase des travaux préparatoires, les titulaires d’un permis d’exploitation ou d’une autorisation d’exploitation industrielle de carrière bénéficient de l’exonération de la TVA ; pendant la phase d’exploitation, tout titulaire d’un permis d’exploitation bénéficie d’une exonération pendant sept ans de l’impôt minimum forfaitaire de perception, de la contribution des patentes, de la Taxe patronale d’apprentissage (TPA) et de la Taxe des biens de main morte (TBM) ; elles bénéficient aussi de la stabilisation du régime fiscal et douanier. A titre d’exemple, cette stabilisation fiscale a permis à la mine Taparko, exploitée par la société Nordgold, d’économiser une dizaine de milliards FCFA en 6 ans (Source : L’Economiste du Faso n°263). En plus de cela, s’ajoute une fiscalité de droit commun assez souple. Toutes ces facilités du gouvernement burkinabè confortent les sociétés minières à ne pas s’acquitter de certains droits comme le payement de la contribution financière en matière d’eau (CFE) et le Fonds minier de développement local (FMDL).
En rappel, à ce jour, le Burkina Faso enregistre 12 mines en production, dont 11 en exploitation d’or et 1 en zinc. En plus de 3 mines d’or en phase de construction. Cette étude a été commanditée par le Centre d’études et de recherche appliquée en finances publiques (CERA-FP) avec l’accompagnement de l’ONG Oxfam au Burkina Faso, à travers le programme Citoyenneté active et réduction des inégalités (CARI) pour la mise en œuvre du projet« Initiative multipartite pour une économique humaine en Afrique (WAF) ». Lequel programme est conduit au Ghana, en Sierra Leone et au Burkina Faso. A cette rencontre de restitution provisoire de l’étude, des acteurs présents, notamment la société civile et des journalistes y ont dénoncé le laxisme du gouvernement actuel à laisser perdurer ces faveurs au détriment de ses propres recettes. Pour mettre fin à ce favoritisme qui ne dit pas son nom, l’assistance a invité la société civile à marquer à la « culotte » le gouvernement.
Ambèternifa Crépin SOMDA