Le 8 avril 2019, la Banque mondiale publiait sa dernière édition de la note d’information sur les migrations et le développement. Il ressort que les envois de fonds vers les pays à revenus faibles et intermédiaires ont atteint un niveau sans précédent en 2018. Ces fonds correspondent à la part des revenus gagnés à l’étranger que les migrants rapatrient chez eux. Selon l’institution, ce sont 529 milliards de dollars que les pays ont enregistrés en 2018, soit une progression de 9,6 % par rapport au précédent record de 2017, à 483 milliards de dollars.
Comment se répartit cette somme ?
Asie de l’Est et Pacifique
Les envois de fonds vers la région de l’Asie de l’Est et Pacifique ont progressé de pratiquement 7 %, pour atteindre 143 milliards de dollars en 2018, un rythme supérieur aux 5 % de 2017. Les transferts vers les Philippines ont continué de progresser, atteignant 34 milliards de dollars, mais à un rythme moins soutenu sous l’effet d’un repli des transferts privés en provenance des pays du Golfe. Les flux vers l’Indonésie ont gagné 25 % en 2018, après une année 2017 de stagnation.
Europe et Asie centrale
Dans ces deux régions, les envois de fonds vers la région Europe et Asie centrale, qui avaient bondi de 22 % en 2017, ont atteint 59 milliards de dollars en 2018, soit une hausse de 11 %. La bonne tenue de l’activité économique en Pologne, en Russie, en Espagne et aux États-Unis, grands pays d’origine des transferts pour la région, sous-tend cette dynamique. Les pays moins dépendants de ces transferts, comme l’Ouzbékistan, la République kirghize et le Tadjikistan ont profité du rebond de l’économie russe.
Premier pays bénéficiaire de la région, l’Ukraine a capté plus de 14 milliards de dollars de fonds en 2018, soit un bond de 19 % environ par rapport à 2017. Mais une révision de la méthode d’estimation des flux ainsi que la hausse de la demande de travailleurs migrants chez ses voisins expliquent aussi cette évolution.
Amérique latine et Caraïbes
Les envois de fonds vers la région Amérique latine et Caraïbes ont augmenté de 10 % en 2018, atteignant 88 milliards de dollars, stimulés par la vigueur de l’économie américaine. Avec environ 36 milliards de dollars reçus en 2018, soit une hausse de 11 % par rapport à 2017, le Mexique reste le principal bénéficiaire de ces transferts dans la région. Grâce à leurs migrants installés en Espagne, la Colombie et l’Équateur ont affiché une hausse de respectivement 16 et 8 %. Trois autres pays ont connu une progression supérieure à 10 % — le Guatemala (13 %), la République dominicaine et le Honduras (10 % chacun) — liée au regain des envois de fonds en provenance des États-Unis.
Moyen-Orient et l’Afrique du Nord
Les transferts d’argent vers le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord ont grimpé de 9 % en 2018, à 62 milliards de dollars — une évolution à imputer essentiellement à la progression rapide des transferts vers l’Égypte, d’environ 17 %. Cette dynamique positive devrait perdurer au-delà de 2018, mais à un rythme moins soutenu, autour de 3 % en 2019, freiné par l’essoufflement de l’activité dans la zone euro.
L’Asie du Sud
Les envois de fonds vers l’Asie du Sud ont bondi de 12 % en 2018, à 131 milliards de dollars, en nette hausse par rapport aux 6 % enregistrés en 2017. Ce redémarrage s’explique par l’amélioration de la conjoncture aux États-Unis et un redressement des cours du pétrole qui a eu un effet positif sur les envois de fonds dans certains pays du Golfe. En Inde, les transferts ont augmenté de plus de 14 %, les inondations au Kerala étant probablement à l’origine de cette hausse, les migrants ayant voulu soutenir financièrement leurs familles restées au pays. Au Pakistan, la hausse a été plus modérée (7 %), pénalisée par un recul des envois depuis l’Arabie Saoudite, premier pays d’origine de ces transferts. Au Bangladesh, les envois de fonds ont brusquement rebondi en 2018, à 15 %.
NK
46 milliards de dollars pour l’Afrique subsaharienne
Les envois de fonds vers l’Afrique subsaharienne ont grimpé de pratiquement 10 % en 2018, à 46 milliards de dollars, à la faveur des bonnes performances dans les pays à revenu élevé. La région enregistre ainsi une hausse constante des fonds envoyés par les migrants. Une augmentation qui est due, selon la Banque mondiale, à la solidité des conditions économiques dans les pays à revenus élevés où travaillent de nombreux migrants issus de l’Afrique subsaharienne.
Selon le classement de l’institution, c’est le Nigeria qui est en tête avec plus de 24 milliards de dollars reçus de sa diaspora de par le monde. Viennent ensuite le Ghana (3,8 milliards), le Kenya (2,7 milliards), le Sénégal (2,2 milliards) et le Zimbabwe (1,9 milliards) dans le top 5.
En part du produit intérieur brut, les Comores se taillent la part du lion, devant la Gambie, le Lesotho, Cabo Verde, le Liberia, le Zimbabwe, le Sénégal, le Togo, le Ghana et le Nigeria.
550 milliards de dollars prévus en 2019
En 2019, les envois à destination des pays à revenus faibles et intermédiaires devraient s’établir à 550 milliards de dollars et devenir ainsi leur première source de financement extérieur.
Selon la base de données de la Banque mondiale sur les coûts des transferts dans le monde, le tarif moyen pour l’envoi de 200 dollars reste élevé, autour de 7 % au premier trimestre de 2019, loin de la cible de 3 % à l’horizon 2030 fixée dans les Objectifs de développement durable (ODD 10.7).
En outre, dans de nombreux couloirs de transfert en Afrique et dans les petits États insulaires du Pacifique, il dépasse la barre des 10 %.
Les banques constituent le mode de transfert le plus coûteux, avec des frais moyens de 11% au premier trimestre de 2019. Les établissements postaux arrivent en deuxième position, qui prélèvent des commissions supérieures à 7 %. En cas de partenariat exclusif entre les bureaux de poste nationaux et un opérateur spécifique, une majoration vient en général alourdir ces frais de 1,5 % en moyenne mais pouvant aller, dans certains pays, jusqu’à 4 % (données du dernier trimestre de 2018).