Le Conseil des ministres du 6 février 2019 a adopté: «un rapport relatif à la situation d’exécution du budget et de la trésorerie de l’Etat, exercice 2018 au 30 septembre», peut-on lire dans le compte rendu de ce Conseil.
Une information qui ne passe pas inaperçue aux yeux des personnes qui suivent de près l’actualité sur les finances publiques. Même si elle vient régulariser une situation, l’adoption de ce rapport peut être qualifiée de caduc en début février 2019 pour plusieurs raisons.
On le sait, les rapports d’exécution trimestrielle du budget annuel sont présentés en Conseil des ministres. Le rapport adopté ce 6 février 2019 concerne la période allant du 1er janvier au 30 septembre 2018, soit près de 5 mois après la fin de la période concernée. On est donc tenté de se demander pourquoi avoir attendu tout ce temps avant d’adopter le rapport officiellement en Conseil des ministres?
Des interrogations soutenues par le fait que c’est sur la base de ce rapport, non adopté, que le gouvernement a constaté que le recouvrement des recettes et l’exécution des dépenses n’étaient pas satisfaisants. Pour ce faire, il a opéré des réajustements à travers l’adoption d’un projet de loi de finances rectificative de la loi de finances pour l’exécution du budget de l’Etat, exercice 2018, au cours du Conseil des ministres du 10 octobre 2018.
Ce projet de loi de finances rectificative a été transmis à l’Assemblée nationale qui l’a adopté le 13 novembre 2018. Ce jour, la ministre déléguée au Budget, auprès du ministre de l’Economie, des Finances et du Développement (MINEFID), Edith Clémence Yaka, a bien affirmé devant les députés, que cette loi visait à: «opérer des réajustements afin de tenir compte du contexte actuel».
La logique aurait voulu que ce rapport d’exécution soit adopté avant de procéder aux réajustements budgétaires et à la transmission du projet de loi à l’Assemblée nationale.
Dans les normes, à ce jour, on devait s’attendre au moins à l’adoption du rapport d’exécution provisoire du budget 2018, couvrant la période allant du 1er janvier 2018 au 31 décembre 2018, puisque l’exercice budgétaire est clos depuis près d’un mois et demi. Un exercice facile à exécuter, dans la mesure où au niveau des régies de recettes, le solde de l’année 2018 est déjà connu. Le gouvernement doit revoir sa copie et se mettre à jour afin que son système de rapportage colle à l’actualité.
Un autre point important mérite d’être relevé. Le gouvernement a adopté le rapport d’exécution au 30 septembre 2018 en début février, alors qu’il a préparé et adopté le budget 2019 sur la base de l’exécution du budget 2018 au 30 septembre 2018.
En effet, le projet de loi de finances pour l’exécution du budget de l’Etat/exercice 2019 a été adopté par le gouvernement au cours de la séance du Conseil des ministres du 19 septembre 2018. Ce budget dont l’élaboration a débuté en juin 2018 s’est inspiré d’abord du rapport d’exécution du budget au 30 juin 2018 et de celui au 30 septembre 2018. Sur la base de ces rapports, le gouvernement a observé une certaine prudence dans la prévision de recettes et des dépenses en 2019, au regard de la situation sécuritaire et les menaces de grèves dans l’administration publique. Ce projet de loi de finances 2019 a été adopté par l’Assemblée nationale le 18 décembre 2018. Au stade actuel, les différents ministères et institutions auraient déjà entamé l’exécution de ce budget 2019. C’est en ce moment que le gouvernement adopte le rapport d’exécution au 30 septembre 2018.
On retient toutefois que les chiffres contenus dans le projet de loi de finances rectificative 2018 adopté en Conseil des ministres du 10 octobre 2018 et ceux contenus dans le rapport d’exécution adopté en Conseil des ministres du 6 février 2019 sont identiques. Les prévisions recettes ajustées se chiffrent à 1.795,923 milliard FCFA contre 2.018,154 milliards FCFA dans la loi de finances initiale 2018.
En dépenses budgétaires, les prévisions ajustées ont été ramenées à 2.191,933 milliards FCFA, contre 2.441,317 milliards FCFA dans la loi de finances initiale.
Le niveau de déficit budgétaire passe de 423,163 milliards FCFA à 396,010 milliards FCFA, soit une amélioration de 6,42%.
Elie KABORE
L’Assemblée nationale agacée par les vieux rapports du gouvernement
Le gouvernement semble exceller dans l’élaboration et l’adoption tardives des rapports d’exécution du budget. Au cours des séances plénières d’adoption du projet de loi de finances rectificative 2018 et du projet de loi de finances 2019, les députés ont exigé du gouvernement, la transmission à bonne date des rapports d’exécution périodiques du budget de l’Etat, afin de faciliter leur suivi.
Le gouvernement était représenté par la ministre déléguée au Budget, Edith Clémence Yaka, à l’adoption de la loi de finances rectificative 2018, et Hadizatou Rosine Coulibaly/Sory, MINEFID de l’époque, lors de l’adoption de la loi de finances 2019. Dans leurs réponses, elles ont affirmé que ces rapports étaient transmis à l’Assemblée nationale. Des réponses qui n’ont pas été du goût des députés qui ont alors demandé «Est-ce à bonne date?». Le nouveau MINEFID, Lassané Kaboré, doit rectifier le tir.