En 2017, la Justice a été saisie de 25 dossiers concernant la gestion par la Police nationale des services payés. C’est ce qui ressort du rapport 2017 de l’Autorité supérieure de contrôle d’Etat et de Lutte contre la corruption (ASCE-LC) remis au président du Faso le 4 janvier 2019. Mais que contiennent ces dossiers ? Quelles sont les malversations visées et quelles sont les personnes impliquées ?
Tout serait parti d’une dénonciation de la gestion des services payés à la Police nationale par l’Union de la Police nationale (UNAPOL), un syndicat regroupant des agents de la Police nationale. On entend par services payés, les revenus des services payés par les institutions financières, hôtelières, sociétés minières, etc. qui sollicitent les services de la police contre rémunérations.
Suite à cette dénonciation, le ministère en charge de la sécurité avait diligenté à l’Inspection générale des services, une enquête dont les résultats ont été rendus publics en mai 2017.
L’Economiste du Faso dans son édition N°207 du 22 mai 2017 a rendu compte de ce rapport. Le Journal informait que l’enquête avait concerné 166 structures issues de toutes les 13 Directions régionales de la police. 4 semaines ont été nécessaires pour passer en revue 14 mois de gestion des revenus de ces services payés.
L’enquête a révélé que sur 408 institutions financières et hôtelières sécurisées, 232 avaient des contrats formellement établis, 82 avaient des contrats partiellement signés et 174 n’avaient pas de contrat. Le point au niveau des sociétés minières indique qu’elles sont 14 à bénéficier des services de sécurisation des sites miniers et d’escorte de la Police nationale à travers des contrats signés à l’insu même de la Direction générale de la Police nationale.
En effet, sur ces 14 sociétés minières, 10 d’entre elles ont des contrats conformes signés avec les Directions régionales de la Police nationale et 4 n’en possèdent pas.
L’ensemble des malversations financières révélées dans le rapport porte sur la somme de près de 2,166 milliards FCFA sur la période allant de janvier 2016 à février 2017. Une grosse partie de la somme, soit 74%, a été allouée au personnel de la police et seulement 25% au fonctionnement. Mais on retient que malheureusement, une partie de cette somme est détournée par des responsables au niveau de la Police nationale. Ils sont 28 hauts-gradés de la police burkinabè à avoir empoché 131 millions FCFA en 14 mois.
«Sur cette liste, on tombe des nues en constatant que le Directeur général de la Police nationale a reçu 22.105.000 FCFA, son adjoint 14.470.000 FCFA, le directeur de la sécurité publique 19.320.000 FCFA, le directeur des unités d’intervention 10.675.000 FCFA, les Directeurs régionaux de la police du Sahel, du Centre, du Nord, du Plateau central, des Cascades, du Sud- Ouest, du Centre-Ouest ont empoché 13.375.000 FCFA, etc.», peut-on lire dans L’Economiste du Faso N°207. Le rapport de l’inspecteur général des services a été transmis à l’ASCE-LC qui a donné une suite judiciaire.
Elie KABORE
Plusieurs juridictions concernées
Ces dossiers ont été transmis en juillet 2017 au Tribunal de Grande instance de Ouagadougou, Ziniaré, Banfora, Boromo, Ouahigouya, Diapaga, Léo, Bogandé, Fada N’Gourma, Koudougou, Koupéla, Tenkodogo, Dédougou, Nouna, Tougan, Kongoussi, Kaya, Diébougou, Gaoua, Orodara, Djibo, Dori, Manga et de Bobo-Dioulasso. Au Tribunal de Grande instance de Ouagadougou, 2 dossiers ont été déposés, dont celui relatif à l’investigation effectuée à la Direction générale de la Police nationale et au Groupement de la Compagnie républicaine de sécurité (CRS) de la région du Centre, province du Kadiogo, et celui issu de l’investigation des services de la Direction régionale de la Police nationale du Centre sur les services payés.