De plus en plus, les pays africains mettent un accent sur la mobilisation des recettes internes. Plusieurs pays africains sont fortement dépendants des industries extractives. Cela implique de comprendre les mécanismes et enjeux de la fiscalité qui s’applique aux industries extractives.
Au niveau des citoyens, le débat public concernant le partage de la rente minière entre Etats et investisseurs devient récurrent et ressurgit dès que les cours des minerais augmentent. Pourtant, aucune base de données ou d’études publiques ne permet à ce jour de comparer et d’évaluer les dispositions fiscales et parafiscales mises en place par les Etats africains pour capter une «juste» part de la rente minière.
Une insuffisance que la Fondation pour les études et recherches sur le développement international (FERDI) a résolue avec le lancement d’une base de données qui propose des innovations majeures dans la compréhension de la fiscalité. Elle a effectué un recensement des 12 principaux impôts, droits et taxes (taux, assiettes, exonérations) qui sont dus pendant les phases de recherche et d’exploitation d’un projet minier dans des pays anglophones et francophones.
Le Burkina Faso fait partie des pays francophones. Toutes les informations fiscales sont associées à sa source juridique. La base de données se concentre actuellement sur l’or ; exploité dans 34 sur les 54 pays africains, faisant de ce continent le deuxième producteur mondial.
Les informations fournies ont pour objectif de concourir à l’amélioration des politiques publiques ainsi qu’à l’information des entreprises, avec comme finalité le développement international.
Les Etats sont amenés à arbitrer entre la volonté d’attirer les investisseurs étrangers et la nécessité d’accroître les recettes publiques. Appliquée aux données économiques d’une mine représentative et associée à un modèle de flux de trésorerie, cette base de données donne les moyens de synthétiser la charge fiscale qui devrait s’appliquer aux entreprises minières dans les pays africains, selon la législation.
L’indicateur ainsi calculé est le Taux effectif moyen d’imposition (TEMI) qui représente la part de la rente minière captée par l’État sur un projet minier. Cette base de données inédite permet de connaître l’évolution des taux effectifs moyens d’imposition depuis les années 1990, dans les pays.
Elle montre l’impact des réformes fiscales successives prises par les Etats africains (taux, assiettes, règles de calcul) pour tenter de s’adapter à un contexte d’instabilité des cours mondiaux.
Les éléments de la fiscalité pour le calcul du partage de rente
Les données fiscales retenues dans le modèle de flux de trésorerie sont extraites du droit national de chaque pays : Code minier, Code général des impôts et tous textes juridiques complémentaires disponibles. Elles forment donc le système d’imposition légal d’une mine, hors difficultés d’application de l’impôt et hors conventions particulières d’établissement. Au cours des phases d’investissement et d’exploitation (12 premières années du projet), le modèle retient 8 prélèvements supportés par la société minière au profit de l’Etat ; dont 3 redevances : droits fixes, redevances de superficie, redevances minières ; deux impôts : impôt sur les sociétés, impôt minimum forfaitaire ; deux retenues à la source : sur les dividendes, sur les intérêts, et le versement de dividendes prioritaires à l’Etat.
En revanche, aucun impôt n’est dû lors de l’année de réhabilitation de la mine (13e année). Dans cette analyse, la durée de vie fixée pour les 3 mines-type est de 13 ans : 2 ans d’investissements initiaux (construction et équipement), 10 ans d’exploitation du minerai et 1 année de réhabilitation de la mine.
Il est difficile de déterminer a priori la durée de vie effective d’une mine ; sans compter avec les projets d’extension. Ainsi, la durée de vie estimée d’une mine peut être très variable selon les études de faisabilité : entre 7 et 15 ans, et parfois 20 ans. La durée de vie effective est, quant à elle, fonction de multiples facteurs tels que la réalité géologique et l’évolution du cours mondial, qui sont des éléments difficilement maitrisables mais qui influent sur la poursuite ou non de l’exploitation.
En revanche, 3 prélèvements publics, qui peuvent particulièrement influencer le taux effectif moyen d’imposition, n’ont pas pu être pris en compte dans le modèle du fait de la complexité de l’information fiscale nécessaire à leur calcul : les crédits de TVA non remboursés par l’administration fiscale aux compagnies minières, les droits de douanes perçus à l’importation des biens d’équipement et des carburants, ainsi que les taxes sur les produits pétroliers. Cette contrainte sous-estime la part de la rente prélevée par l’Etat.
La base de données concerne aujourd’hui 14 pays francophones et 7 pays anglophones : Afrique du Sud, Bénin, Burkina Faso, Cameroun, Côte d’Ivoire, Gabon, Ghana, Guinée, Kenya, Madagascar, Mali, Mauritanie, Niger, Nigeria, République du Congo, République Démocratique du Congo, Sénégal, Sierra Leone, Tanzanie, Tchad et Zimbabwe.
EK
Quel est le modèle de flux de trésorerie proposé ?
La diversité des mines d’or dans le monde et en Afrique impose de faire le choix d’une ou de plusieurs structures économiques considérées comme «représentatives» du secteur aurifère. Trois structures de «mines-types», caractéristiques de mines d’or africaines, ont été construites afin de tester la sensibilité de l’indicateur de partage de la rente minière aux données économiques retenues.
La structure économique d’une mine est notamment caractérisée par la durée de vie de la mine, son potentiel de production, la teneur en minerais des gisements, les coûts en capital (CAPEX), les coûts opérationnels (OPEX). Le potentiel des gisements modélisés est respectivement de 1,6 (mine 1), 1,8 (mine 2) et 3,8 millions d’onces d’or.