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Les terribles prévisions de la CIA : Guerres, pénuries et pirates

Comment les Américains imaginent-ils  le monde en 2030 et  2035?  Ils ne cachent rien: la réponse se trouve dans deux rapports: «Le monde en 2030» et «Le monde en 2035 vu par la CIA».
Lisons ensemble ces textes  d’une richesse stratégique et prospective incontestable. Que dit celui adressé au président Barack Obama intitulé Le monde en 2030?
Il offre plusieurs grandes tendances et scénarios. Ainsi, nous allons vivre dans un monde où nous serons de plus en plus nombreux sur la planète, où nous manquerons  de plus en plus d’alimentation, d’énergie et d’eau, nous connaîtrons de nouvelles pandémies, de nouvelles menaces et insécurités, difficiles à prévoir et à anticiper.
Il y aura de plus en plus de catastrophes naturelles et de phénomènes extrêmes, en particulier des inondations, des sécheresses, des incendies de forêts à répétition et des pollutions de toute nature.
En 2030, le monde connaîtra aussi la montée du pouvoir des individus, avec un accroissement de l’autonomie de leurs comportements  du fait de la révolution numérique et des possibilités énormes qu’elle va offrir aux citoyens  en termes de réseautage collaboratif, de connectivité  et de progression du génie individuel dans le sens de la destruction comme dans celui de la créativité.
Le monde va également voir se développer une densité et une complexité des réseaux informatiques, dont le fonctionnement, la maintenance et la gestion des défaillances et des réparations en temps réel produiront des impacts en termes des coûts écologiques, économiques et humains sur des populations entières, voire sur des civilisations entières, qu’il sera difficile à évaluer, à contrôler et à réguler.
Le deuxième rapport, «Le monde en 2035 selon la CIA», adressé au président Donald Trump, met quant à lui en évidence trois scénarios du danger.

1- Une  guerre généralisée probable. Celle-ci surviendrait sur un fond d’un monde éclaté, fragmenté et  incertain qui verra l’exacerbation de la compétition entre les anciennes et les nouvelles puissances économiques et militaires (Iran, Turquie, Chine, Inde et Russie) en vue de consacrer leur leadership régional et mondial.

2- Des replis identitaires, avec le retour en force des territoires et des communautés. Ce phénomène serait dû à l’aggravation de la crise de défiance des citoyens dans leurs institutions élues et dans les élites politiques traditionnelles avec comme conséquence le développement du populisme, du patriotisme économique, et des tentations affirmées à un retour aux sources  des champs religieux de ces communautés. Ces phénomènes, tout en aggravant la crise des démocraties, notamment occidentales, vont nourrir des référentiels et des réflexes favorables à des formes nouvelles et atypiques d’extrémismes et de totalitarismes.

3- La dé-mondialisation sur un fond d’émergence et de développement d’ilots de sécurité, de stabilité et de prospérité dans un océan de misère, de pandémies, de mal-être, de violence de tout genre, d’insécurité, d’instabilité politique et de désordre économique, financier, politique et social. Ce contexte verra la progression et la prolifération de par le monde des activités illicites, de l’économie du crime, de l’extension et de la diversification des champs des activités informelles, l’aggravation des pressions  migratoires et le développement de nouvelles vulnérabilités liées aux impacts multiples des changements climatiques.
Devant de telles perspectives de désastres, il importe, me semble-t-il,  de changer radicalement notre façon de penser les sociétés et les économies du XXIe siècle. Etats et institutions régionales et internationales doivent produire des politiques publiques dédiées à la gouvernance de ces nouvelles  menaces et à la conduite du changement dans un système mondial éclaté, fragmenté et incertain. Ces rapports incitent, enfin, à la coopération internationale pour le développement, la défense et la sécurité en phase avec les risques majeurs de ces tendances sur la paix, la stabilité et la sécurité humaine globale.
Ces rapports sont produits par le National Intelligence Council (NIC), qui est une structure de veille stratégique  et d’intelligence économique. Celle-ci propose  des projections de la CIA sur les grandes tendances, à partir d’un examen effectué par près de 2.500 spécialistes, chercheurs et décideurs américains et non américains connus et reconnus pour leur expertise en matière d’analyse stratégique prospective.
Cette structure produit tous les 4 ans, depuis 15 ans, un rapport stratégique de prospective à l’attention des présidents des Etats-Unis. L’un est allé sur le bureau d’Obama, l’autre sur celui de Trump.
L’objectif est de les éclairer sur ce que pourrait et devrait être la stratégie américaine à la lumière d’une prospective des dimensions les plus importantes de l’évolution de la situation internationale dans les domaines économique, social, politique, technologique, géostratégique, militaire et sécuritaire.
On les trouve facilement, traduits en français… Avec un peu de piment dans le titre, piment rajouté par les éditeurs.

L’Economiste Edition N°:5286


Pensée stratégique pour les chefs

Obama devait se le tenir pour dit: les Etats feront face à de réels déficits en matière de pensée stratégique, car ils seront désormais  de plus en plus dans des situations de difficultés objectives, voire d’impossibilité de tout connaître, tout prévoir, tout anticiper et donc tout gouverner et réguler. Se posent alors trois questions essentielles aux gouvernants des pays, qu’ils soient développés, émergents ou en voie de développement:
– Comment s’adapter et conduire les changements que le monde va  connaître à l’horizon 2030?
– Peut-on  maîtriser ce futur probable?
– Quelle veille stratégique mettre en place pour se protéger contre les aléas, les incertitudes et les risques majeurs nouveaux à relever à tous les niveaux de la gestion de leurs économies et de leurs sociétés?


La guerre avec les sciences et des pirates

Plus important encore pour les analystes du 2e rapport: le contexte mondial verra l’avènement d’une nouvelle génération de guerres, en particulier la guerre de l’information, de l’image, des ressources naturelles (eau, énergies et alimentation), du numérique, du génie génétique végétal et animal, de l’espace et des valeurs.
Ces guerres seront l’œuvre d’acteurs étatiques qui useront de la robotisation des moyens de faire la guerre, de l’intelligence artificielle et des formes nouvelles de renseignement pour accroître leur influence dans le monde et exercer leur pouvoir de domination et de dépendance. Elles s’appuieront de plus en plus sur des acteurs non étatiques d’un genre nouveau comme les pirates et  les rançonneurs informatiques, les mercenaires, les espions d’un genre nouveau  portés et aidés par les moyens technologiques digitalisés de plus en plus sophistiqués.
Un tel contexte profitera aux terroristes et aux radicalismes de tout genre que les puissances économiques, financières, technologiques et militaires tenteront d’instrumentaliser en fonction de leurs objectifs géostratégique, économique, politique et civilisationnel.

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