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Restes à recouvrer : Tendre avec une amnistie fiscale

 

Le recouvrement des Restes à recouvrer (RAR) préoccupe le gouvernement. Dans ses recherches de solutions, il envisage le recouvrement des RAR par des structures privées. L’option gouvernementale ne semble pas faire l’unanimité. D’autres solutions existent selon Tidiane Kaboré, inspecteur des impôts et président du Groupe d’action pour la promotion du civisme fiscal (GAPCIF). Pour la structure qu’il dirige, la solution réside d’abord dans la maîtrise des origines des RAR, ensuite dans l’orientation de la réflexion sur une sorte d’amnistie fiscale accordée par l’Assemblée nationale aux reliquataires de RAR, au cas par cas, et par nature d’impôts.

L’Economiste du Faso : Quel est le stock des restes à recouvrer au niveau de la Direction générale des impôts (DGI) ?
Tidiane Kaboré, inspecteur des impôts et président du GAPCIF : Les restes à recouvrer, de façon simple, sont la différence entre les montants transmis aux services de recouvrement et les montants effectivement encaissés par ces derniers. Selon nos informations, le stock de RAR au 31 décembre 2017 s’élèverait à 482 milliards de FCFA.

Ce stock est-il en hausse ou en baisse ?
Des informations reçues, il semble que malgré l’effort de recouvrement de l’administration fiscale, ce stock va croissant. Ce qu’il faut dire, c’est que leurs origines sont très bien connues depuis quelques années des autorités.

Quelle est l’origine de ces RAR ?
Les RAR ont 2 sources principales. Premièrement, vous avez les redressements issus des contrôles sur pièces et sur place. Lorsque que l’entreprise reçoit la notification définitive du service initiateur du contrôle fiscal ; automatiquement, un avis de mise en recouvrement est transmis à la recette pour prise en charge.
A ce niveau, il faut rappeler que le contribuable ne vient pas se libérer immédiatement de sa dette, car il s’agit généralement de redressements effectués sur des exercices antérieurs et en cours, assortis de montants élevés, selon les cas.
Deuxièmement, il faut remarquer que les dépôts de déclarations sans paiements, qui devraient être l’exception, sont devenus la règle dans l’administration fiscale burkinabè depuis une dizaine d’années. Normalement, toute souscription de déclaration auprès du service des impôts doit être accompagnée de paiement ; surtout pour les impôts indirects comme la TVA pour lequel le contribuable collecte en tant que redevable légal.
Mais, malheureusement, l’administration a favorisé cela et, l’habitude étant une seconde nature, ce sont les dépôts sans paiements qui viennent gonfler davantage les RAR.

Quelles sont les mesures prises par le gouvernement pour d’une part éviter les RAR et d’autre part pour le recouvrement de ces RAR ?
En tant que président en exercice du GAPCIF, qui est une association de la société civile, je n’ai pas connaissance des mesures prises par le gouvernement pour éviter l’accroissement des RAR. Cependant, j’ai pu lire dans la presse comme tout le monde que le gouvernement envisageait de confier le recouvrement des RAR à des cabinets privés pour une meilleure prise en charge, s’inspirant d’expériences de pays où cela a bien marché.

Quel est l’avis du GAPCIF sur cette question ?
Nous allons nous contenter de faire des propositions. Le GAPCIF estime qu’il faut résoudre les problèmes des RAR à leur source. En effet, les gros redressements de l’administration fiscale sont indexés sur les RAR, car dans les 482 milliards de RAR, la part des contrôles est de 260 milliards de FCFA, soit un taux de 54,09%. C’est dans vos colonnes que j’ai vu ces chiffres pour la première fois.
L’administration fiscale burkinabè va-t-elle continuer à notifier des milliards de FCFA à des entreprises tout en sachant que le recouvrement sera très difficile? Nous estimons, au niveau du GAPCIF, qu’il faut privilégier les contrôles ponctuels en lieu et place des vérifications générales.
Les contrôles ponctuels ont l’avantage de couvrir des périodes plus courtes. Par exemple, sur un an, avec quelques impôts à risque bien ciblés. Aussi, les montants notifiés aux contribuables sont moins élevés et facilement payables, alors que les vérifications générales qui portent sur trois ans et l’ensemble des impôts génèrent des montants faramineux et difficiles à recouvrer.
Pour les dépôts sans paiement, il est mieux de sensibiliser encore les contribuables, car vouloir rompre brusquement avec cette habitude approuvée par l’administration elle-même pendant des années pourrait entamer la bonne collaboration entre les deux partenaires.
Aussi, l’administration doit avoir une parfaite maitrise de ces RAR, car il nous est revenu que des contribuables ont fait l’objet de fermeture pour impayés, alors que ces derniers étaient à jour de leurs paiements.

Entretien réalisé par E.K


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Le GAPCIF invite le gouvernement à plus de prudence dans le traitement en cours des RAR. Dans les cas où les RAR trouveraient leurs sources dans les agissements des dirigeants de l’entreprise, il y a lieu de mettre en œuvre la procédure tendant à rendre ces dirigeants solidaires du paiement de ces RAR. Toute chose qui est faisable si l’Agence judiciaire du trésor (AJT), la direction des enquêtes fiscales et la direction de la législation des impôts fédèrent leurs efforts.
Aussi, dans les cas où les RAR sont justifiés par des difficultés réelles et que l’insolvabilité du contribuable est prouvée par les services des impôts, une bonne partie des RAR, notamment ceux portant sur des impôts directs et même des impôts indirects, pourrait faire l’objet d’un abandon par l’Assemblée nationale. Sur ce point-ci, le GAPCIF plaide en substance pour une amnistie fiscale accordée par l’Assemblée nationale. Cette amnistie pourrait être partielle ou totale, selon les cas. Mais avant, l’Assemblée nationale doit s’autosaisir du dossier et parallèlement mener une enquête parlementaire pour mieux comprendre le mécanisme, au lieu de se contenter des rapports à elle transmises par les services techniques.

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