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Opérateurs télécoms : Vers des licences à technologie neutre

 

Le gouvernement burkinabè s’apprête à changer le format et le mode d’octroi des licences individuelles relatives à l’établissement et à l’exploitation des réseaux et services de communications électroniques. Jusque-là, chacune des technologies entrant dans le cadre des réseaux télécoms a fait l’objet d’une licence particulière, distincte des autres. Par ailleurs, leurs acquisitions par les opérateurs se sont faites dans des conditions de prix et de délais séparées.
Pour chaque opérateur, il y a donc une superposition des licences (2G, 3G…). En poursuivant une telle façon de procéder, il y aura à la longue autant de licences que de technologies déployées. Or, chaque licence a son cahier des charges propre. En termes de gestion et de régulation de ces licences, on assiste à une situation assez difficile sur le terrain. D’où la nécessité de revoir la formule. Le Burkina a décidé de se conformer à la tendance en cours sur le plan mondial, en optant d’attribuer désormais des licences technologiquement neutres. Lors du Conseil des ministres du 7 février 2018, le gouvernement a adopté un rapport relatif aux «conditions et modalités d’attribution de licences individuelles technologiquement neutres pour l’établissement et l’exploitation des réseaux et services de communications électronique».
Par la même occasion, il a instruit le ministre en charge de l’activité des télécoms d’engager, de concert avec le ministre en charge des Finances et l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP), des discussions avec les opérateurs de téléphonie pour l’octroi de cette nouvelle formule de licences. C’est-à-dire des licences à technologie neutre.
«La neutralité technologique est le principe selon lequel il ne doit pas être fait de distinction ni de discrimination entre les diverses techniques et technologies susceptibles d’être utilisées pour la fourniture de services similaires, notamment afin de permettre une adaptation plus rapide des services aux progrès techniques et technologiques», explique l’ARCEP. Dès qu’un opérateur est attributaire d’une licence à technologie neutre, il est d’office libre d’exploiter l’ensemble des technologies relatives aux réseaux télécoms, dans la mesure où techniquement cela est disponible. Ce qui veut dire que pour les futures migrations technologiques, il n’aura plus à faire de demande de licence. Les migrations pourront se faire librement.
La licence technologiquement neutre offre donc une certaine flexibilité aux opérateurs pour les placer en position d’offrir des services innovants basés sur des technologies avancées, selon les besoins du marché, «à condition qu’ils soient attributaires de ressources, notamment de fréquences, qui leur permettent de le faire», précise l’ARCEP. La Licence à technologie neutre permettra de libérer l’innovation technologique, et elle donnera la possibilité aux opérateurs de s’adapter aux nouvelles technologies dès qu’elles sont disponibles.
L’une des technologies télécoms dont les opérateurs burkinabè pourraient immédiatement s’approprier dans le cadre d’une licence à technologie neutre sera la 4G. Pour cela, il suffira que, techniquement, la fréquence 4G puisse être disponible au niveau du Burkina. Au-delà de la 4G, ce sont l’ensemble des technologies, notamment la 5G et les autres, que les opérateurs burkinabè, détenteurs de la licence technologiquement neutre, pourront exploiter librement sans faire de demande spéciale et sans un coût additif, lorsque techniquement ces technologies seront disponibles au Burkina.
En 2010, le gouvernement burkinabè a fixé par décret le coût du renouvellement des licences 2G des opérateurs à 26,33 milliards de F CFA pour une période de 10 ans. Après cela, chaque opérateur a dû payer 1, 5 milliard de F CFA supplémentaire pour avoir la licence d’exploitation de la 3G.
L’avènement de la licence technologiquement neutre va permettre d’aligner les différentes licences technologiques sur une même période de validité et de définir un coût unique et global pour toutes ces licences. Ainsi, la licence individuelle pour les opérateurs de télécoms sera un produit unique sous forme d’un paquet à l’intérieur duquel toutes les options technologiques se retrouvent. C’est avec les discussions prévues avec les opérateurs que toutes les précisions devraient être établies sur ces nouvelles licences. Mais, d’ores et déjà, l’ARCEP a indiqué que les nouvelles licences technologiquement neutres «abrogeraient les licences existantes, dont certaines dispositions pourraient être, le cas échéant, retranscrites, adaptées et mises à jour dans les nouveaux textes».
De ce fait, les nouvelles licences technologiquement neutres offriraient l’avantage de «présenter une seule date d’entrée en vigueur et de fin ; évitant ainsi la superposition des dates d’expiration des licences précédemment accordées» ; de « contenir des dispositions claires et à jour de meilleures pratiques internationales applicables à toutes les technologies utilisées»; de «contenir des dispositions spécifiques, d’ordre public ou expressément prévues par l’ARCEP, sans pour autant restreindre les manœuvres des opérateurs à l’utilisation d’une quelconque technologie».

Karim GADIAGA


A quel prix et pour quelle période de validité ?

Certes, les possibilités offertes par la licence technologiquement neutre sont illimitées du point de vue technologique, mais pas du point de vue temporel. Sa durée de validité devrait être déterminée dans les discussions qui vont être engagées avec les opérateurs. A cette occasion, son coût devrait également être établi. Une autre chose à définir pendant les discussions, c’est la date de démarrage effectif de l’application de cette licence et, surtout, comment l’on prend en compte les temps restants pour les anciennes licences acquises par les opérateurs. Va-t-il y avoir un démarrage groupé ou bien chaque opérateur pourra choisir le moment d’entrer dans cette nouvelle formule de licence? Une question qui se pose d’autant plus que les différentes licences des opérateurs ne sont pas alignées sur les mêmes dates de validité.
Les cas sont différents, et pour amener les trois opérateurs actuels à une situation uniforme tout en évitant de créer des discriminations, il va falloir bien négocier les éventuels rachats des anciennes licences. On se rappelle encore le cas mal négocié de l’opération de renouvellement des licences des opérateurs en 2010. A la suite de cette opération jugée discriminatoire, l’Etat a été condamné en justice et devrait verser à l’opérateur plaignant plusieurs milliards de F CFA en guise de dédommagements.

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