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Recouvrement de recettes fiscales: jugé satisfaisant au premier semestre

 

Quel est l’impact des grèves enregistrées au niveau du ministère de l’Economie, des Finances et du Développement sur le recouvrement des recettes fiscales à la Direction générale des impôts (DGI) ? Quelles sont les mesures d’atténuation prises ? Pour répondre à ces questions, L’Economiste du Faso a rencontré Adama Badolo, directeur général des impôts.

L’Economiste du Faso: Quelles sont les tendances de recouvrement des recettes par la DGI au premier semestre de l’année 2017; une période marquée par les grèves au ministère de l’Economie, des Finances et du Développement (MINFID)?
Adama Badolo, directeur général des impôts : Lorsqu’on fait le point du recouvrement pour les 6 premiers mois de l’année 2017, le niveau de recouvrement est globalement satisfaisant ; lorsqu’on tient compte du contexte.
A la fin des mois de janvier et février 2017, nous avons enregistré respectivement 98,77% et 98,02% de taux de recouvrement. Le mois de mars a été plus difficile, avec les 3 semaines de grèves du Syndicat national des agents des impôts et des domaines (SNAID). Le niveau de recouvrement est resté à 45,20%. Mais dès le mois d’avril, nous avons repris les bonnes tendances et avons réalisé autour de 103,51% de taux de recouvrement. Au mois de mai, la grève du Syndicat des agents du trésor du Burkina (SATB) a impacté sur le recouvrement des impôts.
Les contribuables étant en même temps des fournisseurs de biens et services à l’Etat, s’ils n’arrivaient pas à être payés au niveau du trésor, il est difficile pour eux de payer les impôts. Aussi, de nombreux contribuables pensaient que le service des impôts était en grève. Il a fallu que l’on publie un communiqué pour les rassurer et les inviter à passer régler leurs impôts ; ce qui nous a permis d’atteindre 76,09%. Au mois de juin, nous avons dépassé l’objectif pour nous situer autour de 103,17%.
Lorsqu’on compare ces chiffres à ceux du premier semestre de l’année 2016, on observe une augmentation nominale de plus de 28 milliards de FCFA, malgré les 2 mois de grèves.

Etes-vous satisfaits de ce niveau de recouvrement comparé aux prévisions de l’année 2017 ?
L’objectif de l’année 2017 est de 720 milliards de FCFA, et nos prévisions de recouvrement au premier semestre étaient de 367,342 milliards de FCFA.
Nous avons pu mobiliser 325,287 milliards de FCFA en fin juin 2017 malgré les difficultés déjà évoquées. Compte tenu de cette situation et de la situation économique nationale difficile, on peut affirmer que nous avons su limiter les dégâts. Il nous reste 395 milliards de FCFA, alors que nous avons passé la période de pic de payements des impôts qui est le mois d’avril, avec le paiement de l’impôt sur les bénéficies. A la DGI, traditionnellement, le premier semestre est plus important que le second, parce que le mois d’avril est celui des déclarations. Il ne nous reste donc peu de temps pour atteindre l’objectif de 720 milliards de FCFA.
Nous n’avons pas d’autres alternatives pour atteindre cet objectif que les recettes fiscales. Lorsqu’on dit que 50% des recettes fiscales servent à payer les salaires, de deux choses l’une : soit on diminue les salaires et le taux baisse ; soit on augmente les recettes fiscales et le taux baisse. Nous n’avons donc pas le choix que d’augmenter les recettes pour que les indicateurs soient favorables.

Quel est l’impact des nouvelles mesures fiscales contenues dans les dernières lois de finances ?
La taxe sur les boissons a été à la hauteur de nos attentes, contrairement aux autres nouvelles taxes.
La taxe sur les jeux de hasard ne concernant que 3 sociétés, la perception est plus facile.
Pour la contribution foncière, on peine encore à la faire accepter. Au premier trimestre, le recouvrement de cette taxe était faible.
A cause des grèves, nous avons été obligés de repousser le délai de paiement qui était fixé au 31 mars jusqu’au 31 mai, pour permettre au maximum de personnes de déclarer leurs propriétés. Nous rencontrons des difficultés lorsqu’il s’agit de faire payer les impôts par des particuliers de manière volontaire.
Certains particuliers justifient le non-paiement des impôts par un manque d’informations, mais c’est de la mauvaise foi. Heureusement que l’Impôt unique sur les salaires et les traitements (IUTS) est une retenue à la source.
Nous sommes dans une réflexion qui vise la simplification dans le paiement des impôts. La télé-déclaration et une plateforme de paiement en ligne sont des pistes que nous explorons, avec une possibilité pour le contribuable d’utiliser le paiement mobile pour s’acquitter de ses impôts. Cette réflexion est très bien avancée.
Sur le site web de la DGI, une fenêtre de déclaration en ligne existe. Nous sommes dans une phase test, et nous invitons les contribuables à adhérer à la plateforme et de souscrire aux déclarations en ligne. Tout particulier qui veut adhérer à la plateforme peut se faire accompagner par des agents de la DGI.
Nous allons intégrer les paiements au fur et à mesure, après une phase de formation de nos agents. Les paiements se feront grâce au mobile, pour la contribution foncière et la taxe de résidence. Ceux qui ont déjà payé ces taxes au moins une fois retrouveront leur fiche d’imposition dans la plateforme.

Comment comptez-vous lever les obstacles pour atteindre les objectifs ?
L’administration n’est pas dans les conditions optimales pour le recouvrement. Nous avons toujours des problèmes de locaux, de moyens de déplacement, de carburant, etc. C’est un handicap, parce qu’il faut aller vers le contribuable pour collecter l’impôt.
Le système informatique mérite d’être améliorer afin de maitriser le potentiel fiscal et de mieux contrôler les déclarations d’impôts.
Dans un système déclaratif, il faut disposer d’informations. L’incivisme fiscal et la propension à dribbler les impôts sont une contrainte majeure pour notre administration.
La situation économique du pays est aussi une contrainte. Des entreprises se plaignent du manque d’activités.
A notre niveau, nous avons constaté effectivement que le nombre de marchés publics présentés à l’enregistrement a baissé par rapport à l’année dernière. Cette situation a pour conséquence la baisse des droits d’enregistrement et de la Taxe sur la valeur ajoutée (TVA). Ce sont les difficultés auxquelles notre administration fait face.

Comment la DGI peut-elle recueillir des informations sur les contribuables ?
Nous sommes en train d’élaborer un plan stratégique. Mais avant la finalisation de son élaboration, des actions sont déjà mises en œuvre. Si certaines actions sont mises en œuvre immédiatement, d’autres le seront dans le long terme.
De façon immédiate, en ce qui concerne les capacités organisationnelles des services, il y a eu la deuxième direction des moyennes entreprises. L’objectif est de maitriser ce segment d’entreprises.
Aussi, le gouvernement décidé d’acquérir un immeuble R+6, situé en face de la mairie de Bogodogo, qui peut loger les 2 directions des moyennes entreprises de Ouagadougou, parce, que selon nos estimations, l’immeuble peut contenir jusqu’a 300 agents. C’est un immeuble que nous pouvons cloisonner comme on le veut. Avec cette acquisition, nous allons disposer d’un nombre d’agents suffisant pour gérer les moyennes entreprises. En plus, en termes fonctionnement des services, on peut mieux s’organiser.
Une nouvelle organisation-type a été mise en place au niveau des directions des centres des impôts, avec les directions régionales des impôts du Centre et des Hauts-Bassins Désormais, chaque centre disposera d’une brigade de contrôle en interne. Plutôt que de référer au directeur régional qui dépêche des équipes de contrôle, chaque centre effectuera le contrôle avec ses agents.
Dans les services déconcentrés, nous avons entamé une série de constructions. En cette année 2017, on aura 8 directions nouvelles provinciales des impôts. Les constructions concerneront aussi Ouagadougou, et nous sommes en train d’identifier les sites.

Comment la DGI va-t-elle régler définitivement la question des Restes à recouvrer (RAR) ?
Nous jouons notre crédibilité en ce qui concerne les RAR, parce que nous ne sommes pas capables d’identifier les entreprises qui doivent; et les montants dus. Pour ce faire, nous avons instruit nos services, dans un premier temps, d’assainir le portefeuille des RAR. C’est-à-dire de disposer d’une liste nominative des entreprises qui doivent et la période due, sans considération de la qualité de l’entreprise. Dans un deuxième temps, qu’ils fassent la distinction entre les entreprises actives et celles qui n’existent plus. Après ce point, on identifie celles qui existent et qui ne peuvent pas payer. Ensuite, il faut classer les créances par ancienneté et par origine ; parce que les créances les plus récentes sont faciles à recouvrer. Enfin, nous irons vers l’Assemblée nationale pour demander l’apurement du passif que l’on ne peut pas recouvrer, afin de repartir sur une base saine. Il ne sert à rien de dire que des gens doivent, alors que ces entreprises n’existent plus.
Les RAR ont une histoire qui commence au niveau comptable. Avant, la DGI n’était pas la structure habilitée à recouvrer. Elle faisait les impositions et le Trésor recouvrait. Jusque-là, dans le Code des impôts, il est dit que c’est le receveur général qui est responsable des recouvrements.
Cela signifie que ceux qui sont chargés du recouvrement au quotidien ne sont pas responsables, mais une autre personne qui doit justifier devant la Cour des Comptes les recouvrements. Il y a un dysfonctionnement depuis des années.
Ensuite, au niveau des outils de gestion, l’informatisation de la DGI est récente. Au début, elle n’était pas performante. Lorsque nous avons mis en service un nouveau logiciel en 2013, lors de la migration, il y a eu un problème de mise à jour ; si bien que l’on s’est retrouvé avec des entreprises qui doivent, alors qu’il n’en est rien. Il y a un travail technique à réaliser à ce niveau-là aussi.

Propos recuillis par Elie KABORE et Abdoulaye TAO

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