Economie

Secteur minier : La réforme du cadre légal reste inachevée

 

L’indice de gouvernance des ressources naturelles publié le 28 juin 2017 place le Burkina Faso au 20e rang sur 81 pays évalués, avec une note de 59 points sur 100. Au-delà du rang du Burkina Faso, le rapport met le doigt sur le reste du travail à abattre dans le cadre de la réforme du cadre législatif et réglementaire du secteur minier en cours.
Avant d’aborder les détails de la mise en œuvre de cette réforme, un rappel du contexte s’impose.
Longtemps considéré comme un pays agricole et un pays pourvoyeur de main-d’œuvre, le travail de recherche géologique a mis par la suite en exergue l’important potentiel minier du Burkina. Le gouvernement, de son côté, va légalement encadrer l’activité de recherche et d’exploitation.
Une déclaration de politique et de stratégie minière est adoptée le 17 janvier 1996 avant que la loi n°023/97/II/AN du 22 octobre 1997 portant Code minier ne soit promulguée pour l’opérationnaliser. Le Burkina Faso connaissait ainsi son premier Code minier qui confiait l’essentiel de l’activité minière au secteur privé ; l’Etat se positionnant comme un simple régulateur.
Les investisseurs ont critiqué ce Code, estimant que le régime fiscal et douanier applicable au secteur minier est relativement peu attractif. Le processus de relecture de ce Code a abouti à l’adoption de la loi N°031-2003/AN du 8 mai 2003 portant Code minier au Burkina Faso, considérée comme plus attractive, avec de nombreux avantages fiscaux et douaniers pour les investisseurs, aussi bien dans la phase d’exploration que d’exploitation. Ce Code minier a eu pour effet l’entrée en production industrielle de plusieurs sociétés minières dès 2007.
Depuis 2009, le secteur minier (l’or en particulier) occupe le premier rang des produits d’exportation du Burkina Faso en termes de recettes.
La mise en œuvre de ce Code va révéler des insuffisances sur certains aspects. Autour des sites miniers, les populations manifestent leur insatisfaction sur les retombées issues de l’activité minière. En effet, la seule contribution directe au budget des collectivités par les revenus miniers inscrite dans ce Code de 2003 était le transfert de 20% des taxes superficiaires collectées aux communes minières. Les exonérations fiscales et douanières qui accordent de nombreux avantages aux sociétés minières en phase de recherche et en phase d’exploitation et le système de collecte des revenus ont été décriés par la société civile. A propos des exonérations accordées aux entreprises minières, des abus ont été observés dans la jouissance par des sous-traitants et des exploitants de substances de carrières sur les importations de carburants et de pièces de rechange. Au plan environnemental, des insuffisances ont été constatées dans la restauration des sites miniers.
C’est ainsi que sous la pression de la société civile d’une part et des bailleurs de fonds d’autre part, le gouvernement a été contraint d’entreprendre dès 2010 la relecture du Code de 2003. Cette relecture s’appuie sur la nouvelle politique minière adoptée en octobre 2013 qui se fixe comme orientations la création de conditions favorables à la recherche et à l’exploitation rationnelle et durable des ressources minérales et la maximisation des retombées de l’exploitation des substances minérales au profit de l’Etat et des collectivités territoriales, en utilisant de façon optimale la contribution du secteur minier pour la croissance économique et le développement durable.
L’aboutissement du processus de relecture a été l’adoption, le 26 juin 2015 par le Conseil national de la transition (CNT), du nouveau Code minier. L’adoption de ce Code a été applaudie par la société civile et les bailleurs de fonds, au regard des innovations apportées dans la fiscalité, la protection de l’environnement, le financement de la recherche et du développement local, etc.
Cependant, les montants de l’assiette, les modalités de recouvrement, de la mise en œuvre des mesures de protection de l’environnement, de financement de la recherche et du développement local doivent être déterminés par décret pris en Conseil des ministres et des arrêtés de mise en œuvre. C’est 18 mois après l’adoption de ce Code, c’est-à-dire en fin janvier –début février 2017, que 7 décrets d’application ont été adoptés (Lire encadré). La signature de ces décrets est une étape importante de la mise en œuvre des réformes. Mais il reste encore un long chemin à faire. Premièrement, les modalités de mise en œuvre de certaines dispositions du Code attendent toujours des textes d’application. C’est le cas de la publication des conventions minières dans le Journal officiel, les indemnisations des populations impactées, l’utilisation l’expertise nationale et la promotion de la fourniture locale, etc. Deuxièmement, même la mise en œuvre de certains décrets déjà adoptés nécessite la signature d’arrêtés de mise en œuvre ; comme c’est le cas pour le fonds minier de développement local. Troisièmement, après la mise à disposition de l’ensemble des décrets et arrêtés, l’étape suivante est la mise en œuvre effective par les différents ministères. Pourtant, le Burkina Faso rencontre souvent des difficultés de mise en œuvre de certaines de ses dispositions réglementaires. Des inquiétudes subsistent donc quant à la capacité des structures chargées de la mise en œuvre des réformes. Quel dispositif sera mis en place afin de permettre au service du cadastre minier de rendre accessible l’inventaire actualisé des titres et autorisations octroyés pour permettre un suivi rigoureux de l’exactitude du cadastre ? La mise en œuvre de cette mesure nécessitera, de ce fait, une bonne dose de volonté politique afin de doter le cadastre de moyens techniques et humains.

Elie KABORE


Les 7 décrets d’application signés en 2017

Alors que le Code minier a été adopté le 26 juin 2015, c’est en janvier et février 2017 que seulement 7 décrets d’application ont été signés. Il s’agit des décrets portant :
– Fonds de réhabilitation
– Fixation des taxes et redevances minières
– Gestion des titres et autorisations minières
– Organisation, fonctionnement et modalités de perception par le fonds minier de développement local
– Fonds de réhabilitation et de sécurisation des sites artisanaux
– Organisation, fonctionnement et modalités de perception par le fonds de financement de la recherche géologique et minière et de soutien à la formation sur les sciences de la terre
– Adoption d’une convention minière type au Burkina.

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