L’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP) veut se faire sa propre idée sur les recettes et les charges générées par les activités des trois opérateurs de télécommunications sur le marché national.
Le régulateur de l’activité des télécoms est sur le point de réaliser deux types d’audits chez chacun des opérateurs de communications électroniques titulaire d’une licence individuelle. Il s’agit en l’occurrence de l’Onatel, Orange Burkina et Telecel Faso. L’un des audits porte sur «les comptes» de chaque opérateur et l’autre sur «les systèmes de comptabilité analytique» mis en place par ces opérateurs.
Les comptes se rapportent à l’ensemble des résultats financiers, alors que le système de comptabilité analytique est le système de calcul des différents coûts.
En clair, il s’agit pour l’ARCEP de vérifier non seulement l’exactitude des comptes déclarés par les opérateurs, mais aussi la conformité de la méthodologie qu’ils utilisent dans le calcul des coûts.
L’audit relatif aux comptes va tabler sur plusieurs exercices annuels au niveau de chaque opérateur. Chez Onatel, société privatisée en 2006, la vérification concerne les exercices des quatre dernières années. De 2014 à 2017 inclus. Par contre, pour les deux autres opérateurs, Telecel et Orange, les audits se feront sur les exercices des huit dernières années. C’est-à-dire à partir de 2010 jusqu’en 2017.
Pour mener ce travail de contrôle, le régulateur va s’attacher les services de consultants ou de cabinets possédant une expertise professionnelle confirmée dans les domaines indiqués. Un avis à manifestation d’intérêt a été émis dans ce sens. La phase de recrutement des cabinets est censée être bouclée depuis fin mars dernier.
Pour ce qui concerne l’audit des comptes, les missions essentielles du cabinet se résument, entre autres, à faire pour chaque opérateur «une évaluation du contrôle interne en vigueur», «l’audit de tous les comptes de produits (CA) des réseaux fixe et/ou mobile 2G & 3G», «l’audit des comptes des produits et charges des services d’interconnexion, d’accès ou de partage d’infrastructures, etc.», «l’évaluation de l’incidence des éventuelles anomalies constatées sur le chiffre d’affaires net des charges d’interconnexion et les montants des redevances et contributions payées au titre de sa licence».
Au bout de l’ensemble de ces vérifications, le consultant devrait «faire des recommandations sur les bonnes pratiques». C’est pratiquement les mêmes missions au niveau de l’audit du système de comptabilité analytique.
Le consultant devrait d’abord faire un «audit informatique des systèmes de comptabilisation des coûts conçus par chaque opérateur». Ensuite, il va procéder à «l’analyse des caractéristiques de la méthodologie utilisée et leur conformité avec la réglementation et les meilleures pratiques internationales».
Un autre travail très important est «l’analyse de tous les retraitements permettant le passage de la comptabilité générale à la comptabilité analytique».
Lors de la phase de recrutement du consultant, aucun délai n’avait été indiqué concernant la réalisation de ces travaux d’audit. Toutefois, ils sont prévus dans le cadre des activités et de l’exercice budgétaire 2017 de l’ARCEP.
Karim GADIAGA
Une volonté de lever les doutes
Si ce travail d’audit des comptes des opérateurs entre dans le cadre des missions réglementaires de l’ARCEP, on ne peut cependant s’empêcher de lier l’opportunité de la faire maintenant avec les ambitions financières actuelles du Burkina. Dans le cadre de la mise en œuvre du PNDES, financé à 64% par des ressources internes, le gouvernement est en pleine phase de mobilisation des finances.
Or, les télécoms constituent l’un des secteurs perçus comme «prospère, mais dont les gains ne sont pas suffisamment maitrisés et taxés». Reçu en septembre 2016 comme invité du Club de L’Economiste du Faso, Adama Badolo, DG des Impôts, était allé dans ce sens. «C’est vrai que le secteur des télécoms et le secteur minier sont ceux face auxquels on a comme un sentiment d’impuissance parfois pour maitriser les opérations qui s’y passent. «Ils ont beau vous dire qu’ils sont corrects, tant que vous n’avez pas la preuve qu’ils sont corrects et que vous n’avez pas les moyens de le savoir, vous estimez donc quelques fois que ce n’est pas sûr », avait confié le DGI Adama Badolo.
«Les appels téléphoniques classiques sont assujettis à la TVA, mais notre difficulté est que les gens ne déclarent pas tout. Il semble qu’ils ne déclarent pas tout. On n’arrive pas à connaitre le chiffre d’affaires lié à ces appels et surtout les transactions qui se font entre les opérateurs de téléphonies. On ne dispose pas des moyens technologiques pour tracer l’ensemble des opérations, comme la nouvelle activité qui est le transfert d’argent. On ne maitrise pas», avait-il ajouté. Ces situations expliqueraient-elles ces audits à venir du régulateur du secteur?