On a eu la chance de rencontrer issiaka Hébié, responsable des programmes chez APROSSA qui est une association nationale œuvrant pour promotion de la sécurité et la souveraineté alimentaire au Burkina Faso. D’abord antenne d’Afrique Verte France, elle est autonome depuis 2005.
– Pouvez-vous nous présenter brièvement les programmes de bourses céréalières que vous mettez en œuvre au Burkina Faso et dans la sous-région?
Le principe des bourses céréalières repose sur la mise en relation des acheteurs et des vendeurs de céréales, avec une négociation directe, sans intermédiaire, permettant une baisse des prix. Les bourses ont lieu sur deux jours et prennent place dans toute la sous-région (Côte d’Ivoire en juillet 2016, Sénégal en mars 2016, Burkina Faso en décembre 2015). Elles peuvent attirer jusqu’à 120 participants, pour la plupart organisations de producteurs et grossistes de denrées céréalières. Tout d’abord, nous nous occupons de la collecte des intentions d’offres et d’achats en amont de la bourse. Ensuite, le jour de la bourse, ces mêmes intentions sont déclarées publiquement. Dès que tout le monde est au fait de ce qui doit être acheté et vendu, nous organisons des ateliers de négociations lors desquels les acheteurs et les vendeurs se retrouvent face à face et élaborent des précontrats s’ils se mettent d’accord sur une transaction. Enfin, en aval de la bourse, APROSSA s’occupe du suivi des contrats.
– Quel est selon vous l’effet de ces bourses en termes d’inclusion financière des paysans au Sahel ?
L’un des principaux problèmes en termes d’inclusion financière est l’accès aux céréales dans les zones déficitaires des populations ayant des revenus faibles et dont l’accès aux marchés est difficile. Or, les bourses permettent de faciliter cet accès aux céréales en rapprochant offre et demande. La présence de plusieurs acteurs au même endroit et au même moment tire les prix vers le bas en améliorant le pouvoir de négociations des acheteurs (producteurs) qui ont plus de choix et en supprimant les intermédiaires. De plus, ces bourses permettent aux producteurs de tisser un réseau qu’ils peuvent par la suite mobiliser quand ils le souhaitent.
Par ailleurs, les organisations de producteurs, qui participent à la bourse, font souvent une demande de prêts de campagne en amont de la bourse. APROSSA facilite l’accès aux crédits, via des protocoles d’accord avec des Instituts de micro-finance (IMF), en période de commercialisation (de décembre à mars). Ces prêts de campagnes sont spécifiques aux organisations de producteurs, d’une durée de 10 mois, ils sont remboursables en un paiement unique (ou deux selon les montants) en fin de commercialisation des produits, à un taux variable entre 10 et 15%.
– Auriez-vous des recommandations à faire pour une meilleure inclusion financière des acteurs du monde rural ?
Actuellement, les taux d’intérêt sont encore trop élevés pour les producteurs. Il en va de même pour les prix des produits d’assurance. De plus, les crédits ne sont pas disponibles à temps du fait d’un traitement souvent trop long des dossiers. Il faudrait encourager les IMF à s’installer en milieu rural. Mais on constate tout de même quelques efforts, notamment de la part de la Coris Bank qui développe son réseau en zones rurales et de la Caisse populaire qui a revu à la baisse le taux du crédit warranté.