Sur le dossier Tambao, la commission d’enquête parlementaire a auditionné des anciens ministres des Mines et des personnes ressources.
Il ressort de ces auditions que la gestion du titre de Tambao a connu de nombreux épisodes. Nice Group International (NGI), qui s’est vu retirer l’exploitation au profit de PAN African, a assigné l’Etat du Burkina Faso devant les tribunaux internationaux. Le Burkina Faso a été condamné à lui payer environ 15 millions de dollars US (plus de 8 milliards de FCFA). Comment en est-on arrivé là ?
Salif Kaboré était ministre des mines au moment où le contrat de NGI a été rompu au profit de PAN African. Après cet épisode, il a, au nom de l’Etat burkinabé, signé un accord transactionnel avec le directeur général dont les termes n’ont pas été respectés. La société a donc été obligée de poursuivre le Burkina pour non-respect de ses engagements. Le Chambre internationale de commerce de Paris a condamné le Burkina Faso à payer cette somme. La commission d’enquête parlementaire qui a eu accès à des documents relatifs à cet accord transactionnel et à la sentence arbitrale se pose la question sur la qualité et l’habilitation de Salif Kaboré, signataire pour le Burkina Faso, puisqu’en de telles circonstances l’autorisation ou l’approbation du ministre chargé des Finances était indispensable. Cela dénote d’une mauvaise gouvernance dans le traitement du dossier Tambao, selon la commission.
Par ailleurs, PAN African, actuel gestionnaire de Tambao, n’a toujours pas honoré les engagements contenus dans l’Accord-cadre de Partenariat public-privé (PPP), notamment ceux relatifs au chemin de fer Kaya-Dori-Tambao et la route Dori- Tambao, selon la commission (voir également article page 10).
La commission a, pour ce faire, recommandé d’annuler l’Accord-cadre de Partenariat public-privé avec Pan African sur la base d’un audit juridique qui constate les manquements aux obligations de cette compagnie. Elle invite le gouvernement à vider les contentieux juridiques par des provisions pour règlement de litiges et solliciter une assistance juridique appropriée afin de garantir la crédibilité de l’Etat. Les députés recommandent au gouvernement d’envisager éventuellement un nouvel opérateur qui garantisse le caractère intégré de l’exploitation de la mine de Tambao qui comprend la construction du chemin de fer, le bitumage des routes et l’exploitation du manganèse.
Enfin, la commission invite le gouvernement à « engager la responsabilité du ministre chargé des Mines d’alors, dont la mauvaise gestion a conduit à la condamnation du Burkina Faso au paiement de dommages et intérêts d’au moins 15 millions de dollars US, et à un risque évident d’un autre procès ».
Elie KABORE
Calcaire de Tin Harassan : Des doutes existent sur les permis octroyés
Le site de calcaire de Tin Harassan constitue un important potentiel minier non valorisé. Sa valorisation serait d’un grand apport pour l’économie nationale, puisqu’il constitue la matière première pour de nombreuses cimenteries de notre pays. Le site a été morcelé en 5, en mai 2013, par un Conseil des ministres, et a fait l’objet d’attribution de permis de recherche pour 2 sites à DIAMOND CEMENT en 2013. Un des permis de recherche à CIMFASO a été délivré le 31 décembre 2015 au moment où le Burkina Faso n’avait pas de gouvernement et 2 permis de recherche à CIMASSO délivrés le 1er juillet 2016.
La commission note que les 3 bénéficiaires de ces titres sont des cimenteries. Elle se pose la question de savoir si cela ne crée pas une situation de concurrence déloyale vis-à-vis des autres cimenteries de la place ? C’est la raison pour laquelle elle recommande de réexaminer ces attributions au regard des règles de la concurrence, et cela conformément aux textes nationaux et internationaux.
Poura : une mine à rebondissements
La mine d’or de Poura dispose d’une réserve de 15 tonnes d’or et demeure stratégique pour l’Etat burkinabè. Entre 1996 et 1998, des fonds d’un montant de 7 milliards de FCFA auraient été alloués par l’Union européenne dans le cadre d’un projet de relance de la mine de Poura dénommé projet SYSMIN. Des soupçons de mauvaise gestion de ce fonds auraient été rapportés à la commission.
Pour ce faire, elle recommande au gouvernement de vider tous les contentieux relatifs à l’exploitation de la mine de Poura et d’accélérer sa réouverture, de diligenter une information administrative sur la clôture du projet SYSMIN mis en œuvre de 1998 à 2003.
Les propositions de résolutions et de recommandations formulées
Au terme de son analyse, la commission a fait des propositions de loi, des résolutions et des recommandations.
Au titre des propositions de loi, la commission propose que, d’ici à fin juin 2017, les conventions minières soient désormais discutées puis ratifiées par l’Assemblée nationale. Une autre proposition de loi porte modification du Code de travail. « Cette loi devrait régler les questions de l’emploi, préciser les conditions d’externalisation de la gestion du personnel, des transferts de compétences, du recrutement du personnel des sociétés minières, des heures supplémentaires, de la promotion de l’emploi et des conflits de travail », selon le rapport. Il propose d’introduire dans la proposition de loi des dispositions relatives à un conseil de prud’hommes avec des délais fixes pour tout conflit de travail. La 3e proposition de loi vise à autoriser le prélèvement de 5% par an des recettes fiscales minières à déposer dans un fonds pour les générations futures. La dernière proposition ou projet de loi porte sur la commercialisation de l’or au Burkina Faso et la mise en place d’une centrale d’achat et d’exportation de l’or.
Au titre des résolutions, elle propose la mise en accusation d’un ancien ministre en charge des Mines de 2005 au 30 octobre 2014, relativement au dossier Tambao, la mise en place d’un comité parlementaire pour le suivi des résolutions et recommandations. La commission recommande au Parlement de conduire une mission d’information sur la réglementation des fondations minières, la mobilisation des fonds effectuée à l’extérieur et au Burkina Faso pour le financement de leurs activités et la gestion desdits fonds.
Au gouvernement, les députés recommandent « d’entamer une action diligente (au plus tard le 31 décembre 2016) de recouvrement, d’une part, au profit du Fonds de préservation et de réhabilitation de l’environnement à hauteur de 14.840.758.312 FCFA et le placement dudit Fonds auprès du trésor ou de la BCEAO et, d’autre part, des dividendes dus à l’Etat ». Elle recommande également le retrait du permis d’exploitation de Tambao à Pan African Tambao et la création d’une Société de patrimoine des mines du Burkina Faso rattachée au Premier ministère et sous le contrôle annuel de l’Assemblée nationale qui garantira un système de suivi des dividendes dus par les sociétés minières à l’Etat, ainsi que les décisions d’investissement et le recouvrement. o