Les députés du Burkina Faso ont présenté le 13 octobre dernier le rapport de la commission d’enquête parlementaire sur le foncier urbain à l’Assemblé nationale. Ce rapport a fait le point des lotissements effectués de 1995 à 2015 dans les grandes agglomérations urbaines, notamment Ouagadougou et Bobo-Dioulasso.
Après 90 jours d’enquête, plus de 300 acteurs de la chaine du foncier ont été auditionnés et 15 communes du Burkina Faso inspectées, avec plusieurs irrégularités ressorties dans le rapport. Ce sont au total 105.000 parcelles qui sont irrégulièrement occupées à la fois par des promoteurs immobiliers et des particuliers, lors des lotissements.
En ce qui concerne les promoteurs immobiliers, l’occupation illégale concerne en particulier 3 sociétés appartenant à Alizéta Ouédraogo. Ce sont les sociétés Satmo, AzimMo et Socogib.
En ce qui concerne l’entreprise Satmo, le rapport ressort une occupation illégale de 8.000 parcelles dans le quartier de Ouaga 2000.
Sur le site de Yagma, la Socogib occupe 60.000 parcelles sans autorisation. Même cas pour la zone de Nioko 2 où la même société occupe plus de 20.000 parcelles. En ce qui concerne les cités AzimMo, la promotrice a acquis les terrains au prix de 2.500 FCFA le m2, mais les a revendus à 70.000 FCFA le m2. C’est au total 170 parcelles qui sont concernées, pour la somme de plus de 3,57 milliards de FCFA, encaissée à travers la banque de l’Habitat.
La Socogib a également revendu à la banque de l’Habitat 124 parcelles à 110.000 FCFA le m2, soit une somme totale de 7,38 milliards. La société AzimMo a également vendu à la banque de l’Habitat 865 parcelles dans le cadre de la construction d’une cité à plus de 14,85 milliards. Au total, pour les deux sociétés que sont AziMmo et Socogib, plus de 25,81 milliards devraient être encaissés. D’autres irrégularités ont été constatées dans le règlement des droits et taxes des sociétés immobilières, évalués à plus de 16 milliards de FCFA de pertes pour l’Etat. En ce qui concerne les opérations de lotissements, de nombreuses irrégularités ont été constatées. Il s’agit du morcellement de nombreux espaces verts.
A Bobo-Dioulasso, c’est au total 592 parcelles qui ont été dégagées par ces morcellements. A Ouagadougou, le nombre est de 642 parcelles. De nombreux cas de distributions illégales de parcelles à des personnalités ont été mentionnés dans le rapport.
Dans la commune de Ouagadougou, c’est au total 95.137 parcelles qui sont occupées de manière illégale. A Bobo-Dioulasso, le résultat est de 6.297 parcelles. A Koudougou, il a été dénombré 1.198 parcelles dans le même cas. Les 15 communes inspectées ont chacune des cas d’occupations illégales de parcelles. Cette enquête permet de tirer la sonnette d’alarme quant au problème du foncier au Burkina Faso. De nombreuses populations ont été dépossédées de leurs terres au profit d’une minorité et n’ont jamais été dédommagées.
Selon les députés, cette enquête a pour but de rétablir la justice au niveau du foncier au Burkina Faso, afin de résoudre un tant soit peu les inégalités sociales. Plusieurs recommandations ont donc été faites dans ce sens, avec des projets de loi qui devraient valider ces recommandations. L’Assemblée nationale a souhaité que le relais soit pris par l’Etat burkinabè pour une inspection de toutes les communes du pays où il existe forcement d’autres cas d’irrégularités.
Germaine Birba
Quelques recommandations
– L’octroi d’un délais d’un an supplémentaire aux promoteurs immobiliers disposant de sites non mis en valeurs dans le délai légal de 5 ans, à l’issue duquel l’Etat pourrait retirer lesdits terrains.
– Faire le point de toutes les autorisations accordées pour la promotion immobilière en vérifiant le niveau d’aménagement, de viabilisation et de réalisation des équipements contenus dans le projet immobilier.
– Exiger la mise en valeur intégrale dûment constatée avant toute nouvelle acquisition de sites.
– Le déclassement des réserves administratives occupées par des personnes physiques ou morales de droit public ou privé pour des motifs d’intérêt général (lieu de culte, enseignement, santé).
– Le retrait de 3.612 parcelles irrégulièrement attribuées dans le cadre de l’extension du lotissement sans autorisation, faite au secteur 29 de Bobo-Dioulasso.