Société-Culture

«Relations sentimentales, une question de qualité» Docteur Daouda Kouma

A l’image de nombreux pays dans le monde, le Burkina Faso n’échappe pas au phénomène de divorces qui détruit les couples. Cette situation s’explique par de nombreuses causes. Pour en parler, L’Economiste du Faso s’est entretenu avec Docteur Daouda Kouma, psycho-sociologue. Qu’est-ce qui explique le fort taux de divorces, les conséquences qui en découlent et les solutions préconisées aux couples en difficulté. Le psyco-sociologue répond à toutes ces questions, sans tabou.

– L’Economiste du Faso: Qu’est-ce qui explique le fort taux de demandes de divorce dans nos sociétés ces dernières années?
Docteur Daouda Kouma: Traditionnellement et juridiquement, trois causes peuvent donner lieu à un divorce. La séparation au-delà d’une année, les violences physique ou morale entre les époux et l’adultère. La modernité a une part de responsabilité dans les divorces de nos jours. Ni monsieur ni madame n’a le temps à cause du boulot. Il n’y a donc plus de dialogue. Les problèmes sont reportés sans cesse. L’occupation professionnelle est prédominante. Un autre problème est l’une des causes des divorces de nos jours. Les mariages sont précoces. Les couples ne prennent plus le temps de se connaitre vraiment. Les gens se marient pour l’image sociale. La première venue est la bienvenue. Si l’avant-mariage a été mal préparé, assez souvent cela donne des conséquences rapides et désastreuses. Un constat .De nos jours, ce ne sont plus les hommes qui demandent le divorce, mais plutôt les femmes. Cela découle du fait qu’il y a un effet pervers de l’émancipation de la femme. Beaucoup de femmes n’ont pas compris ce que c’est que le genre.
Le genre, c’est la complémentarité. La femme doit s’autonomiser certes, mais l’autonomisation ne veut pas dire être indépendante, se suffire à soi-même. Ce n’est pas parce qu’une femme a les moyens de se prendre en charge qu’elle doit se passer de l’homme et prendre son indépendance pour un oui ou pour un non. Il y a eu une certaine autonomisation qui a été mal appréhendée. Les mariages par intérêt existent également. Heureusement, nous n’en sommes pas encore arrivés au stade où comme, en Occident, les hommes et les femmes se marient pour des calculs économiques.
De plus, l’infidélité s’est accentuée de nos jours avec le stress grandissant. Toute chose qui favorise les ruptures, car si l’amour n’est pas solide, l’un ou l’autre bascule facilement dans l’infidélité et c’est le début des problèmes.

– Quelles sont les conséquences du divorce?
Le divorce a de lourdes conséquences, tant au niveau humain, économique qu’affectif. En ce qui concerne les conséquences humaines, il y a la rupture des liens entre les familles unies. Le mariage est une alliance entre les familles. Le divorce étant considéré dans nos sociétés comme un échec, le plus souvent cela impact les relations entre les familles concernées et entraine parfois l’isolement social des divorcés qui se referment sur eux-mêmes. Le divorce a également de nombreuses conséquences économiques.
Quand le régime de mariage est le bien commun, les conséquences sont souvent très lourdes. Comment faire le partage des biens, surtout quand le divorce n’est pas à l’amiable? Les biens sont séparés en deux et certains n’arrivent plus à se retrouver financièrement, et c’est parfois la désolation ou la ruine. Les dettes s’accumulent et c’est la guerre entre les ex-conjoints. Tous ces problèmes impactent la sérénité au travail, les enfants qui sont fragiles et peuvent conduire à une détérioration de l’affectivité. Après le divorce, certaines personnes ont besoin d’un suivi psychologique, car déprimées. Elles perdent leur estime de soi et sont parfois tentées de se suicider.

– Quelles sont les solutions que vous préconisez pour solidifier les couples et éviter les divorces?
Avant, les parents s’activaient pour sauvegarder le couple. L’implication des familles contribuait à maintenir les couples. Mais de nos jours, les problèmes de couple restent en couple. La famille n’est impliquée que lorsque les problèmes sont au stade critique. Dans les sociétés traditionnelles, il y avait des interventions et des prises en charge sociale pour éviter qu’on aille jusqu’au divorce. Il y avait des médiations pour essayer de ramener les couples à la raison. De nos jours, l’individualisme est très poussé. On a de plus en plus de familles nucléaires, au point que même les témoins de mariage deviennent des figurants et ne jouent pas leurs rôles réels. Le grand rôle du témoin, c’est après le mariage. Une fois scellé, ils devraient intervenir pour résoudre les conflits et conseiller. Il n’existe pas de vie de couple sans conflit. Il faut donc que les couples s’arment pour surmonter ces conflits. Les témoins de mariage ne doivent plus être de belles images pour aspect marketing. Ils doivent jouer le rôle de tampon. Si nous n’y prenons garde, les jeunes ne vont plus se marier, car ils s’inspirent des plus âgés. Les hommes doivent faire beaucoup d’efforts, car il n’existe pas de couple sans histoire. Il faut donc s’armer pour supporter les problèmes et garder à l’esprit que la relation sentimentale n’est pas une question de quantité mais de qualité. Il faut savoir mettre à profit pour sa famille le peu de temps dont on dispose.

Entretien réalisé par Germaine BIRBA


Divorce ou conflits d’intérêt

La modernité est devenue un frein à la consolidation des couples. Le temps consacré à chercher de l’argent surplombe le temps accordé à la famille. Les conséquences sont parfois irréversibles. Le divorce fait alors place à des conflits d’intérêt où chacune des parties veut tirer un maximum des acquis du couple. Cette situation crée de nombreux conflits, car le partage des biens n’est pas toujours chose évidente.

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