Comme l’a annoncé le président Roch Kaboré dès sa prise de fonction, les questions sensibles entre la Côte d’Ivoire et le Burkina, notamment les dossiers judiciaires, sont aujourd’hui sur la voie d’un règlement diplomatique. Après les moments de suspicion et de méfiance entre les deux voisins pendant la période de la transition au Burkina, le président Kaboré, tout comme son homologue ivoirien, avait affiché son intention de réchauffer les liens d’amitié et de coopération.
Cette volonté avait non seulement été exprimée dans des déclarations, mais aussi dans des actes et des symboles. Accompagné par une vingtaine de ministres du gouvernement de Côte d’Ivoire, notamment ses plus proches et très influents ministres, Alassane Ouattara avait assisté à l’investiture de Rock Kaboré le 29 décembre 2015 à Ouagadougou. Par la suite, les deux présidents s’étaient encore rencontrés en fin janvier 2016 à Adis Abeba à l’occasion du sommet de l’Union africaine. En marge de sa présence à l’investiture, le président ivoirien et sa suite avaient rendu symboliquement une visite de courtoisie au Moro Naaba Baongo, chef des Mossis et très respecté par tous les Burkinabè.
Prenant la parole au nom du président Ouattara, le ministre Hamed Bakayoko avait expliqué, à l’occasion de cette visite, que le chef de l’État de Côte d’Ivoire est venu avec une forte délégation pour présenter ses civilités au Moro Naaba. «Les liens historiques entre nos deux pays sont très forts. Le président Ouattara s’emploiera à les renforcer davantage», avait-il déclaré devant l’empereur.
Malgré ces expressions de bonne foi, le mandat d’arrêt lancé par la justice burkinabè contre Guillaume Soro, président de l’Assemblée nationale de Côte d’Ivoire, empêchait l’installation totale d’un climat de sérénité. Désormais «cet obstacle» est levé. D’abord annulé au motif «de vice de procédure», la justice militaire vient d’indiquer que le mandat ne sera pas réintroduit. Le Burkina opte désormais pour «la dénonciation» qui laisse à la Côte d’Ivoire la latitude de poursuivre ou non son ressortissant. Le cas Guillaume Soro ayant été résolu, le Burkina a dépêché le 31 mai dernier une mission spéciale composée du président l’Assemblée nationale, deuxième personnalité de l’Etat, et des ministres du gouvernement pour aller rencontrer le président ivoirien et rétablir la confiance. Comme pour dire: «Il n’y a plus de nuage et nous sommes disposés à relancer nos relations». Les relations sont notamment fortes sur le plan économique. L’actuel pouvoir du Burkina a beaucoup besoin de la Côte d’Ivoire pour amorcer son programme économique. La mission ne s’en est pas caché d’ailleurs. «Nous avons demandé au président Ouattara de nous soutenir pour la relance de l’économie de notre pays», a déclaré Salifou Diallo à sa sortie d’audience avec le président ivoirien. «Nous avons abordé le renforcement des relations entre les deux pays. Nous avons convenu de reprendre la préparation du sommet du traité d’amitié et de coopération qui est prévu pour fin juillet, à Yamoussoukro», a indiqué, de son côté, Alassane Ouattara.
Désireux de trouver des solutions à ses préoccupations économiques, le Burkina est presque obligé de ranger les griefs portés par les dossiers judicaires. Une sorte de réalisme qui ne fait pas l’unanimité au sein des Burkinabè, mais qui est censée sauver les intérêts du pays.
Joël BOUDA
Sauver l’économie à tout prix
Pratiquement un semestre après son installation, le régime du président Kaboré n’a véritablement pas encore réussi à relancer l’économie du pays. La raison principale est que le pouvoir actuel doit d’abord mobiliser des moyens pour financer le Plan national de développement économique et social (PNDES), qui est le référentiel. Référentiel dont la rédaction doit être achevée bientôt. Par ailleurs, le Traité d’amitié et de coopération ivoiro-burkinabè (TAC), une sorte de duo gagnant/gagnant, est resté bloqué. Pourtant, le TAC prévoit d’importants projets structurants qui sont censés profiter à l’économie burkinabè. En essayant de renouer la confiance avec la Côte d’Ivoire, le Burkina veut non seulement la reprise des activités du TAC et aussi le soutien du président ivoirien à la table ronde des bailleurs de fonds pour le financement du PNDES.