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Entreprises sinistrées : Le silence du gouvernement 20 mois après

 

Selon un inventaire dressé par la Chambre de commerce et d’industrie au lendemain de l’insurrection populaire de fin octobre 2014, c’est au total 106 entreprises sur l’étendue du territoire qui ont été sinistrées lors des manifestations.
Sur ce nombre, 63% ont été recensés à Ouagadougou. Les entreprises ont été, à des degrés différents, victimes d’actes de saccages et de pertes de matériel. Ce qui a occasionné pour certaines une fermeture définitive ou prolongée et pour d’autres un ralentissement des activités.
Au-delà des propriétaires qui ont subi un coup dur, l’onde de choc a également été ressentie sur l’économie nationale, voire sur le plan social. En effet, le nombre d’emplois perdus ou affectés du fait de la situation avait été estimé à 7.300 dès les premiers moments.
Que deviennent les entreprises sinistrées quelque 20 mois après l’insurrection ? La situation s’apprécie au cas par cas. Il y a celles qui ont réussi à se relever, même si certaines traînent encore les stigmates de la crise, et celles qui sont encore à genoux.
Celles qui ont pu se relancer sont les moins touchées ou celles qui disposaient d’une bonne assise. Dans ce cas, il y a des établissements comme Marina Market, Watam SA, Coris Bank, Ebomaf, Ludic Lydia et autres.
Les autres végètent en attendant de retrouver leur dynamisme d’antan.
Les entreprises qui sont restées fermées depuis l’insurrection sont celles qui ont été très durement touchées, avec des taux de sinistralité qui se situent au-delà de 90%.
Parmi ces dernières, les cas d’Azalaï Hotel Indépendance, de Joly Hôtel ou de Tan Aliz SA sont emblématiques. Ces entreprises ont été totalement défigurées.
A quand la reprise des activités dans ces établissements sinistrés ? Difficile d’y répondre ou de trouver quelqu’un qui se prononce sur cette question. Les propriétaires des entreprises concernées sont introuvables. Seuls des anciens travailleurs que nous avons pu joindre expriment «l’oubli» dont ils semblent être l’objet et surtout «l’absence d’informations sur l’état d’évolution de la situation».
Du côté du gouvernement, c’est le silence. Aucun projet de soutien ou de relance des entreprises sinistrées lors de l’insurrection populaire de fin octobre 2014 ne semble à l’ordre du jour.
A-t-on oublié les entreprises sinistrées ou bien c’est un sujet qui n’intéresse pas le gouvernement ? On s’interroge.
Non seulement les entreprises contribuent au rayonnement de l’économie nationale, mais elles participent aussi à la création d’emplois. Des arguments qui militent pour que l’Etat puisse aider les entreprises affectées par l’insurrection populaire à se remettre de cette dure épreuve.
Sous le régime de la transition, on y avait pensé. Mais la principale préoccupation était de définir la forme de ce soutien à apporter.
De quoi ont-elles besoin, chacune, pour que le coup de pouce éventuel soit efficace? Par ailleurs, l’on se demandait encore si toutes les entreprises touchées devaient être traitées de la même manière.
En effet, chaque entreprise sinistrée ne s’est pas retrouvée dans cette situation pour les mêmes raisons. Il y a celles qui ont été clairement condamnées par l’esprit punitif des insurgés pendant les journées chaudes. D’autres sont tout simplement des victimes plus ou moins collatérales.
De ce fait, certains cas restaient délicats à traiter dans une période où l’émotion de l’insurrection était encore présente et où certains esprits restaient encore en ébullition.
Mais à présent, le Burkina s’est remis sur le chemin de la démocratie en traçant pour le nouveau régime des sillons par lesquels on devrait aboutir à la résolution des préoccupations du peuple, créant ainsi les conditions de la réconciliation nationale.
La question des entreprises sinistrées reste non seulement une préoccupation pour la relance de l’économie nationale, mais aussi un enjeu pour une réconciliation qui repose sur la justice.

Karim GADIAGA


Question délicate ?

La question des entreprises sinistrées a été évoquée dans plusieurs cadres de discussions sous la transition. Mais toutes les structures qui ont eu à travailler sur le sujet ont soigneusement évité d’aborder le volet dédommagement. Jusqu’au rapport de la Commission de réconciliation nationale et des réformes (CRNR), les différents traitements du dossier des entreprises sinistrées se sont limités à dresser un inventaire de la situation sans évoquer la réparation.
L’étude de la Chambre de commerce n’avait pas proposé une formule de dédommagement. Pareil pour le Comité ad hoc, qui a été chargé de faire le point sur les atteintes aux droits humains au cours de l’insurrection. Le Comité ad hoc avait surtout choisi d’esquiver le chapitre en recommandant sa prise en compte par la CRNR.
La CRNR a déposé son rapport le 14 septembre 2015. La question des entreprises sinistrées y a été étudiée, mais n’a pas été définitivement tranchée. La Commission a seulement proposé d’étudier la situation au cas par cas. La balle est désormais dans le camp du gouvernement.

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