La 19e Journée nationale du paysan (JNP) s’est tenue à Tenkodogo dans la province du Boulgou (Région du Centre-Est) du 28 au 30 avril 2016 sous le thème: «Agriculture et lutte contre le chômage: développer et soutenir l’entrepreneuriat agro-sylvo-pastoral, halieutique et faunique pour l’insertion socio-économique des jeunes». Cependant, à l’issue des réflexions, le constat qui ressort est que de nombreuses difficultés empêchent l’insertion socio-professionnelle des jeunes dans le tissu agricole.
Les activités primaires sont considérées comme les principales sources de croissance économique du Burkina Faso selon le Recensement général de l’agriculture (RGA) de 2008. Il ressort que 40% du Produit intérieur brut (PIB) sont issus des activités que sont l’agriculture (25%), l’élevage (18%) et la foresterie et la pêche (3%). Constatant aussi que 66% de la population burkinabè est âgée de moins de 25 ans, le gouvernement burkinabè a décidé d’impliquer cette jeunesse dans la lutte contre le chômage à travers leur intégration dans le tissu agricole en soutenant l’entrepreneuriat. C’est ce qui justifie le thème de la 19e édition de la Journée nationale du paysan (JNP) 2016 qui a eu lieu à Tenkodogo. Les acteurs du monde paysan ont réfléchi donc à travers des fora régionaux sur la thématique afin de dégager des pistes de solution pour permettre aux jeunes de devenir des entrepreneurs. Ce qui permettra de réduire le taux de chômage au Burkina Faso qui est de 2,3% selon les résultats du Recensement général de la population et de l’habitation (RGPH) de 2006.
Des contraintes à l’entrepreneuriat agricole des jeunes
Plusieurs handicaps freinent l’entrepreneuriat des jeunes selon les rapports des différents fora régionaux en prélude à la JNP 2016. Les principales contraintes sont d’abord d’ordre institutionnel et législatif. Il s’agit sur ce point de l’instabilité institutionnelle, des difficultés liées à l’application des textes, à la planification et à la mise en œuvre des projets et programmes.
En plus de cela, les jeunes se heurtent à des contraintes d’ordre financier comme l’accès au crédit, car seulement 8% des producteurs y ont accès, une insuffisance d’accompagnement des initiatives économiques des jeunes mais aussi des femmes, l’inadaptation des conditions d’octroi des crédits et l’absence des produits financiers adaptés au secteur rurale. Ce qui ne facilite pas un accès aux facteurs de production, aux analyses en laboratoires aux coûts élevés. En outre, la jeunesse doit faire face à des contraintes d’ordre socio-culturel. Les acteurs regrettent l’absence de culture entrepreneuriale chez les jeunes, l’insuffisance d’expérience en entreprise, le taux d’analphabétisme élevé au Burkina et la méconnaissance de l’entrepreneuriat agricole, sans oublier les pesanteurs socio-culturelles, etc.
Des opportunités à saisir
Tous ces handicaps sont complétés par des difficultés que rencontrent l’ensemble des acteurs du monde agricole, comme le souligne Naba Seydou Ouédraogo, le président de la Chambre d’agriculture du Burkina: «Un diagnostic du secteur relève par ailleurs la faible productivité dans les exploitations, la faible valorisation des produits, la faible capacité d’investissement et savoir-faire basés sur les technologies rudimentaires ».
Il faut compter aussi avec les caprices climatiques. «Nous devons moderniser notre agriculture. Nous ne pouvons pas continuer à cultiver à la daba et penser pourvoir nourrir le Burkina Faso. Cela veut dire une meilleure organisation, une meilleure sélection des semences, de meilleurs moyens matériels, notamment des tracteurs pour permettre à nos agriculteurs de cultiver de plus grandes superficies», a relevé le président du Faso, Roch Marc Christian Kaboré, qui a reconnu que l’agriculture et l’élevage sont la base de l’économie burkinabè. Pour les autorités burkinabè, l’atteinte de la mission d’insertion des jeunes dans le tissu agricole passe par la création de petites et moyennes entreprises en leur faisant comprendre qu’il n’y a pas de sot métier.
C’est pourquoi Roch Marc Christian Kaboré estime qu’il faut mettre en place les infrastructures afin que ces jeunes puissent trouver des emplois et en créer aussi. Toutefois, ce ne sont pas les potentialités qui manquent dans le domaine, de la production à la commercialisation en passant par la transformation des produits fruitiers, céréaliers, de la volaille, etc.
La principale attente des acteurs est l’amélioration du cadre de développement de l’entrepreneuriat au profit des jeunes avec notamment l’application de la loi 034 (2002, 2009, 2012) portant sur le foncier rural, le pastoralisme, la réforme agraire et foncière. Le président de la Confédération paysanne du Faso (CPF), Bassiaka Dao, lui, souhaite même la création d’un statut de l’agriculteur qui permettra de réglementer le secteur et de mettre en valeur les acteurs. Mais comme l’ont souligné les paysans, chaque année, les mêmes engagements sont pris sans que cela se matérialise sur le terrain.
B O
Les enjeux de la mise en œuvre de la loi portant régime foncier rural
Pour les acteurs de la 19e JNP, le vote de la loi 034 portant sur le foncier rural, le pastoralisme, la réforme agraire et foncière en 2009 présentait un changement, un espoir pour les paysans qui pourront sécuriser leurs terres. Cependant, la nouvelle loi foncière n’est toujours pas appliquée.
Pourtant, cette nouvelle loi qui remplace la Réforme agraire et foncière (RAF) a apporté des innovations. Il s’agit, entre autres, de la répartition des terres nationales entre les 3 domaines (de l’État, des collectivités territoriales et des particuliers), les chartes foncières, la création des structures au niveau communal et villageois , les instances de concertation au niveau communal, la création d’une instance villageoise chargée de régler les conflits, la reconnaissance des droits légitimes des populations, qui donne droit à une attestation de possession foncière…