Economie

Le PM aux syndicats : La transition n’a pas prévu le budget de ses engagements

 

Une rencontre entre les syndicats et un chef du gouvernement, ce n’est pas nouveau. Mais une rencontre entre ces deux structures et sur invitation de la Primature, c’est une première. Le Premier ministre Paul Kaba Thiéba, accompagné des membres du gouvernement et des techniciens, en organisant une rencontre d’échanges avec les responsables syndicaux, a confié qu’il s’agissait pour lui de saluer le rôle joué par le monde syndical lors des deux derniers événements qui ont secoué le pays, à savoir l’insurrection et la résistance au putsch.
D’emblée, le chef du gouvernement se dit prêt à s’inscrire dans le sillage du gouvernement de la transition, à savoir maintenir le dialogue, mais, plus, il voudrait «le développer dans l’intérêt des travailleurs». C’est à la suite de ce préalable que le chef du gouvernement a exposé au monde syndical les enjeux économiques des actions du gouvernement ainsi que quelques actions phares qu’il entend développer.

Redresser la courbe de la croissance
Au-dessus de tout, Paul Thiéba mettra la gouvernance vertueuse à travers la lutte contre la corruption, la fraude et l’impunité. Là-dessus, il a sollicité l’accompagnement du monde syndical dans son combat. Dans le même ordre d’idée, il a informé l’Unité d’action syndicale (UAS) que ses ministres ont déjà fait leurs déclarations de patrimoine et seront très bientôt soumis à un Code d’éthique et de déontologie.
Le PM a en outre rappelé que si le rythme de croissance actuel se poursuit, aucun développement ne sera envisageable dans les prochaines années. Il faudra, selon lui, vite passer à une croissance à deux chiffres.
Les salaires, dira le chef du gouvernement, représentent près de 49,5% des investissements, et avec les mesures prises par le gouvernement de la transition, ce taux pourrait croître à 50%; ce qui est en déphasage avec la norme recommandée dans l’UEMOA qui est de 35%.
Alors, le pays veut développer son capital humain. Paul Thiéba a informé que les secteurs de l’éducation, de la santé et de la formation professionnelle feront l’objet d’une attention particulière : la gratuité des soins d’urgence pour enfants de moins de 5 ans sera très prochainement une réalité. Des propositions sont en cours au ministère de la Santé à propos de facilités pour la santé de la mère. Dans les villages, 16.000 agents communautaires seront recrutés pour conseiller les femmes.
Pour l’emploi des jeunes, les diplômés sans emploi pourront bientôt se déclarer et s’inscrire pour prendre part à une formation de six mois.

Trop d’engagements pris par la transition
Dans la plateforme de l’Union d’action syndicale du 1er mai 2015, 19 engagements avaient été pris par le gouvernement de la transition, 5 ont été mis en œuvre et les 14 autres sont en attente. En plus, les réformes engagées par le gouvernement de la transition engendrent nécessairement des incidences financières.
A titre d’exemple, la relecture de la loi 013 de la Fonction publique aura une incidence de 40 milliards de F CFA, celle sur le statut des magistrats environ 6 milliards; sans oublier la réforme dans les corps des greffiers, des agents du ministère des Affaires étrangères et au Service national de développement (SND). Si le Premier ministre affirme ne pas vouloir renier ces engagements, au nom de la continuité de l’action gouvernementale, il a prévenu: «Que chacun sache ce qu’on peut faire et ce qu’on ne peut pas faire». Il a annoncé un retour à l’Assemblée nationale avec une loi de finances rectificative pour corriger ce qui peut l’être ; le précédent gouvernement n’ayant pas prévu tous ces engagements dans le budget, explique le chef du gouvernement.

Jean De Baptiste OUEDRAOGO


L’exigence minimale du PM

En contrepartie, le chef du gouvernement a invité les travailleurs à «une exigence minimale». La ponctualité et l’assiduité au travail pour les fonctionnaires sont une exigence. En réaction, le président du mois des centrales syndicales, Augustin Blaise Hien, s’est dit satisfait de la démarche du Premier ministre. Pour lui, les choses doivent changer dans ce sens contrairement à certaines époques où les syndicalistes étaient «insultés et considérés comme des trouble-fête».
Le pouvoir, s’il est dans les bonnes dispositions, devrait permettre la liberté syndicale et éviter les sanctions infligées aux syndicats pour des faits de grève, et leur traque à travers la ville. Toute chose que le Premier ministre a estimé inacceptable en affirmant, «nous sommes dans une convergence des idées». Mais, Augustin Blaise Hien précisera que cela ne les empêchera pas de jouer leur rôle qui est de protéger les intérêts moraux et matériels des travailleurs. Chaque fois que les choses n’iront pas dans le bon sens, le gouvernement sera rappelé à l’ordre et «nous n’allons pas nous asseoir et regarder», précisera Augustin Blaise Hien avant de conclure: «Dans tous les cas, notre comportement dépendra de celui du gouvernement». En somme, les deux parties ont rappelé la nécessité de travailler avec responsabilité dans l’intérêt du pays.


Grève des magistrats «On nous a poussés à l’arrêt de travail»

La lutte des magistrats pour la relecture des textes régissant leur fonction ne date pas de maintenant. Entamée depuis 2011, l’horizon reste toujours bouché pour les hommes en robes noires.
Ce qui les a amenés à passer à la vitesse supérieure. Le comité intersyndical avait d’abord annoncé une première grève pour la fin du mois de janvier 2016, puis survinrent les attentats du 15 janvier, obligeant les magistrats à retarder leur mouvement. Le temps est passé et, malgré tout, le gouvernement ne montre pas des signes de vouloir prendre en compte leurs préoccupations. Ce qui a fait dire aux magistrats que «certains des projets de décret ont été sabotés par certains intervenants dans le processus d’adoption, qui ont décidé de prendre sur eux l’inoubliable et triste responsabilité de substituer leur volonté à celle du législateur». Ils pointent du doigt le comité restreint du ministère des Finances, car «c’est là que le travail a été saboté avec la complicité de certains dirigeants de l’époque». Selon les explications des responsables de l’intersyndical, l’indépendance tant souhaitée par le monde judiciaire va de pair avec certaines exigences qui vont du juridique au matériel. Les magistrats estiment avoir toujours montré leur bonne foi jusqu’à ce que des acteurs en décident autrement. En sus, martèle Moriba Traoré, «ils peuvent tout obtenir de nous, sauf faire des courbettes».
La situation ayant même été expliquée à la présidence du Faso depuis l’époque de la transition ainsi qu’au président Roch Kaboré, les magistrats ne comprennent pas que leurs doléances restent toujours en l’état. «Nous sommes sûrs qu’il (ndlr : président du Faso) est au courant, il n’a pas daigné répondre», diront les magistrats. Fort de cela, «on nous a poussés à l’arrêt de travail, parce que le chef de l’Etat sait que nous avons des difficultés», soutient le secrétaire général du SAMAB, Antoine Kaboré. «Nous demandons juste le minimum pour que les magistrats puissent bien travailler», soutient Moriba Traoré. La grève du 24 février au 1er mars 2016 vise à se faire entendre par le gouvernement. Les textes demandés par les magistrats concerneront la revalorisation du statut du magistrat, les échelons, les indemnités qui doivent être revalorisées, l’autonomie financière du pouvoir judiciaire. A la question de savoir si la lenteur ou le refus du gouvernement n’est pas dû aux incidences financières des décrets à prendre, les magistrats indiquent que cette incidence sera d’environ 3 milliards de FCFA. Somme toute, si le gouvernement a pu en quelques mois dépenser des milliards pour un corps donné, celui de la magistrature aussi ne devra pas souffrir de soucis d’argent.

JDBO

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