Paulo Duarte a de l’ambition pour son équipe qu’il retrouve. L’entraîneur des Etalons, on le sait, aime les défis. Dans l’entretien qui suit, il affiche ses priorités, sa méthode rigoureuse de travail et ne fait de la place qu’au talent et à l’humilité.
– L’Economiste du Faso : Comment Duarte a-t-il vécu ces 4 années hors du Burkina qu’il affectionne ?
Paulo Duarte (entraîneur national des Etalons): J’ai souffert de cette longue séparation. C’est un pays que j’adore. J’avais le sentiment d’avoir laissé un travail à mi-chemin, surtout que mon départ n’était normal. Pendant tout ce temps, j’ai continué à suivre le Burkina qui gagne.
– Vous étiez donc toujours très attentif aux différentes prestations des Etalons ?
Bien sûr! J’étais surtout content de la place de finaliste à la CAN 2013. C’est une CAN qui m’a donné raison. On n’a pas eu de résultats lors des deux précédentes CAN, mais elles ont permis aux Etalons de gagner en expérience et en maturité. Plus expérimenté et plus compétitif, le Burkina a imposé son rythme à la 3e CAN, celle de 2013. Malheureusement, j’ai observé que l’équipe a commencé à baisser de forme. Je vois une équipe des Etalons qui a perdu en intensité, en capacité de réaction. Je ne sens plus cet engagement. Je vois une équipe qui n’a pas un collectif aussi comme avant et qui a commencé à prioriser l’individualisme. C’est une équipe qui ne récupère plus la balle.
– Pour la Coupe du monde, vous dites ?
Oui! Je veux faire partie des 24 entraineurs des phases finales de la coupe du monde 2018! Je le veux, le Burkina le veut. Je vais améliorer mon CV, honorer ce pays que j’aime avec une qualification pour la coupe du monde. C’est mon rêve, c’est mon ambition pour le Burkina.
– Cela a des exigences…
Oui ! C’est pour cela que je demande à certains joueurs de revenir sur terre. Je sais qu’ils ont de la qualité, individuellement. Avant, on avait une équipe combattive. Si les joueurs ont progressé individuellement, il reste que le collectif a pris un coup. Avant, c’était une équipe avec moins de qualité et plus de cœur. Maintenant, c’est une équipe de qualité avec moins de cœur. Je veux équilibrer le cœur et le talent, le sacrifice et la capacité individuelle. Cela passe par la discipline et la rigueur.
On gagnait avec moins de talent, avec le cœur et avec l’esprit de groupe. Il faut revenir à cet esprit de groupe et à ce sacrifice, surtout que le talent individuel est là. Il faut redonner à cette équipe l’équilibre mental, physique, psychologique, le tout dans l’humilité. Il faut trouver de la motivation à ce groupe. Il faut chercher à savoir pourquoi les joueurs ont perdu la capacité de souffrir en tant que groupe. Quand je vais rencontrer mon groupe, je vais lui adresser un message clair et direct. Il faut jouer avec rigueur et méthode. On a perdu de tout cela. Nous devons retrouver une tactique de gagneur. On joue trop en retrait à un rythme lent. Il faut juste nettoyer dans la tête, se parler tête-à-tête, poser les problèmes sur la table et faire sentir au joueur qu’il peut et doit se sacrifier pour la nation.
– Quels seront vos critères de sélection, surtout que vous affirmez avoir aidé beaucoup des Etalons actuels à grandir ou à trouver des clubs ?
La discipline est fondamentale pour moi, tout comme le talent. Il y a des joueurs qui ne jouent pas. Mais ce n’est pas parce qu’ils ne jouent pas qu’on doit les couper de l’équipe. Il faut leur remonter le moral, les encadrer. C’est vrai, on ne peut jouer avec beaucoup de joueurs qui ne sont pas titulaires dans leur équipe. Mais il y a toujours un ou deux qui traversent des moments difficiles et qui sont utiles pour le groupe. Un joueur peut être convoqué aujourd’hui et ne pas l’être demain. On a beaucoup de boulot dans un laps de temps, mais il faut y aller. J’aborderai le match contre l’Ouganda avec le groupe qui me semblera conquérant.
– Duarte ne fera donc pas de la place au sentimentalisme, même s’il est ami avec beaucoup de joueurs…
L’amitié à part, le professionnalisme à part. Je fais ma sélection sur la base de la qualité et non sur la base de l’amitié. Si les joueurs sont contents que je sois là, c’est une chose, une autre chose est que je reste professionnel. Je ne mélange pas l’amitié et le professionnalisme. Le cognac, c’est le cognac, le travail c’est le travail.
– Que promettez-vous au public burkinabè le 26 mars 2016 contre l’Ouganda ?
C’est un match très important et qui s’annonce difficile. On jouera contre le premier de notre groupe. C’est un défi que je compte relever. Je dois travailler et dans une ambiance qui n’est pas la meilleure dans le groupe et contre l’Ouganda. Mon objectif est de qualifier clairement le Burkina à la CAN. Cela passe par une victoire le 26 mars prochain.
Propos recueillis par Alexandre Le Grand ROUAMBA
Pourquoi Duarte a-t-il pris le risque
«Je sais que c’est un risque de prendre les Etalons à un moment crucial et j’ai accepté malgré tout. J’ai accepté parce que je connais mes capacités et ma force tactique. J’ai accepté reprendre une équipe que je connais.
J’ai fait grandir la plupart des joueurs qui sont en équipe nationale et je les connais. Je sais que je reprends le Burkina à un moment très difficile. Ce n’est pas moi qui ai créé cette situation, mais cette situation n’est pas seulement imputable à un coach. Les joueurs doivent aussi faire leur examen de conscience pour voir ce qu’ils ont fait de bien et de mal.
Quand on perd, ce n’est pas seulement le coach qui est coupable. Je suis là pour faire de mon mieux pour aider le Burkina à atteindre cet objectif. Je sens que je suis capable de donner au Burkina sa première qualification pour la coupe du monde. A chaque poste, il y aura une doublure avec la même qualité et la saine concurrence va prévaloir. Je veux la même consistance dans tous les compartiments», a déclaré le nouveau sélectionneur des étalons.