Après l’avoir adopté au cours de la session du Conseil des ministres du 25 novembre 2015, le gouvernement a transmis le projet de loi de finances 2016 au Conseil national de la transition (CNT) le 10 décembre 2015.
En transmettant la loi de finances 2016 à cette date au CNT, c’est-à-dire à 3 semaines de la fin de l’année, le gouvernement savait pertinemment que le règlement intérieur du CNT en son article 25 précise: «Tout dossier, devant être examiné au cours de la session, ne pourra être déposé moins de trente jours avant la fin de la transition. Nonobstant les dispositions de l’alinéa ci-dessus, le projet de loi de finances doit être introduit au moins soixante jours avant la fin de la transition».
Le CNT ne pouvait donc pas permettre au Burkina Faso de disposer d’une loi de finances en 2016 avec cette disposition. C’est ainsi que le 12 décembre 2015, les députés du CNT ont adopté une proposition-résolution portant modification du règlement intérieur afin de pouvoir examiner prioritairement le projet de loi de finances gestion 2016.
Pourquoi le gouvernement a-t-il transmis la loi en retard ?
Le gouvernement n’a pas transmis le projet de loi de finances 2016 au CNT de bon cœur. L’élaboration du texte est terminée depuis le mois de septembre 2015 et l’Economiste du Faso, qui en a eu copie, en a publié les grandes lignes.
Cependant, le gouvernement de Yacouba Isaac Zida avait estimé qu’il appartenait au gouvernement élu d’adopter une loi de finances en conformité avec son programme politique sur la base duquel il a été élu. Les députés du CNT ne l’entendaient pas de cette oreille. Las d’attendre le projet de document, le président du CNT a adressé une correspondance au gouvernement pour réclamer le document qui a finalement été adopté le 25 novembre en Conseil des ministres, soit 4 jours avant la tenue des élections présidentielle et législatives. Le gouvernement a fait parvenir le document le 10 décembre 2015 au CNT, 2 semaines après son adoption en Conseil des ministres, sans l’exposé des motifs.
Ce même débat a animé la séance de vote de la résolution le 12 décembre 2015. En effet, pour les uns, il n’est pas indiqué que les députés mettent fin à leur mandat en laissant un vide budgétaire pour le prochain gouvernement. Ce qui va conduire à exécuter le budget 2016, c’est-à-dire effectuer les dépenses et collecter les recettes, par ordonnance. «Lorsque le prochain gouvernement verra que le montant ne correspond pas à ses prévisions, il pourra introduire des lois rectificatives», ont-ils expliqué.
Ceux qui s’opposaient à la modification de cette résolution se sont justifiés en préconisant de reconduire le budget de l’année 2015 en attendant que le Mouvement du peuple pour le progrès (MPP) qui a remporté les élections du 29 novembre 2015 adopte un budget à même de mettre en œuvre son programme de développement.
Le gouvernement de la transition a donné du fil à retordre aux députés de la transition qui tenaient à doter le Burkina Faso d’une loi de finances dès le 1er janvier 2016.
C’est ainsi que dès la réception du projet de loi de finances 2016 le 10 décembre 2015, une conférence des présidents de commissions a été tenue afin d’inscrire le vote de cette loi dans le programme de la législature. A l’issue de cette séance, le vote de la loi de finances 2016 a été programmé pour le 26 décembre 2015, à la veille de la fin de la législature prévue pour le 27 décembre 2015.
En rappel, les prévisions budgétaires dans le projet de loi relative à la loi de finances pour l’exécution du budget de l’Etat gestion 2016, adopté en Conseil des ministres du 25 novembre 2015, indiquent 1.639,826 milliards de F CFA de recettes contre 1.839,411 milliards de F CFA de dépenses. Il se dégage un déficit prévisionnel de 199,585 milliards de F CFA.
Elie KABORE
Et si la loi de finances 2016 n’était pas votée ?
L’article 120 du règlement intérieur du CNT dispose que si le CNT ne se prononçait pas avant l’expiration de l’année budgétaire, les dispositions du projet de loi peuvent être mises en vigueur par ordonnance. Le gouvernement saisit, pour ratification de l’ordonnance, le CNT qui se prononce dans un délai de 15 jours. A l’expiration de ce délai, si le CNT n’a pas voté le budget, celui-ci est établi définitivement par ordonnance.
Si le projet de loi n’a pu être déposé en temps utile pour être promulgué avant le début de l’exercice, le Premier ministre demande d’urgence au CNT l’autorisation de reprendre le budget de l’année précédente par douzièmes provisoires.
Les autres projets de loi attendront la prochaine législature
Outre la loi de finances 2016, le gouvernement a adopté une série de projets de loi qu’il a promis de transmettre au CNT. Aura-t-il le temps de les voter ?
Au cours de la séance du Conseil des ministres du 9 décembre 2015, le gouvernement a adopté :
– Le projet de loi portant autorisation de ratification de 2 accords de financement d’un montant d’environ 12,75 milliards de F CFA pour l’Université Ouaga
– Le projet de loi relatif au statut du personnel du cadre paramilitaire des douanes
– Le projet de loi portant organisation de la commercialisation de l’or au Burkina Faso.
Le Conseil des ministres du 25 novembre 2015 a aussi adopté des projets de loi à transmettre au CNT :
– Le projet de loi relatif au règlement au titre du budget de l’Etat gestion 2014
– Le projet de loi relatif à la loi de finances rectificative de la loi de finances pour l’exécution du budget de l’Etat gestion 2015
– Le projet de loi portant loi d’orientation de promotion des Petites et moyennes entreprises (PME) au Burkina Faso.
Le Conseil a marqué son accord pour la transmission de ces projets de loi au CNT.