En cette matinée du 17 décembre 2015, l’usine de la Brakina, sise à Kossodo, présente une ambiance particulière à l’approche des fêtes, contrairement aux années précédentes. Pas de longues files de camions ni à l’extérieur ni à l’intérieur de la cour. Nous sommes reçus par Marc Pozmentier, Directeur général (DG) de la Brakina. Il exprime tout de suite son inquiétude: «C’est rare que la brasserie se plaigne en fin d’année mais, cette année, le marché est désespérant». Il nous indique la cour de l’usine remplie de cassiers. «Les magasins des caves étant remplis, celles-ci ne se bousculent pas pour venir chercher la boisson». Mais qu’est-ce qui justifie cette situation?
Selon Marc Pozmentier: «La seule raison, c’est le couvre-feu qui dure depuis 3 mois». Sa réponse permet de mesurer l’ampleur de la situation parce que c’est tout un pan de l’économie qui est touché à travers non seulement la brasserie, mais aussi les caves, les maquis, les bars, les restaurants et les activités connexes comme la grillade, la revente de cigarettes, de cartes de recharge téléphoniques, etc.
C’est la ville de Ouagadougou qui paie le plus lourd tribut parce que le couvre-feu est surtout respecté dans cette ville qui concentre plus de la moitié de l’activité économique. Ainsi, dès 23h00, les lieux de consommation de boissons se désemplissent, laissant des stocks dans les magasins. A la faveur du 11-Décembre 2015, des campagnes de promotion des produits Castel et Guinness a été menée dans des espaces publics, mais elles ont pris fin à 23h00.
Un tour dans la cour de l’usine permet de constater l’ampleur des stocks. «Si l’extérieur reçoit autant de caisses de boissons, c’est que l’intérieur du magasin est débordé», informe le DG de la Brakina. Une fois à l’intérieur du magasin, nous constatons qu’il n’y a pratiquement plus d’espace libre. De grosses piles de caisses remplies de boissons et des bouteilles d’eau minérale Lafi envahissent les lieux.
L’année passée, à la même période, L’Economiste du Faso était sur les lieux pour vérifier comment la Brakina préparait les fêtes de fin d’année. L’ambiance était plus cordiale parce qu’il n’y avait pas autant de stocks. Ce qui fait dire à Marc Pozmentier que : «Nous avons été obligés d’arrêter l’usine pendant 2 jours, alors que l’année passée, à l’époque, il a fallu déployer plus de moyens pour satisfaire la demande».
Cette situation impliquant une baisse de l’activité économique dans le secteur se ressentira sur la rentabilité de la société. Aussi, les recettes de l’Etat prendront un coup. Là-dessus, Marc Pozmentier indique qu’au mois de novembre, la Brakina a enregistré une baisse de 15% de son activité et cette baisse se situerait entre 25 et 30% au mois de décembre.
L’inquiétude du Directeur général se comprend dans la mesure où, cette année, la société a connu quelques difficultés suite d’une part à une grève déclenchée par les travailleurs en début d’année. Cette crise qui l’opposait à ses partenaires sociaux a été réglée en début avril avec l’arrivée du PDG du groupe Castel. «Ces types de problèmes font partie de la vie normale d’une entreprise», reconnaît le DG de Brakina.
D’autre part, après cette grève d’autres problèmes se sont ajoutés, notamment le ravitaillement en eau par l’ONEA, les délestages d’électricité de la SONABEL, puis l’incendie du groupe électrogène en juin 2015. Seulement, il note que cette situation n’a pas concerné que sa société, mais tout le pays entier.
En moyenne, la Brakina pèse 35 milliards de F CFA par an dans le budget national en termes d’impôts et taxes. Si en 2014 le taux de prélèvement des taxes et impôts n’a pas mis en péril la situation économique de la société, comme le rassurait le DG de la Brakina, il se peut que cette année, les recettes à l’Etat baissent. Déjà, les actionnaires de la Brakina sont passés constater les faits. Ils doivent s’attendre à une baisse inévitable de recettes en 2015.
Elie KABORE
14 milliards de F CFA d’investissement pour 2016
En 2016, les prévisions d’investissement de la Brakina s’élèvent à 14 milliards de F CFA. Cette somme sera injectée dans la modernisation de la chaine de production. L’objectif étant d’accroitre les capacités de production en renouvelant les équipements, sans compter l’acquisition de nouveaux emballages, le renouvellement des véhicules des commerciaux, etc. Mais rien n’est sûr avec la situation actuelle marquée par un ralentissement du marché.