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Ordre des architectes du Burkina : les ambitions de Valérie Sanou

Valérie Sanou/Goungounga est la toute jeune et nouvelle présidente de l’Ordre des architectes du Burkina (OAB). Arrivée aux affaires depuis le 9 avril 2015, elle est consciente du travail à abattre afin de permettre à l’OAB d’être plus visible et plus crédible. Nous avons senti sa détermination à rassembler tous les professionnels au détour de l’entretien qui suit.

– L’Economiste du Faso : Elue le 9 avril dernier, vous avez avoué que la structure que vous dirigez manque de visibilité et de crédit depuis sa création en 1991. Qu’avez-vous déjà fait ou que ferez-vous pour combler ce déficit ?
Valérie Sanou/ Goungounga (Présidente de l’Ordre des architectes du Burkina) : Dans le programme d’activités qui a été élaboré, nous avons planifié des activités qui vont davantage crédibiliser notre structure et la rendre plus visible.
Depuis notre installation en juillet dernier, il y a certaines activités qui étaient programmées, mais au regard de la situation socio-politique que notre pays a connue, elles n’ont pas été réalisées. Nous sommes engagés à exécuter ce programme qui s’étale jusqu’en 2017 où prend fin notre mandat.En janvier 2016, nous aurons l’organisation de la réunion du Conseil de l’Union des architectes d’Afrique. Notre pays a été retenu parmi les pays de l’Afrique de l’Ouest pour abriter cet événement. Si le Burkina a cette honneur d’abriter cette importante réunion, c’est parce que l’Ordre des architectes du Burkina a participé au Congrès de l’Union des architectes en Ouganda.
Les autres pays nous ont fait confiance et nous avons marqué notre accord pour accueillir cette rencontre. La venue des architectes de l’Afrique au Burkina Faso va être cumulée avec une autre rencontre qui est la Conférence sur le rôle de l’architecte face aux défis de la transition énergétique. Dans le contexte actuel, c’est un événement qui a son importance parce les architectes sont conscients des enjeux liés à cette transition énergétique. Ces rencontres vont contribuer à renforcer la visibilité et le crédit de l’Ordre des architectes du Burkina.
– L’Ordre des architectes est-il guéri de ses contestations internes ?
L’Ordre des architectes du Burkina est une organisation professionnelle qui regroupe des architectes qui sont inscrits sur le tableau de l’Ordre et qui exercent effectivement la profession d’architecte au Burkina. Il y a 100 architectes inscrits actuellement sur le tableau de l’Ordre de 2015 et qui sont en règle vis-à-vis des textes. Nous venons donc d’horizons différents, d’écoles différentes, et nous sommes de plusieurs catégories d’âge. Chacun de nous a sa façon de voir les choses. Il est souvent difficile, au regard de tout cela, que tous nous parlions de la même voix. Nous acceptons donc qu’au sein de notre organisation commune, nous ayons de points de vue différents. C’est d’ailleurs dans cette différence que nous pensons que l’Ordre peut mieux se construire. L’Ordre a entre autres objectifs d’assurer la cohésion de ses membres. Nous avons pris contact avec tous les architectes qui sont inscrits pour recueillir leurs préoccupations. Nous sommes en début de mandat et nous avons marqué cette volonté d’intéresser tout le monde à la construction de la maison commune. Sans cette cohésion, nous ne pourrons pas mener les vraies batailles qui se présentent à nous.

– Le malaise qui minait l’Ordre à votre prise de fonction ne tient-il pas à ses textes fondateurs ? Où en êtes-vous avec la relecture de vos statuts ?
Au niveau du Conseil de l’Ordre des architectes, nous avons finalisé le projet que nous enverrons dans les prochains jours aux confrères. C’est l’assemblée générale qui va décider du sort de ces projets de texte avant que nous les transmettions au gouvernement. L’Ordre des architectes a été créé il y a 25 ans dans un contexte où le secteur privé n’était pas vraiment développé. Il y avait pas mal de recours au niveau de l’administration publique.

– Le conflit de génération était perceptible en votre sein ?
Notre Ordre n’a pas de conflit générationnel. Il est vrai qu’il y a plusieurs générations en notre sein, mais nous sommes tous inscrits au tableau de l’Ordre et nous avons tous la même voix au niveau des assemblées générales.
– Vos relations sont-elles toujours tendues avec les entreprises ?
Les architectes conçoivent des projets que les entreprises doivent exécuter. Les architectes doivent veiller à ce que les projets soient exécutés conformément aux règles de l’art. Si, pour une raison ou pour une autre, les entreprises ne respectent pas ces prescriptions, l’architecte qui est dans son droit et qui est assermenté est obligé de donner de la voix pour que ses prescriptions soient respectées.

– Est-ce le cas tout le temps ? On ne voit pas de sanctions…
Nous sévissons. Au milieu de cette relation avec les entreprises, il y a le maître d’ouvrage qui est le commanditaire de l’œuvre. Il est donc important que le maître d’ouvrage sache que l’architecte travaille pour lui. Les prescriptions que ce dernier impose à l’entreprise de construction doivent être respectées pour la bonne tenue de l’ouvrage. Il appartient aux entreprises de construction de comprendre cela et de travailler avec les architectes dans ce sens.
– Où en êtes –vous avec l’harmonisation des textes au niveau de l’UEMOA ?
Concernant la libre circulation des architectes dans l’espace UEMOA, nous avons jusqu’au 31 décembre 2015 pour que la directive puisse être transposée dans les différents textes nationaux. En octobre dernier à Cotonou (ndlr, au Bénin), nous avons eu la première réunion de la Conférence des Ordres des architectes de l’UEMOA. Le Burkina occupe le poste de secrétaire permanent et en tant que présidente de l’Ordre des architectes du Burkina, j’occupe la 1re vice-présidence. Nous avons constaté que certains pays, dont le Burkina Faso, ne pourront pas arriver à cette transposition au 31 décembre 2015. Nous avons notre prochaine assemblée générale au cours de laquelle nous espérons adopter les projets de textes que nous sommes en train d’élaborer. Après quoi, nous transmettrons au gouvernement les résultats parce que la transposition relève du gouvernement.

– Comment percevez-vous votre collaboration avec les populations qui ont besoin de vos services ? Avez-vous l’impression ou la conviction que vos offres sont bien comprises ?
Effectivement, les populations font des amalgames sur le rôle des architectes. Il y en a parmi elles qui pensent que nous sommes des dessinateurs. Ce n’est pas leur faute. Dans nos textes, il y a une liberté de publicité qui n’est pas donnée de façon systématique à l’architecte. Ce qui fait que ce dernier ne peut pas faire de publicité sans respecter certaines conditions. C’est pour cela que nous avons décidé de réaffirmer ce rôle social à travers une activité prévue en octobre 2016, à savoir la Semaine de l’architecte. A l’occasion, nous entrerons en contact avec les populations pour leur faire comprendre notre rôle social. Nous avons un projet de formation de certains professionnels tels les ouvriers dans les techniques de construction, notamment en terre.

– Vos facturations peuvent être aussi la cause de la méfiance des populations à vous approcher?
Elles ne savent pas ce qu’on fait. C’est pour cela qu’elles pensent que nous sommes chers. Il y a plusieurs types de prestations. Il y a des plans-types pour les projets dont l’emprise au sol est inférieure à 100m2. Ce sont des projets par exemple dont les plans sont élaborés par des architectes et mis à la disposition des populations. Il y a plusieurs types de rémunérations pour les autres projets à rez-de-chaussée ou à plusieurs niveaux. Il appartient à l’architecte et au maître d’ouvrage de discuter pour trouver la bonne formule afin que l’apport intellectuel de l’architecte puisse être rémunéré à la hauteur du travail fait.

– Que faites-vous face au non-respect des règles de construction ?
L’Ordre des architectes a même le droit d’ester en justice contre les personnes qui ne respectent pas les règles en matière de construction. Depuis que nous avons pris fonction au niveau du Conseil de l’Ordre, nous avons entamé des procédures à l’encontre de certaines structures, essentiellement étatiques et au niveau des collectivités territoriales. Quand nous avons formulé ces plaintes, nous avons eu gain de cause.
– Y a-t-il de faux architectes que vous avez déjà démasqués ?
En notre sein, il n’y a pas de faux architectes puisqu’il faut avoir le diplôme reconnu avant d’être sur le tableau. Il y a peut-être des tentatives d’usurpation de titre, mais nous sommes en train de travailler à dénicher ces usurpateurs.
J’insiste pour dire qu’au-delà des préjugés, il est important que les populations sachent qu’à l’entame d’un projet de construction, elles doivent contacter un architecte inscrit sur le tableau. Sinon, ce sera difficile d’avoir le permis de construire. Nous sommes disponibles pour toute sollicitation parce que nous avons, avant tout, un rôle social auquel nous accordons du prix.

Entretien réalisé par Alexandre Le Grand ROUAMBA


Une jeune présidente aux grandes ambitions

Agée de 36 ans, avec 13 ans d’expérience dans le secteur de l’urbanisme, Valérie Fabienne Sanou née Goungounga a obtenu en 2002 son diplôme d’Architecte-Urbaniste avec la mention «bien». Vice-major de sa promotion, elle a soutenu un mémoire de fin d’études intitulé : «Contribution à l’intégration des secteurs périphériques à la dynamique urbaine de la ville de Ouagadougou : cas du secteur 17». Après avoir occupé le poste de secrétaire générale de l’Ordre des architectes du Burkina, elle s’est vu confier la présidence de cette structure depuis avril 2015. A son parcours professionnel, on peut greffer l’ambition de la présidente de parvenir à une bonne adhésion de tous les membres à la vie de l’Ordre, de lui assurer plus de visibilité et de crédibilité à travers la relecture des textes régissant l’OAB, la mise en œuvre d’une vaste campagne de communication visant à informer le citoyen sur le rôle social de l’architecte. Ce n’est pas tout ! D’ici à 2017, Valérie Sanou, avec l’ensemble de son bureau et l’adhésion de tous les architectes, veut assainir le climat avec les partenaires car, dit-elle, « sans un bon climat de travail, aucun résultat probant n’est possible». Elle n’oublie pas de travailler à accroitre les ressources en vue d’assumer pleinement les missions de l’Ordre.

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