Dans le lot des recommandations de la Commission de la réconciliation nationale et des réformes (CRNR), figure le couplage en janvier 2016 des élections municipales et du référendum pour l’adoption d’une nouvelle Constitution.
Ainsi, on pourrait élire en même temps les conseillers municipaux et doter le Burkina d’une nouvelle Constitution. Depuis que cette recommandation est rendue publique, les avis sont partagés au niveau des différents états-majors des partis politiques, même s’il y en a parmi eux qui ne semblaient pas être au courant d’une telle recommandation.
En interrogeant certains chefs de partis ou des indépendants, notamment ceux en lice pour la présidentielle de novembre prochain, on se fait une idée sur les réserves des uns et des autres. Contacté, Ram Ouédraogo affirme qu’il ne «peut pas se prononcer sur la question» parce que, ajoute-t-il, «par ces temps qui courent, il faut toujours se réunir pour analyser la question». Ainsi, le candidat des Verts «ne saurait donner une réponse immédiate» car, précise-t-il, «notre préoccupation n’est pas le coupable du référendum aux municipales, mais le 11 octobre, avec tous les sacrifices qui avaient été déjà consentis».
Quant à Ablassé Ouédraogo de «Le Faso Autrement», sa position est sans ambiguïté: «Qu’on finisse d’abord les élections couplées présidentielle-législatives, que le gouvernement légitime s’installe et on verra la suite». Pour Ablassé Ouédraogo, «nous n’avons même pas encore mobilisé toutes les ressources financières pour réaliser cette élection ; et comme nous comptons sur la communauté internationale, il vaut mieux que nous donnions la preuve de notre sérieux lors de ces élections avant d’envisager autre chose. Allons étape par étape», conclut Ablassé Ouédraogo qui précise qu’«il n’y a rien qui urge».
Interrogée sur la question, Saran Sérémé a promis de nous revenir, mais malheureusement, nous n’avons pas reçu son retour, tout comme Boukaré Ouédraogo dit Tintin qui a marqué son étonnement: «Ils ont dit qu’ils veulent coupler, non?».
UPC et MPP contre, PAREN et UNIR/PS pour
Pour le candidat Victorien Tougma du MAP, «nous ne sommes pas favorables à un tel couplage». Et il le dit tout net. Explication : «Pour relire la Constitution, il faut un consensus national. Il ne faut pas qu’on parte dans la précipitation et ne pas faire quelque chose de bon». Victorien Tougma a néanmoins une suggestion: «Maintenant, si on peut repousser les municipales à une autre date, on pourrait envisager ce couplage si on veut faire des économies. Mais si la date de janvier est maintenue, ça va être court pour relire une Constitution». Pour lui, tout dépend des options qui seront adoptées.
Le candidat de «AJIR», Adama Kanazoé, avoue entendre parler de ce projet pour la première fois (à l’occasion de notre appel). Il dit donc n’avoir pas discuté du sujet avec son bureau. Il promet une consultation rapide avant de rappeler. En effet, quelques instants plus tard, il nous envoie un message qui dit: «Finalement, le Bureau exécutif national n’est pas favorable au couplage Municipales-Référendum».
Au PAREN, Tahirou Barry pense qu’«en principe, si les élections ont lieu avant fin novembre, les institutions légitimes seront donc en place avant ces élections municipales qui sont prévues pour janvier. Ça ne cause donc pas de problème qu’on couple le référendum à ces municipales». Tahirou reste convaincu qu’«étant donné que ces municipales se dérouleront sous l’empire des nouvelles institutions, il n’y a aucune gêne en cela». L’UPC et le MPP s’étaient déjà montrés hostiles à un tel couplage sur les ondes. Pour eux, il faut laisser le soin aux prochaines autorités de mieux mener ce projet. Me Bénéwendé Sankara, en attendant que l’état-major de son parti, l’UNIR/PS, ne prenne une position officielle, a son appréciation personnelle: «Si le projet est un projet de la transition, c’est normal que cette transition envoie ce projet, au pire des cas, à la dernière élection. Si on peut coupler les législatives avec la présidentielle, pourquoi on ne couplerait pas un référendum aux municipales? Maintenant, le débat de fond, c’est le projet en lui-même. Il faut qu’il soit consensuel. Le projet de Constitution étant déjà là, cela permet d’avancer. Il ne faut pas faire du gaspillage de notre temps et de nos forces. S’il y en qui ont des amendements dans leurs états-majors, ils peuvent les reverser. De toutes les façons, celui qui sera élu à la majorité à l’Assemblée pourra faire les amendements nécessaires. Peut-être qu’il y en a qui ont peur que certaines dispositions ne soient d’application immédiate. Ça aussi, ça peut se dire et on améliore. Il faut que les Burkinabè laissent les débats calculateurs.
Pourquoi doit-on laisser un gouvernement issu d’élections aller seul faire des modifications constitutionnelles ? Celui qui sera dans l’opposition pourrait mal le voir. Il est mieux que ce soit un gouvernement neutre qui conduise ce projet. Personnellement, ce couplage ne me gêne pas».o
Alexandre Le Grand ROUAMBA
Une révision à minima avant le Référendum
En attendant l’adoption de la Constitution par référendum, la CRNR propose comme mesures conservatoires une révision à minima de l’actuelle Constitution. Cette révision sera faite par le CNT et portera sur des réformes jugées essentielles et urgentes. Ce sont :
L’intangibilité de la clause limitative du nombre de mandats présidentiels
La suppression du Sénat
L’intégration dans la Constitution d’un titre relatif à l’Armée nationale
En proposant le couplage Référendum-Municipales, la CRNR explique: «Il ne faut pas laisser la réforme constitutionnelle au bon vouloir des nouvelles autorités qui seront issues des élections générales.
L’adoption du référendum le 31 janvier 2016 offre plus de temps pour un débat citoyen sur la réforme constitutionnelle et pour la dissémination du texte auprès des citoyens à la base, pour une véritable appropriation citoyenne de la Constitution. L’adoption de la Constitution en fin janvier 2016 offre plus de chances d’aboutir à un consensus au sein de la classe politique sur les réformes constitutionnelles».