La crise actuelle de la Grèce, dont les germes ont été plantés dès l’entrée du pays dans la zone euro en 2001, a été précipitée par les nombreux problèmes structurels de l’économie grecque.
Quelles en sont les racines?
En 2000, la Grèce devait 107 milliards d’euros à ses créanciers. Dès lors, elle envisage de se développer grâce aux aides européennes et aux marchés obligataires. Durant ces années, le pays va profiter des conditions très favorables en se finançant sur les marchés. Grâce à l’abondance de liquidités disponibles durant les années 2000, les banques commerciales et les investisseurs étrangers continueront de consentir des prêts. L’origine de la crise tient à l’entrée même de la Grèce dans la zone euro en 2001. L’économie n’était pas assez solide, pas assez diversifiée, et ses finances publiques dans le rouge. Sa dette était de près de 110 % de son Produit intérieur brut (Pib). Comme l’économie grecque connaissait une croissance de 4 % à 5 %, cet endettement n’etait pas un problème. Survient alors la crise financière de 2008 et le pays s’enfonça dans une profonde récession, s’endetta davantage, et cette crise se poursuit toujours. La Grèce a été l’un des premiers pays européens à connaître une crise financière et économique. À la suite de cette crise, de nouvelles liquidités ont été nécessaires afin de renforcer les fonds propres des banques. Il fallait éviter toute faillite bancaire. La Grèce entre en récession en 2009. Son déficit budgétaire représentait 6% du Pib. Il dépassera les 13% en 2010. La récession mondiale de 2008-2009 a conduit à l’augmentation de l’endettement public qui était déjà élevé avant la crise.
Les mesures d’austérité
Des mesures d’austérité ont été mises en place afin de diminuer les dépenses publiques et de réduire la dette. Depuis cette période, le Pib grec a diminué de 25%. Le niveau de vie actuelle de la population grecque représente le même niveau qu’elle avait durant la fin des années 90. Ces mesures d’austérité n’ont pas provoqué le cercle vertueux qui devait diminuer le chômage et générer de la croissance. Aujourd’hui, le taux de chômage avoisine les 25% et plus de 50% chez les jeunes de moins de 25 ans. Depuis le début de la crise, les Grecs ont perdu 40% de leurs revenus. Tous les salariés et les retraités ont été touchés par ces diminutions de revenus. Les Grecs ont donc moins consommé, entrainant une augmentation mécanique du chômage. Les mesures d’austérité ont joué un rôle non négligeable dans la crise grecque.
Une dette élevée
Plus le niveau de la dette rapportée au Pib est important, plus le service de la dette est élevé et ce, quelle que soit la devise du pays affecté par la dette. Lorsque le ratio dette/Pib avoisine ou dépasse les 160%, la situation financière se tend avec de réelles conséquences économiques, politiques et sociétales. Lorsque ce ratio est atteint, il faut éviter tout endettement supplémentaire s’il n’y a pas une diminution du taux d’effort des remboursements annuels. Le réaménagement de la dette est donc nécessaire.
Depuis son intégration dans la zone euro, la dette publique a toujours été supérieure à 100% du Pib. L’une des dates clés est le moment où la Bce, en décembre 2009, signifiait à la Grèce qu’elle n’accepterait plus ses obligations en garantie, si les agences de notation dégradaient sa note. Le coût du crédit s’est envolé. Les taux d’intérêt exigés des pays risqués ont atteint des niveaux très élevés dans les années 2011-2012. Le marché obligataire grec a été très volatile puisque le taux des obligations grecques est passé de 5% à 25% entre janvier 2010 et octobre 2011.
Plus le taux des obligations augmente, plus le loyer de l’argent devient prohibitif. Dans cet environnement, comment les particuliers pouvaient-ils emprunter pour acheter une voiture ou un bien immobilier ? La même question se posait pour les entreprises. Comment pouvaient-elles financer l’investissement [afin de rester compétitives] avec de telles conditions ? Avec une faible inflation, comment ces taux de crédit auraient-ils pu solder le financement des ménages et des acteurs économiques ?
NK
Un accord à problèmes
Il aura fallu d’interminables négociations pour que la zone euro trouve finalement, le 13 juillet dernier à 9 heures, un accord pour venir en aide à la Grèce. Athènes pourra bien faire appel à un troisième plan d’aide financier européen en contrepartie d’importantes réformes, d’un montant de plus de 80 milliards d’euros.
Les négociations ont abouti à une liste de mesures drastiques qu’a acceptée par le Premier ministre grec, Alexis Tsipras.
Il s’agit d’une réforme de la Tva ; de réformes fiscales ; des mesures pour améliorer la «durabilité» du système des retraites en vue d’une plus vaste réforme de ce dernier; la garantie de l’indépendance de l’Etat, l’organisme des statistiques grec; le respect plein et entier des dispositions de différents traités européens, en particulier en mettant en place des mesures des coupes quasi-automatiques dans les dépenses en cas d’excès budgétaires.
De plus, avant le 22 juillet prochain, les Grecs devront : adopter un Code de procédure civile dont l’ambition sera d’accélérer le système de justice civile en vue d’en réduire les coûts, transposer dans leur législation.
Enfin, à terme, Athènes devra renforcer ses propositions de réformes, pour mieux prendre en compte la «forte dégradation de son économie». Cela implique : une réforme des retraites ; une réforme du marché intérieur ; la privatisation du réseau de transports électrique ; une réforme du marché du travail ; un renforcement du secteur financier.
En plus de cela, l’accord envisage «un programme de privatisation plus développé», adossé à la création d’un fonds chargé de privatiser les actifs grecs pour générer 50 milliards d’euros. L’accord évoque également, laconiquement, le fait que Athènes devra «consulter les institutions [créancières] et convenir avec elles de tout projet législatif dans les domaines concernés, dans un délai approprié, avant de le soumettre à la consultation publique ou au Parlement». Un droit de regard des créanciers sur la politique intérieure grecque dont les contours restent à éclaircir.
Cette base d’accord doit encore être avalisée par un certain nombre de Parlements européens, dont le Parlement français, lequel devrait voter à partir du 15 juillet.
Au total, la procédure pourrait prendre deux ou trois semaines au cours desquelles la Grèce se trouvera toujours à court de liquidités, alors même que s’approche la perspective d’un nouveau défaut de paiement grec, cette fois à l’égard de la Bce, à qui Athènes doit 3,5 milliards d’euros à l’échéance du 20 juillet.