Les présidents du Nigeria, du Tchad, du Niger, du Bénin, et le ministre de la Défense du Cameroun se sont réunis au Nigeria pour mieux organiser la lutte contre Boko Haram. Le nouveau président du Nigeria a affiché, le 11 juin dernier, sa volonté de reprendre la main contre les islamistes de Boko Haram, réclamant à ses pairs de la région le commandement de la future force régionale pendant toute la durée de «l’effort de guerre». Lors d’un sommet à Abuja, le chef de l’État nigérian, Muhammadu Buhari, s’est opposé à l’idée d’un commandement tournant de la force tous les six mois entre les cinq pays. La Force d’intervention conjointe multinationale (Mnjtf) en discussion le 15 juin doit être dotée de 8.700 militaires, policiers et civils, et son quartier général sera installé à N’Djamena, la capitale tchadienne. Il était déjà acquis qu’elle serait commandée à son lancement par un général nigérian, Tukur Buratai. «Le Nigeria doit conserver le commandement de la Mnjtf durant l’ensemble de la durée de l’effort de guerre», a estimé M. Buhari. Un commandement unique améliorera «l’efficacité de la stratégie militaire, dans la mesure où le Nigeria va fournir le gros des troupes et où le principal théâtre des opérations se situe sur le sol nigérian», a-t-il insisté. Ces derniers mois, irrité par la passivité de Goodluck Jonathan, le précédent président nigérian, face à la menace de Boko Haram sur la stabilité régionale, le Tchad avait pris l’initiative des principales opérations militaires dans la région du lac Tchad. L’intervention de M. Buhari confirme le changement de ton à Abuja sur le dossier Boko Haram depuis que l’ancien général a pris ses fonctions le 29 mai. Pendant sa campagne, il s’était déjà engagé à vaincre la longue insurrection qui a fait plus de 15.000 morts depuis 2009.
Sitôt investi, il a visité ses alliés au Tchad et au Niger. Puis il s’est rendu à la rencontre du G7 en Allemagne le week-end dernier pour appeler les dirigeants des pays riches à le soutenir davantage dans sa lutte contre les islamistes armés. Il a aussi ordonné le transfert du centre de commandement militaire nigérian d’Abuja à Maiduguri, la grande ville du Nord-Est du pays, au cœur de l’insurrection. L’activisme de M. Buhari, 72 ans, contraste avec les années d’inaction sous son prédécesseur. «Il doit aller le plus vite possible» pour profiter de son état de grâce après son élection, juge l’analyste politique Imad Mesdoua, du cabinet Africa Matters de Londres.
NK
La nécessité de la force régionale
La création de la force régionale avait été décidée en mai 2014, après le rapt de plus de 200 lycéennes à Chibok, au Nigeria, qui avait choqué le monde entier. Elle aurait dû déjà être opérationnelle en novembre dernier, mais les mésententes entre le Nigeria anglophone et ses voisins francophones ont retardé sa mise en place. La force a été relancée en janvier alors que Boko Haram menait des attaques quotidiennes dans le Nord-Est du Nigeria et contre les territoires frontaliers du Cameroun, du Niger et du Tchad. Boko Haram a depuis fait allégeance, en mars, à l’organisation jihadiste État islamique (E.I), qui contrôle un vaste territoire à cheval sur l’Irak et la Syrie.