La quasi-totalité des taxis de Ouagadougou sont actuellement vieux et usés. Même constat à Bobo-Dioulasso, la deuxième capitale, où la situation semble pire. Pour le Syndicat national des taximen du Burkina (Synta-B), cette situation, en plus d’être un inconvénient pour leur activité, déshonore nos villes. En effet, d’après le Synta-B, «nos taxis ne sont pas présentables». C’est depuis 2010 qu’ils ont formulé le souhait de l’accompagnement de l’Etat pour le renouvellement du parc, mais sans succès.
A la 14e Rencontre Gouvernement/Secteur privé (Rgsp) tenue le 27 avril dernier à Bobo-Dioulasso, les taximen sont venus rappeler cette préoccupation majeure pour leur secteur. «Le taxi est la vitrine de la cité de par le fait que tout étranger qui arrive dans nos villes, où il y a des taxis, a pour premier contact le taximan pour le conduire à l’hôtel, à domicile, au lieu de son hébergement ou à une autre compagnie de transport pour ceux qui sont en transit», a rappelé Souleymane Ouédraogo, Sg du Synta-B, à l’endroit du Gouvernement. Pour lui, le renouvellement du parc est aujourd’hui une «nécessité impérative».
Mais les taximen estiment que sans accompagnement de l’Etat par des mesures de facilitation, il n’est pas possible pour les opérateurs de ce secteur de s’acheter des véhicules neufs. Or depuis 1998, où une opération spéciale lancée par le Gouvernement avait permis l’importation de 20 taxis neufs, il n’y a plus eu de faveur. Pour combler le besoin, les acteurs se sont débrouillés jusque-là avec des véhicules d’occasion. Pourtant en août 2011, le Gouvernement avait décidé, en Conseil des ministres, du lancement d’une «opération exceptionnelle d’importation des véhicules en exonération des droits de douane et de Tva». Cette importation en franchise de droit de douane et Tva visait, non seulement, à renouveler le parc vétuste des automobiles de transport de marchandises et d’hydrocarbures, mais aussi des taxis.
L’importation de 300 taxis avait été autorisée mais au final, seulement 45 taxis sont arrivés par cette opération. La formule fixée par le ministère des Transports ayant été jugée inaccessible par les taximen. «Dès le début, nous avons été clairs avec les responsables du ministère des Transports. Nous leur avons dit que malgré l’exonération, aucun taximan n’a les moyens, tout seul, d’aller acheter un véhicule neuf au prix de 5 millions. C’est effectivement ce constat qui s’est avéré. Les 45 taxis qui sont arrivés n’ont pas été achetés par des taximen. Ce sont des fonctionnaires du ministère qui les ont acquis», a expliqué le Sg du Synta-B à L’Economiste du Faso.
La proposition des taximen est qu’en plus de l’exonération, le Gouvernement accepte de supporter une garantie auprès des banques, qui financeront leurs achats pour le renouvellement du parc. «Si nous regardons dans notre sous-région ouest-africaine, les mêmes renouvellements se font chaque année sans aucune difficulté. C’est le cas au Ghana, en Côte d’Ivoire et au Sénégal. L’Etat garantit les prêts des taximen auprès des banques. Au Burkina, le même procédé est possible, mais à condition que certains intermédiaires acceptent de laisser tomber les intérêts égoïstes pour privilégier la bonne marche du transport urbain», estime Souleymane Ouédraogo. «Nous voulons des taxis neufs car les véhicules d’occasion ne sont pas à 100% fiables. Si l’Etat nous accompagne, nous sommes capables de rembourser la totalité des crédits en 3 ans d’exploitation», ajoute-t-il.
Toutefois, une crise de confiance s’est installée entre les autorités et les taximen à partir de la mauvaise gestion du remboursement du crédit des 20 taxis importés en 1998 à l’occasion de la Coupe d’Afrique.
D’après le Sg du Synta-B, il aura fallu passer par l’augmentation du prix de la patente sur les taxis pour réunir les 100 millions, que «certains anciens responsables du syndicat devaient» au Trésor public. Selon l’actuel Sg du Synta-B, la sanction consécutive à cette mauvaise passe ne devrait pas être généralisée.
A Bobo-Dioulasso, le Premier ministre Zida s’est dit favorable à la doléance concernant le renouvellement du parc. Il s’est engagé à trouver la solution à cette préoccupation qu’il juge «pertinente».
Karim GADIAGA
Les taxis génèrent plus d’1 milliard en taxes par an
Lors de son intervention à la 14e Rgsp, le Sg du Synta-B s’est livré à un calcul estimatif de l’apport de l’activité des taxis en termes taxes et impôts. Le syndicat dénombre environ 4.000 taxis à Ouagadougou et environ 2.000 taxis à Bobo-Dioulasso. «Au niveau des Assurances, les frais annuels s’élèvent à 123.000 F CFA par taxi. La visite technique coûte 28.000 FCFA par taxi et par an. La patente et le stationnement valent 40.000 F CFA par taxi et par an», rapporte le Synta-B. Selon ces indications, les taximen indiquent que leur activité génère plus d’un milliard par an en termes de taxes.
Pour le maintien de la patente à 40.000 F CFA
En termes d’impôt, les taximen sont soumis à une patente, qui est aujourd’hui de 40.000 F CFA par taxi. Toutefois, d’après le Sg du Synta-B, les autorités municipales leur ont fait part de l’augmentation de cette patente à 50.000 F CFA suivant les dispositions communales applicables à partir de l’année 2015. Le syndicat estime que ses membres ne sont pas en mesure de supporter cette augmentation de 10.000 F CFA. «Notre activité est confrontée à de nombreuses difficultés qui limitent sa rentabilité. Il y avait déjà la vétusté des taxis, qui coûte énormement en réparations, mais l’arrivée des tricycles et quadricycles a également contribué à réduire notre part de marché. Nous souhaitons qu’on maintienne la patente à 40.000 F CFA», clame Souleymane Ouédraogo. Les taximen ont d’autres doléances qui portent sur «la réalisation des têtes de taxis sur les différents axes des villes pour faciliter le stationnement et la fluidité de la circulation» et aussi «une subvention de l’Etat aux syndicats des taxis».