Qui peut dire avec exactitude le nombre de marques d’eaux conditionnées en sachets plastiques qui circule sur le marché? L’eau en sachets est-elle sûre? Nous avons tenté de visiter quelques unités de production d’eau, mais c’était sans compter avec la méfiance des responsables. Difficile de savoir dans quelles conditions les eaux conditionnées en sachets plastiques sont mises sur le marché. Pour preuve, des neuf entreprises que nous avons tentées de joindre au téléphone sur la base des numéros de téléphone figurant sur leurs emballages, seulement trois répondent au téléphone. Les six autres marques ne fonctionnaient pas.
Sur les trois entreprises jointes au téléphone, une seule nous a reçus, mais en dehors de son usine de production. Les deux autres se sont rétractées et leurs numéros sont «hors réseaux» au moment où nous mettions sous presse.
Pour en savoir plus sur les risques encourus par les consommateurs, L’Economiste du Faso a tendu son micro au Docteur Alfred Ouédraogo, médecin- juriste publiciste. Ce diplômé en Des Biologie médicale, sciences fondamentales et biologiques répondait à la question suivante. Les eaux en sachets plastiques sont-elles un danger pour la santé des consommateurs? Voici sa réponse.
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Docteur Alfred Ouédraogo, médecin- juriste publiciste : «Je ne vais pas aller du dos de la cuillère pour vous dire que, contrairement à ce que la population peut penser du caractère propre et hygiénique de ces eaux, dans leur grande majorité, elles ne sont même pas plus propres que l’eau du robinet. Pire, une étude conduite par des biologistes a été faite sur la majeure partie des eaux en sachets plastiques et les eaux de 10 F CFA que les enfants vendaient. Il se trouve que ces eaux (de 10 francs) sont étonnamment plus hygiéniques et contiennent moins de germes que la plupart des eaux conditionnées dans les sachets de façon industrielle et vendues à 25 F CFA.
Dans les discussions de cette étude, il apparait très simplement que l’eau que les enfants vendent, qui est l’eau du robinet, contient du chlore. Le chlore, du reste, il faut le rappeler, se dégrade continuellement avec l’exposition de la lumière. Compte tenu du fait que ces eaux ne font pas souvent plus de 48 heures, ces eaux sont vendues entre 24 à 48 heures, donc le chlore résiduel demeure toujours actif, si bien que cette eau est manipulée avec prudence et reste assez propre à la consommation et comporte moins de microorganismes. Par contre, si vous prenez les eaux dans les sachets collés à la barre chauffante électrique avec des noms très variés, la situation est assez grave.
Ces emballages viennent souvent du Ghana ou d’ailleurs et confectionnés sans les normes d’hygiène et de qualité. Pendant le processus de fabrication, il y a des germes qui se trouvent dans les sachets. Ensuite ces derniers arrivent dans des conditions peu catholiques au Burkina. Parfois, c’est l’eau du robinet ou de forage que l’on utilise pour remplir ces sachets qui sont impropres, avec des ustensiles qui ne sont pas souvent propres, et l’on procède à la fermeture avec un appareil (barre chauffante électrique). Si ces sachets mal entreposés ne sont pas fermés hermétiquement, des micro-organismes peuvent y entrer.
L’eau qu’ils contiennent devient alors un bouillon de culture de microbes.
Du reste, quand c’est l’eau du robinet au départ propre qui est utilisée avec son chlore actif, au bout de quelques jours, le chlore devient inactif, le consommateur se retrouve toujours avec ce bouillon de culture de microbes. C’est l’aspect bactériologique de la question.
Je vais plus loin en tant qu’embryologiste pour affirmer que nous avons de plus en plus de problèmes de procréations. 23% des consultations de gynécologie dans la ville de Ouagadougou, selon une étude réalisée en 2012 à l’Université de Ouagadougou, incriminent des substances issues de la dégradation du plastique.
Les sachets sont exposés au soleil ou à une chaleur très élevée, ce qui entraine une détérioration de la matière plastique. Cette matière plastique à terme induit une dose élevée de phénol et dans une moindre mesure du bisphénol. Dans certains pays comme le Canada, on a dû retirer les biberons chez les enfants parce que le plastique générait du bisphénol et qui perturbait le système endocrine (les hormones) et ça minait l’estrogène. A partir de ce moment, ça pose un problème de reproduction.
Aujourd’hui, beaucoup de jeunes ont des problèmes de reproduction qui pourraient tirer leurs origines des sachets plastiques que l’on utilise pour conserver de l’eau dans des températures de 40 à 50 degrés où il y a une détérioration. Pour s’en convaincre, quand vous buvez ces eaux, il y a souvent une odeur assez caractéristique qui se dégage. C’est donc dire que c’est un bouillon de culture microbienne que vous êtes en train de boire, heureusement que notre tube digestif que nous vaccinons régulièrement arrive à contenir ces germes.
Il y a d’autres qui traitent leurs eaux avec des rayons Ultra-violets, les Uv détruisent tout ce qui est micro-organisme. Là aussi il y a des limites. Il faut que le sachet soit bien fermé. Autrement, si vous détruisez vos micro-organismes c’est bien, mais si vous déposez les sachets dans des entrepôts sales, les micro-organismes vont encore y entrer. Tout comme si vous les déposez dans des endroits à température trop élevée, cela va détruire le plastique et poser des problèmes de santé aux populations.
De notre point de vue, il faudrait que Le laboratoire national de santé publique et les ministères de l’Environnement et du Commerce puissent publier la liste des eaux qui posent problèmes».o
17 marques non-conformes en 2010
C’est en 2010 que la Laboratoire national de la santé publique a publié une liste des sachets d’eaux présents sur le marché. 43 marques d’eau ont été répertoriées, dont 17 étaient déclarées non-conformes. Au cours du mois de mai de la même année, le nombre de marques est passé à 49, dont 7 unités de production sont déclarées non-conformes. A l’époque, du côté du ministère du Commerce, 22 unités ne disposaient pas d’autorisation de création, donc travaillaient en tout illégalité.o