C’est un fait, la qualité du réseau internet est médiocre ces derniers temps. Beaucoup d’utilisateurs s’en plaignent d’ailleurs. Comme pour confirmer ce constat, un rapport dénommé «Ookla Speedtest» a récemment classé le Burkina dernier pays sur 196 en matière de téléchargement.
Du côté de l’Onatel, opérateur historique, L’Economiste du Faso est allé chercher des explications et recueillir l’avis de la société sur le classement de notre pays. Le responsable technique de l’opérateur répond.
– L’Economiste du Faso : En ce moment, il est très difficile d’accéder aux pages internet à travers le réseau Onatel. Quelles explications donnez-vous de cette situation?
Onatel SA : Il est difficile de généraliser ce constat à l’ensemble des sites, dans la mesure où l’accès aux pages Internet implique tous les réseaux utilisés et qui contribuent à l’acheminement des requêtes des clients. Il s’agit en l’occurrence du réseau de l’Onatel qui est sous notre responsabilité, mais aussi et surtout des réseaux des autres opérateurs à travers lesquels transitent les requêtes des clients (réseaux des opérateurs sous- régionaux nous permettant d’accéder aux câbles sous-marins, réseaux des opérateurs sur lesquels les sites consultés sont connectés). Le ralentissement constaté dans la navigation et les difficultés d’accès à certains sites web sont donc liés d’une part, à une bande passante internationale fréquemment réduite du fait des coupures de câbles ou des travaux de leur maintenance et d’autre part, au blocage des sites consultés pour question de sécurité (des alertes nous sont transmises souvent par le Cirt (Computer Incident Response Team) dans ce sens. En effet, depuis quelques jours, nous enregistrons des pannes récurrentes sur des liaisons par fibres optiques dans des pays voisins du Burkina Faso, ce qui impacte la qualité de service des connexions internet malgré l’augmentation de la bande passante récemment opérée.
– Récemment, l’Onatel a fait savoir qu’il a augmenté la puissance de son réseau internet. Qu’est-ce qu’il faut comprendre par là ? Qu’est-ce qui justifie alors que paradoxalement la qualité de l’internet ne connaisse pas une évolution ?
La bande passante internet, à savoir le débit (exprimé en Mbits), installée par l’Onatel pour accéder aux câbles sous-marins est passée en 2013 de 1,2 à 1.8 Gb/s, soit 50% de plus et puis à 4.3 Gb/s progressivement en 2014, soit près de 140%. Cette augmentation est opérée sur notre connexion aux câbles Sat3 et Main-One. Seulement, comme annoncé plus haut, les coupures et actes de vandalisme affectent la disponibilité d’une bonne partie de cette bande passante internationale dont le coût reste très élevé.
– Quelles sont les conditions et les solutions pour offrir un service internet de meilleure qualité au Burkina ?
Pour offrir un Internet de meilleure qualité, nous travaillons à augmenter davantage, autant que faire se peut et sans impacter les tarifs actuels, la bande passante pour chaque voie d’accès afin de permettre, en cas de coupure d’une voie, à celles qui sont intactes de véhiculer, sans restrictions, le trafic de nos clients. Nous travaillons aussi à sécuriser le réseau de transmission tant sur le plan national qu’au niveau international afin de réduire sensiblement l’effet des coupures répétitives sur les réseaux concernés. Nos investissements vont également aux équipements internet nationaux allant jusqu’aux extensions et sécurisation des capacités au niveau des villes et même des quartiers. En somme, pour avoir une bonne connexion, plusieurs parties du réseau doivent être suffisamment dimensionnées en allant du poste du client jusqu’au câble sous-marin. De même, les congestions des sites consultés et au niveau des réseaux des pays dans lesquels ils sont hébergés sont également autant de contraintes que le client impute souvent à tort à l’Onatel, alors que nous n’avons pas de marge de manœuvre importante dans ce domaine.
– Dans le rapport « Ookla Speedtest », le Burkina est classé dernier sur 196 pays en matière de téléchargement. Quelle appréciation faites-vous du classement ? Correspond-t-il à la réalité ?
Ce classement n’est pas satisfaisant, mais n’est pas le seul à prendre en considération pour se faire une idée objective de la connexion internet dans notre pays.
A ce sujet, je vous invite à consulter également le rapport de la Banque mondiale (Connecting to Compete 2014) pour se faire une opinion différente de celle traduite par les mesures d’Ookla. En effet, le dernier classement en question doit être considéré avec beaucoup de réserves. Premièrement, le Burkina est cité dans ce classement, alors que d’autres n’y sont même pas.
Deuxièmement, il faut noter que le protocole de mesure Ookla utilise des serveurs de référence, alors que l’Onatel n’en héberge pas. Nous sommes donc évalués par rapport à un serveur hébergé sur un autre réseau au Burkina qui ne dispose pas de la même bande passante que nous.
Néanmoins, il convient de rassurer nos clients que l’Onatel SA ne ménagera aucun effort pour investir suffisamment dans ce domaine et pour doter le pays d’une meilleure capacité de connexion, pourvu que les actes de vandalisme soient endigués avec le concours aussi bien des services de l’Onatel, des citoyens que des autorités concernées.
– Qu’est-ce qui est en train d’être fait et à quel moment les utilisateurs de vos services internet peuvent-ils espérer voir la fin du calvaire ?
La situation n’est pas aussi critique que le laisse entendre votre question. Plusieurs clients nous l’attestent, dans la mesure où ils surfent dans des conditions de plus en plus favorables. La situation est également en amélioration continue depuis 2014, les augmentations successives de la bande passante servent quand même à apporter une certaine fluidité au trafic.
Alors que nous étions à un taux de saturation des circuits de 97%, nous tournons actuellement à moins de 75%, ce qui est un seuil optimal.
Toutefois, des efforts encore plus importants sont en cours et ne manqueraient pas au cours de cette année de nous permettre de mettre le pied à l’étrier du très haut débit.
En effet, un certain nombre de projets sont en cours pour sortir le Burkina de l’ornière.
Nous citerons, au niveau du réseau Onatel SA, les travaux de fiabilisation du réseau filaire notamment à Ouagadougou, la mise à niveau du backbone internet et enfin l’augmentation, encore et encore, de la bande passante internet, surtout vers le Ghana qui héberge le point d’atterrissement du câble sous-marin le plus proche du Burkina.
Aussi des projets de sécurisation de la fibre optique sont-ils en cours pour éviter toute réduction de débit en cas de coupure de certains liens, que ce soit sur le territoire burkinabè ou sur les territoires des pays qu’ils traversent.
Pour terminer, nous voulons rassurer nos clients que des dispositions pour une diversification des liaisons d’accès au câble sous-marin sont en cours pour garantir la qualité de la connexion dans un futur proche, avec toujours des conditions tarifaires avantageuses.
Interview réalisée par Karim GADIAGA