Le 31 octobre 2014, le pouvoir militaire en place au Burkina Faso depuis la démission du président Blaise Compaoré a décidé de la fermeture des frontières terrestres et aériennes du pays des Hommes intègres pour des raisons de sécurité. Cette mesure qui a été levée seulement autour du 4 novembre 2014 a été un cauchemar dans la cité de Santa, Niangoloko, qui doit sa notoriété aux multiples activités lucratives qui s’y mènent à la faveur justement de la frontière avec la Côte d’Ivoire.
Le 4 novembre 2014, l’axe Banfora-Niangoloko a connu un trafic particulièrement dense. La prudence sur cet axe était de mise. Et pour cause, la frontière terrestre de ce côté venait d’être ouverte et les véhicules qui ont attendu durant quelques jours de part et d’autre s’affairaient à franchir et à réduire la distance qui leur restait à parcourir. «On avait l’impression de vivre un bouchon comme c’est le cas très souvent dans les grandes villes européennes», confie Victorien Soma, dont le domicile jouxte le bureau des douanes. Selon lui, les récents événements du côté de la capitale burkinabè ont créé beaucoup de frayeur au niveau des habitants et il fallait être présent à Niangoloko pour se rendre compte que les activités économiques de la Côte d’Ivoire et celles du Burkina sont intimement liées. «Au parking de la douane, du côté Burkina comme du côté Côte d’Ivoire, relate-t-il, on pouvait voir une longue file de camions et petits véhicules». Et de poursuivre que, pour ironiser, les gens avaient commencé à dire qu’il n’est pas permis à tout le monde de s’offrir un pot par ces temps qui couraient. Niangoloko est une ville commerciale, et lorsqu’il n’y a pas de circulation et d’échanges entre les deux pays, rien ne va, conclut notre interlocuteur. A travers ces propos de Victorien Soma, on s’aperçoit que la fermeture de la frontière avait quelque peu paralysé la ville de Niangoloko.
Ousséni Diallo dit Morgan, chef de l’agence Transcom de Niangoloko et par ailleurs secrétaire général de l’amicale des transitaires de Niangoloko, ne dit pas autre chose, lui pour qui Niangoloko était une ville morte durant la fermeture des frontières. «Si la frontière n’existe pas, nous aussi nous n’existons pas», dit-il, l’air visiblement inquiet. Selon lui, toute l’activité économique du Burkina passe par les frontières, et celle de Niangoloko n’est pas au dernier rang de celles-ci. Lui également relate que le parking de la douane était rempli et il a fallu bloquer des camions à la place de la mairie, du côté Burkina, et à Danguoindougou, du côté de la Côte d’Ivoire. Durant ce temps, fait-il remarquer, «nous n’avons pu déposer aucun document au niveau de la douane et personne d’entre nous n’a encaissé le moindre centime. C’est pourquoi, nous demandons aux autorités de ne pas hermétiquement fermer les frontières lorsque les pays sont en crise». Il se susurre dans la ville de Niangoloko que les restaurateurs sont les seuls acteurs qui ont profité de la fermeture de la frontière ou qui n’ont pas souffert durant cet intervalle de 4 jours. Cela ne semble pas être l’avis de Yacouba Sana dont le restaurant est le plus proche du parking de la douane. Malgré la forte présence de routiers et de passagers obligés de se nourrir, ce dernier confie que ses recettes n’ont pas été bonnes. C’est pourquoi, et tout comme la plupart des acteurs du secteur informel de Niangoloko que nous avons approchés, il souhaite ne plus connaître de pareils moments. Si au pire des cas des événements du genre devaient se reproduire, les acteurs de l’économie locale de Niangoloko souhaitent que chacun fasse preuve de hauteur d’esprit pour préserver l’essentiel.
A entendre Yacouba Sana, avec cette crise que le pays traverse, les gens sont de plus en plus méfiants. Ils ne sont plus enclin à dépenser.
Sy Amir Lookman